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tes bibliques réunis par M. Lods il ressort que pour eux la musique était en relations très étroites avec le monde des esprits.

Tantôt les Israélites attribuaient à la musique « le pouvoir d'agir par contrainte sur les puissances surnaturelles, sur les esprits et sur les choses, ce qui est la définition même de la vertu magique: la musique peut faire venir les esprits ou les effaroucher, provoquer le tonnerre, renverser les murailles » ; tantôt l'ancien Israël attribuait à la musique « une action puissante assurément sur le monde invisible, mais moins impérative, une action par persuasion; conception plus respectueuse, plus religieuse et sans doute moins antique des effets de la musique ». M. Ad. Lods signale une des plus frappantes conséquences de cette croyance primitive: « La musique peut agir sur Dieu lui-même. Une loi du code sacerdotal prescrit la fabrication de deux trompettes d'argent, qui devront être sonnées exclusivement par les prêtres. Elle indique dans quelles circons tances et comment ceux-ci devront en faire usage. Et voici ce qu'elle ajoute sur l'effet de ces sonneries de trompette: « Quand vous entrerez en guerre, dans votre pays, avec l'oppresseur qui vous opprimera, vous sonnerez des trompettes (le verbe employé indique une sonnerie bruyante et prolongée) et vous vous rappellerez [ainsi] au souvenir de Yahvé... et vous serez délivrés de vos ennemis. Dans vos jours de joie, à vos fêtes, au début de chaque mois, vous ferez entendre un appel de trompettes au moment de vos holocaustes et de vos sacrifices de paix; et cela vous servira de mémorial devant votre Dieu (Nombres 10, 9-10). » Le sens du passage n'est pas douteux et, au surplus, M. Lods montre que l'usage se perpétua pendant toute la période du second Temple, en même temps que l'explication très franche qu'en avait donnée le Code sacerdotal. << La loi rituelle avait ici, comme en mainte autre occasion, sanctionné une vieille croyance populaire en même temps que le geste traditionnel par lequel elle s'exprimait» (p. 254-255).

-En suite à son beau livre sur Les plus vieux chants de la Bible, notre collaborateur M. A. Causse a publié dans le no de janvierfévrier 1926 de la Revue d'histoire et de philosophie religieuses de Strasbourg (pp. 1-37) un important article sur l'ancienne poésie cultuelle d'Israël et les origines du Psautier. Une note finale exprime bien les positions prises par M. Causse dans la controverse (p. 37. n. 2) sur l'origine et le caractère des Psaumes (cf. art. de M. Ad. Lods dans R. II. R. t. XCI pp. 15-34): « Tout en faisant dans le Psautier la part la plus large à la poésie cultuelle et liturgique, nous croyons devoir maintenir à l'encontre de Mowinckel l'existence de psaumes d'origine piétiste et de destination d'abord privée. Sans parler comme Gunkel des analogies tirées de l'histoire de la formation des recueils de cantiques des églises protestantes, et en nous

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en tenant aux seules circonstances de l'histoire du judaïsme, il est manifeste que le jour où Israël a commencé à devenir une diaspora, le culte du Temple malgré le rôle de Jérusalem comme capitale spirituelle et ville de pèlerinage perdait nécessairement son importance essentielle dans la piété juive. Qu'une vie religieuse plus ou moins indépendante se soit dès lors développée dans des conventicules, les maisons de prière, que l'on appellera plus tard les synagogues, cela peut ne pas être dès l'abord attesté explicitement dans textes, cela ne doit pas moins en être tenu pour très vraisemblable. D'autre part, il est également admissible que des morceaux lyriques composés dans les milieux de la diaspora ont pu être portés à Jérusalem et y recevoir droit de cité parmi les chants du Temple : V. notre étude sur les origines de la diaspora et la formation du judaïsme, dans Revue de l'Histoire des Religions, nov.-déc. 1924. »

nos

M. W. Deonna a écrit pour la Revue des Etudes gracques (janvier-mars 1925) une étude sur Orphée et l'oracle de la tête coupée - motif dont, en France, la littérature la plus actuelle vient de faire un usage au moins inattendu et que le savant archéologue genevois soumet à une pénétrante analyse historique et psychologique.

...Il s'agit, dit M. Deonna, d'une donnée instinctive qui a trouvé sa place dans le mythe grec. Siège de la vie, de l'âme, la tête résume la personne: elle en est le symbole. Elle suffit à l'être, et des démons peuvent n'avoir pas de corps, être réduit à une tête, tout comme les anges de l'iconographie chrétienne. Privé de sa tête, le corps n'est rien, et l'âme doit errer sous terre en gémissant; de là la grande peine de la décapitation connue dès l'époque préhistorique.

L'efficacité des têtes, leur rôle comme talismans, sont des faits bien connus, universels, antiques et modernes. Elles sont dispensatrices de biens, elles enrichissent, elles font, comme on le disait de celle des Templiers, fleurir les arbres et germer les moissons, elles donnent la victoire, pétrifient l'ennemi, rendent invisible etc... Par le fait qu'elle est détachée du corps et que la mort a accompli son œuvre, la tête humaine est en étroite relation avec le monde souterrain infernal. Ce n'est pas sans raison que, dans maint rite funèbre, l'urne sépulcrale a la forme d'une tête, et qu'en latin le mot testa, d'où vient le français tête qui a fini par supplanter caput, chef, signifie urne sépulcrale. Aussi, dans la nécromancie emploie-t-on fréquemment les ossements ou la tête du défunt qui décrit son séjour infernal, prophétise l'avenir ». M. Deonna a réuni de cette dernière croyance tout un faisceau d'exemples qui expliquent le rôle oraculaire des têtes coupées, d'Orphée aux temps modernes.

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Sur les nombreux tombeaux gallo-romains des re èt me siècles de notre ère découverts à Luxeuil sont représentés des personnages tenant, dans la grande majorité des cas, de la main gauche un flacon ou un coffret, et dans la droite repliée sur poitrine, un verre ou une coupe. M. Barbedette dans un article récent de la Revue archéologique, tir. à part, 1926 étudie la signification symbolique de ces objets. On a vu dans ces coupes et même dans les coffrets, le symbole du repas eucharistique. Mais M. Barbedette fait très justement observer que Luxeuil n'est nulle part mentionnée comme déjà convertie au christianisme dès le Ie siècle et que d'autre part cette profusion de flacons et de verres dans les représentations des tombeaux gallo-romains en question s'explique le plus naturellement du monde par la présence de sources thermales consacrées à deux divinités locales Lusoius et Bricea. A Plombières, des stèles funéraires présentent des personnages tenant en main des objets semblables.

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Il existe une différence indéniable entre l'inspiration des poètes profanes et l'inspiration proprement mystique, spécialement dans les littératures sémitiques. Dans une communication présentée au quatrième congrès de la Ooestersch. Genootschap à Leyde (5 et 6 janvier 1925), M. Louis Massignon a mis en pleine lumière cette différence entre introspection et retrospection. L'excellent islamisant auquel le Collège de France vient de donner une de ses chaires magistrales a mené cette délicate analyse sur des documents choisis dans Ibn Dawoud et El Halladj. Mais l'on sait que M. Massignon est en outre en possession d'une rare compétence sur l'histoire générale des plus délicats phénomènes de la spiritualité, et ses observations sont valables pour tous les cantons de la mystique.

Voici sa conclusion: « Nous pouvons dire que les poètes profanes traduisent en termes discursifs des émotions sensibles, suivant en cela le procès normal de la formation des concepts; tandis que les mystiques sont tenus, suivant leurs propres déclarations, d'expérimenter et d'apprécier en termes discursifs une commotion de source supra-sensible, une touche divine et cette intuition directe qu'ils ont alors ressentie. Les mystiques ont donc tendance à nous livrer tel quel, plaqué et brut, le complexe émotionnel qu'ils ont subi; quittes à tàcher, après coup, de nous en expliquer le symbolisme. Pour le moment, ils essaient uniquement de rester transparents au pur jaillissement de l'émotion. Les poètes profanes, au contraire, tendent à composer une idole factice en surestimant certaines données partielles de leur expérience mentale qu'ils assemblent dans un mème cadre artificiel pour dresser devant nous une allégorie de leur invention. >>

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- Dans la Revue de synthèse historique, nos 118-120, tome XL, pp. 85-103, M. A. Renaudet montre de quel intérêt sont les récents travaux de M. Asin Palacios (La escatologia musulmana en la Divina Comedia, cf. R. H. R. t. LXXXI, pp. 333-360) et de M. G. Soulier (Les influences orientales dans la peinture toscane) qui l'un et l'autre fournissent des preuves si décisives de l'apport de l'Orient dans les formes adoptées par la pensée et par l'art de la première Renaissance italienne. << Il semble, conclut M. Renaudet, que désormais le développement de l'intelligence italienne, entre le XIIIe siècle et le xvi, s'éclaire d'une lumière nouvelle. Si l'on doit admettre que la poésie de Dante fut inspirée par la légende et la mystique musulmanes, que les premières écoles de peinture toscane furent tout orientales, et que les peintres ne rejetèrent pas avant le xvIe siècle les formules importées d'Asie, il nous faut reviser les notions courantes sur l'histoire de la première Renaissance. D'une part, les plus anciennes et les plus puissantes créations de l'art et de la poésie apparaissent marquées d'une empreinte où il faut reconnaître l'Orient et l'Islam; d'autre part le classicisme humaniste, qui naît avec Pétrarque, se manifeste comme un effort pour libérer l'esprit italien de la maîtrise des Arabes au moins autant que de la maîtrise des gothiques et des scolastiques. Sans doute, on n'ignorait pas que la résurrection de la pensée et des lettres antiques en Italie ne s'était accomplie qu'au prix d'une lutte acharnée contre l'averroïsme; lutte où Pétrarque intervint avec véhémence, que poursuivirent, au xve siècle, les platoniciens de Florence comme les aristotéliciens érudits de Venise, et qui, d'ailleurs, n'était pas terminée au XVIe siècle, puisque l'averroïsme allait reconquérir, à l'école de Padoue, une autorité rajeunie. Mais on ne soupçonnait pas que l'Orient avait été, à Florence, créateur de poésie non moins que de science et de doctrine, et que le classicisme humaniste dut mener également le combat contre cette poésie. Là se trouvent sans doute les causes secrètes et profondes, et à coup sûr les plus avouables, de l'antipathie mal dissimulée de Pétrarque pour l'œuvre de Dante. Il entendait fonder un savoir et un art littéraire complètement libérés des gothiques, libérés des orientaux, et dont l'antiquité fût la seule institutrice. L'humanisme italien, pendant un siècle et demi, s'efforça de réaliser ce programme et, tant bien que mal, y réussit » (p. 102-103).*

Une précieuse tradition de travail critique avait été, il y a quelque vingt-cinq ans, établie dans le domaine des études d'histoire moderne par l'excellente Revue d'Histoire moderne et contemporaine créée par MM. P. Caron et G. Brière et à qui la guerre fut fatale. Groupant un personnel savant plus large, mais où se retrouvent les meilleurs d'entre les ouvriers de la première heure, la Revue d'Histoire Moderne (1er no février-mars 1926. Rieder édit.) reprend

le travail où l'a laissé sa devancière, et nous constatons avec plaisir, mais sans surprise, qu'une place plus que décente y sera faite aux études d'histoire religieuse. Dès ce premier no, le distingué professeur de l'Université de Strasbourg, M. L. Febvre inaugure une série de «< mises au point qui seront une des plus intéressantes caractéristiques de cette Revue, en examinant le progrès récent des études sur Luther (pp. 24-41). M. F. trace avec une pénétrante précision un dessin de la courbe suivie par les Lutherforschungen depuis leur réveil vers 1900 à la suite des découvertes de Ficker, et surtout de l'éclat causé par l'apparition du Luther und Luthertum, de Denifle.« OEuvre brutale, tendue, directe d'un ennemi passionné de Luther et de la Réforme qui, se donnant pour tel, menait contre le Réformateur une attaque sans merci. » Négligeant non sans raison, « l'œuvre des traducteurs, adaptateurs et liquidateurs de Denifle », M. F. applique son analyse aux « études où se marque la vive, la profonde réaction des luthériens à l'offensive brusquée de 1904 ». Ce sont d'abord les réponses en reflexe de Harnack ou de Seeberg, d'autres encore, illustres ou obscurs, qui entrent de la polémique puis, plus en dehors de l'émotion immédiate de la bataille, les solides contre-attaques de A. Jundt, O. Ritschl, F. Wernle, théologiens puis des historiens proprement dits, II. Boehmer, O. Scheel, le grand travail d'ensemble de Troeltsh sur la Réforme allemande, enfin les deux livres tout récents et à tous égards considérables de deux maîtres de l'école renaissante de Strasbourg MM. R. Will et H. Strohl. Ce labeur si varié et si dense donne-t-il toute satisfaction aux desidérata de l'histoire objective du lutheranisme? M. Febvre estime qu'on a bien travaillé, « mais qu'il reste du travail encore >: << que nous pénétrions plus avant que nos prédécesseurs dans les profondeurs intimes de l'âme religieuse de Luther, je le crois. Mais qu'on nous ait montré, dans une œuvre maîtresse qui résumerait tout l'ensemble formidable des recherches auxquelles la question luthérienne a donné lieu depuis 1900, quels furent les véritables, les vivants rapports de ce Luther intime avec le Luther public qui, poussé sur le devant de la scène de 1517 à 1520 par un enchaînement prodigieux d'événements, trouva devenir le protagoniste de vingt drames différents se jouant sur la même scène ; qu'on nous ait montré aussi, précisément, quels furent les rapports de ces deux Luthers avec le Luther que les contemporains perçurent et interprétèrent et que ses disciples traduisirent en le trahissant: cela, non. Pas encore. Et ce sont là, cependant, les problèmes historiques qu'il se faudrait poser. (p. 17)

Notre collaborateur M. Arnold Van Gennep donne, dans la Revue de l'Institut de Sociologie (t. 1, no 1, Juillet 1925; tir. à part, 33 p. et une carte) un intéressant chapitre nouveau de ses recherches

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