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Révision (Retrospect), en fin de son second tome (1), il s'est soucié de nous fournir un fil d'Ariadne. Le fil d'Ariadne était un produit.... minoen, du moins; et tout historien pensera que pour l'histoire de Zeus en Grèce, il n'eût pas mauvais, aussi, de nous faire commencer par la Crète, puisqu'elle est, chronologiquement, à la préface. Or, on découvrira avec surprise, que la Crète intervient surtout, au t. II. vers la page 505! La labyrinthe de M. A. B. Cook a quelques détours inquiétants. C'est noter que le meilleur de ma tâche peut être d'indiquer ici comment on s'y orientera, si l'on désire en sortir.

Zeus « le Brillant » n'était, dit M. A. B. Cook, à l'origine, que la lumière du jour le ciel, conçu d'une manière vivante, « zoïstique »; conception dont les traces pourraient être discernées, çà et là encore, dans la période classique. Mais, dès avant l'époque homérique, et à partir d'alors, en tout cas, le ciel divin s'était transformé en un être animé, législateur réglant le temps, qui habitait dans la gloire de l'éther ce fut le chef, plus ou moins reconnu, du panthéon classique. M. A. B. Cook exagère peut-être le succès obtenu par la pensée grecque dans l'effort qu'elle fit pour hiérarchiser le ciel, les dissensions de l'Olympe ayant répondu assez, et toujours, au particularisme des cités terrestres. A l'époque hellénistique, le Zeus des jours clairs devait être mis en rapport avec d'autres manifestations de l'éclat céleste, soleil, lune, et étoiles.

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(1) P. 840 sqq. Déjà, un compte-rendu anglais de la première partie, dans la Westminster Gazette, relevait avec humour l'abondance, un peu déconcertante, de l'information : « There is a lifetime's meat and drink for the classical archaeologist ». Cf. aussi Journ. hellen. Studies, XXXV, 1915, p. 149 « Various reviews of this work have already appeared, and in more than one we seem to have met with the remark that one cannot see Mr. Cook's wood for his trees ».

La thèse ainsi exposée en 1914 appelait un complément, dont le vers des Nous suggère déjà la nature. Zeus, dieu du ciel qui n'est pas toujours brillant, même en Grèce, devint naturellement expression générale du temps les changements atmosphériques soudains étant comme un signe angural (diosemia). Dans l'orage, quand tout était sombre, on voyait Zeus déchirer les cieux; parfois, il avait coutume, croyait-on, de descendre en Keraunos, sous la forme de l'éclair aveuglant. Ce second aspect fut-il aussi antérieur à Homère? Sans nul doute. P. 505 et suivantes de son étude nouvelle, M. A. B. Cook s'est avisé qu'on pouvait se référer là même à de plus anciennes conceptions, et il a été ramené ainsi vers l'Égéide, par où il eût fallu logiquement, je l'ai dit, commencer. - D'abord (1), dans une étude sur l'éclair arme de Zeus (avant la hache, l'épieu, l'épée), le savant de Cambridge note que les astrapopelekia, les astropelekia des néolithiques, <«<haches-éclairs », selon les Grecs eux-mêmes, - précédèrent, et peuvent bien justifier le rôle étendu de la double-hache à l'époque minoenne, ou post-minoenne. Un anneau d'or de Mycènes montrera ce symbole sacré descendant du ciel. Une nouvelle explication du sarcophage d'Haghia Triada, si elle était acceptée (2), prouverait maintenant l'utilisation de la double-hache, à l'habitude, dans le culte crétois des arbres, des plantes. L'arme du dieu du ciel était, d'ailleurs, commune à travers l'ile; on la voit fichée sur les colonnes de stalactites de l'antre du Dikté, dans les piliers d'une chapelle à Cnossos;

(1) Je dois passer ici.... 500 pages, sur lesquelles nous reviendrons en temps voulu.

(2) P. 516 sqq. : M. A. B. Cook ne voit guère sur le sarcophage que rites agraires, et éléments mystiques « pré-dionysiaques ». Il y aurait bien à reprendre sur le détail de son interprétation, notamment pour les petits côtés, et pour le « mort » (?) figuré dans l'une des scènes de sacrifice, voire pour le rapport cherché avec le mythe de la réviviscence de Zeus en Dionysos-Zagreus. L'exégèse la plus traditionnelle, du moins, devra être révisée; cf. aussi, R. Vallois, Rev. Et. anc., XXVIII, 1926, p. 121 sqq.

elle accompagna fréquemment la tête de taureau. Etait-elle plus spécialement attribut de la divinité mâle ? M. A. B. Cook le pense (p. 601), et l'on doit lui donner raison, même après la publication de certaine cornaline nouvelle, de Mycènes, qu'il n'a mentionnée que dans les Addenda de son étude (1): car la déesse crétoise ne fut sans doute, à son tour, portehache, que par emprunt à son principal parèdre. Mais il est établi que nous n'avons guère de représentations de ce dieu, avant 1400. L'intaille inédite que le nouveau livre anglais fait connaître (p. 544, fig. 419), si elle est authentique, pourrait elle-même représenter plutôt un génie ptérophore. Qui ne sait que nous ne connaissons, dans la Crète minoenne, que des divinités aptères? S. A. Evans, maître des études crétoises, a récemment développé les ingénieuses raisons qui l'inclinent à considérer désormais le motif des ailes divines, dans l'art grec postérieur, comme né tardivement de l'interprétation fautive d'un double noeud sacré (2).

M. A. B. Cook n'hésite pas à identifier du moins le « dieu (?) » de la double-hache, avec Cronos, cruel époux de Rhéa, et il conjecture ici que les Grecs, interprétant son nom et son symbole, l'appelèrent plus tard le « pourfendeur ». Le Cronos homérique (żyxuλopritus (3) : « à la lame courbe? ») aurait passé sa harpé au Saturne italique. Il faudrait comparer par ailleurs la représentation asiatique d'un dieu hittite, au corps en forme de poignard, sur un rocher de Iasily-Kaïa. Mais tout cela n'est déjà plus guère que conjecture, et les comparaisons, de plus en plus larges, qu'a présentées ensuite l'auteur, avec les monnaies de Mallos et Byblos, avec celles d'Aké ou de Ptolémaïs, n'ajou

(1) P. 1221 (fig. 1014). La hache de Mallia citée ensuite, et là même (renvoi à p. 632, n. 6), est décorée d'une protomé de panthère, comme il résulte des <«taches » représentées géométriquement sur la robe de l'animal.

(2) Journ, hellen. Studies, XLV, 1925, 1, p. 1-75 (cf. p. 25).

(3) M. A. B. Cook traduit en effet : « à la lame courbe » (p. 519, n. 8), ce qui est fort hasardeux : plutôt μs, pensée ?

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tent rien, au contraire, au caractère, peu contraignant, de la principale démonstration. Revenons à la Crète : à l'âge de fer, le Cronos minoen peut avoir cédé sa place (1) au Zeus hellénique, autre dieu de l'orage, et de tendances semblables, dont la double-hache fut, elle-même, attribut à travers le monde ancien. M. A. B. Cook ne paraît pas s'être douté de l'appoint qu'eût ici donné à sa théorie un document grec bien connu, dont, semble-t-il, il n'a parlé nulle part. Dans le fronton le mieux conservé du temple d'Artémis, à Palaeopolis (Corfou), on voit une Gigantomachie où participe la Gorgone, figure centrale, dominant même les dieux. Zeus est aussi là, mais sur le côté, comme un parèdre encore un peu inférieur de la Déesse-mère, que Méduse symbolisa plus ou moins. Or, le Zeus de ce fronton de Corfou, occupé à terrasser un géant, reste imberbe, ainsi que le iç de l'Ida, voire l'adolescent des monnaies de Praesos; et le foudre qu'il brandit, si curieux, avait précisément gardé un aspect fort caractérisé de labrys (2). Rien ne se perdait là du passé minoen; par ailleurs, on nous signale justement (3) qu'à Tarente, des « traits du ciel » en fer forgé, traditionnellement liés au souvenir des premiers occupants crétois à travers la région des Iapyges, furent repris précisément par un Zeus Kataibatès hellénique (4).

(1) En fait, notons-le ici, nous n'avons nulle trace de Cronos, semble-t-il, en Crète, mais déjà d'une préfiguration de Zeus lui-même, comme parèdre de la Terre-Mère: ce fut ce Krétagénès, dont la « vie » se localisait entre l'lda, le Dicté et le Jouktas; cf. tout ce qu'ajoute l'énorme Appendix B de Cook, à propos de « The Mountain-cults of Zeus », p 868 sqq.

(2) Cf. Ch. Picard et Ch. Avezou, Rev, archéol., 1911, II, p. 1-19 (cf. p. 5, n. 5).

(3) A. B. Cook, p. 559.

(4) M. A. B. Cook, pour l'étude qu'il a faite sur la diffusion du culte du Zeus Kataibatès, ignorait malheureusement le document qui atteste, à Thasos, la présence de ce dieu (Bull, corr. hellén., XLVII, 1923, p. 537; cf. n. 3, ibid.; pour Zeus Boulaios, à Thasos, également inconnu de M. A. B. Cook, ef. C. R. Ac. Inser., 1914, p. 288). P. 21-22, il n'est pas fait mention des abata de Délos et de leur rôle.

qui

les sutures

Du côté de l'Orient, selon la méthode historique, eût pu être ici partout suivie sans dommage, apparaissent assez clairement, entre le dieu du ciel, armé de la double hache, et certaines divinités « asianiques », au second millénaire déjà. La hache des Amazones était, comme on le pense bien, d'origine hittite: elle est portée déjà par le jeune dieu (du ciel?) dans la Procession d'Iasily-Kaïa, à Boghaz-Keuï, et par son successeur, l'Héraklès-Sandas, à Tarse. Nous pouvons nous fier ainsi, en général, à la tradition de Plutarque, qui montrait l'arme sacrée appartenant tour à tour aux Amazones, puis aux princes cariens et lydiens. C'est à bon droit qu'elle fut un jour replacée par Arselis de Mylasa dans la main de Zeus Labra(n)deus. Sur des monnaies de Thyateira, et de plusieurs villes lydiennes, la labrys a passé aussi au héros local -- Tyrimnos, ou autre : tous héros qui, à l'époque gréco-romaine, tendirent, selon le syncrétisme général, à s'identifier avec Apollon et Hélios, dieux du ciel eux-mêmes. La Phrygie aussi a connu, en connexion avec les mêmes idées, un demi-dieu porteur de hache (Lairbenos, Lairmenos). Nulle part, en tous cas, le rapport avec Zeus n'aurait été plus apparent qu'en Carie, où nous connaissons, par des monnaies (1), des reliefs, le type cultuel de Zeus Stratios ou Labrandenos, soulevant la double hache à son épaule (2). Mais M. A. B. Cook a tort d'ajouter encore pleine créance aux anciennes explications sur les mamelles multiples de ce dieu; il ne s'agit pas, certes, d'un « hybridé ». Comme à Ephèse, pour l'Artémis polymaste,

((

(1) Hécatomnos, au début du Ive s. av. J.-C.

(2) Les Mylasiens, tout près de leur cité, avaient un autre sanctuaire, celui de Zeus Osogòa, dont les attributs (aigle, trident, crabe) suggérèrent l'épithète de Zénoposeidon. M. A. B. Cook exprime à cette occasion l'idée, fort vraisemblable, que le Poseidon des Grecs a dù être à l'origine une forme spécialisée de Zeus; son nom Potei-dan aurait désigné alors « le Seigneur » Zeus ef. Potnia Héra, la Dame Héra. Les cultes de Mylasa doivent être étudiés à nouveau par M. A. W. Persson; cf. déjà, Bull, corr. hellén., XLVI, 1922, p. 394 sqq.

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