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de se faire amener pour la nuit la fille du roi d'Angleterre; comme elle refusait de l'épouser, il l'obligea à passer la nuit dans un coin de la chambre; le matin, elle fut ramenée chez elle par le serviteur de la chandelle. — Elle raconta son histoire à son père, qui consulta une fée; la fée eut l'idée qu'on devait donner à la princesse un sac de son, qu'elle devait laisser tomber dans la maison où elle avait été transportée. Le serviteur déjoua la ruse en répandant du son partout. Une seconde fois, la fée conseille au roi de donner à la princesse une vessie pleine de sang : elle devait la percer dans la maison où elle aurait été transportée. Mais le serviteur pénétra dans les écuries du roi, tua les chevaux et les boeufs, et répandit le sang de tous les côtés. La troisième fois, le roi mit des gardes près de la princesse ; « l'homme de fer » se déclara impuissant; La Ramée y alla cependant, fut pris, condamné à mort. Il trouva moyen de se faire apporter la chandelle, sortit de prison, grâce à « l'homme de déclara la guerre au roi, etc. (la fin du conte est altérée).

fer ",

Le conte breton, noté par F. Luzel', a la plus grande analogie avec le conte lorrain.

Ici également, le héros est un soldat, qui s'enfuit après avoir tué son capitaine; lui aussi demande l'hospitalité à une vieille femme, qui est sorcière, et qui l'envoie « à un vieux château », d'où il doit rapporter un flambeau. Iann (c'est le nom du héros) entreprend l'expédition la cour du château, qu'il traverse, est remplie de bêtes. venimeuses; la première salle est pleine de pièces d'argent et lann en remplit ses poches; il fait de même dans la deuxième salle, pleine de pièces d'or; dans la troisième salle, il trouve un lomme de fer, tenant un flambeau, qui brûle d'une lumière bleue. Iann l'enlève, l'éteint et part. Dans sa håte, il le met dans la doublure de sa veste et croit plus tard l'avoir perdu, ce qui amène une querelle, entre lui et la sorcière, quand celle-ci réclame le flambeau; [mais il ne la tue pas]. La suite ressemble de nouveau singulièrement au conte lorrain lann, lui aussi, arrive en Angleterre, à Londres, y

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1) Contes popul, de la Basse Bretagne, III, 77 et suiv.

2) Dans ce conte, le sorcier dit d'avance que le flambeau « donne ce qu'on désire ». Cette révélation vient certainement trop tôt; c'est une erreur propie à cette version.

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mène joyeuse vie, grâce au flambeau, devient amoureux de la princesse et la fait apporter chez lui par l'Homme de fer ». Mais ici il y a une variante des plus remarquables : dans les versions précédentes, le héros humiliait la princesse, mais ses relations avec elle restaient innocentes; il en est autrement dans le conte breton : elle devient enceinte et c'est la découverte de son état qui donne l'idée de rechercher l'homme qui l'a fait amener chez lui. Ici encore, le roi, père de la princesse, agit d'après les conseils d'une vieille sorcière, qui imagine d'abord l'expédient d'un sac troué, rempli de farine (l'Homme de fer riposte en répandant de la farine partout), puis celui d'une boule rouge enchantée, qui doit marquer la porte de la maison. lann est arrêté après cette seconde épreuve et condamné à mort; suit la scène de l'échafaud sur l'ordre de lann, le roi et les personnes présentes s'enfoncent jusqu'au cou dans la terre et lann. menace de leur couper le cou si on ne lui donne pas la princesse en mariage (Pour la suite du récit, voir l'Appendice III).

Le conte danois d'Andersen', malgré des traces évidentes de rédaction littéraire, doit être la reproduction d'un conte populaire authentique; il ne dérive certainement pas du récit des frères Grimm.

On y retrouve le soldat et la vieille sorcière qui envoie chercher <«< un briquet; » le soldat, sur les indications de la sorcière, doit descendre dans un arbre creux; au fond de l'arbre est un corridor bien éclairé ; il y a trois portes, donnant sur trois chambres; dans chaque chambre, il y a une caisse, surveillée par un énorme chien ; la sorcière indique au soldat le moyen d'apprivoiser le chien, après quoi, il peut puiser dans les caisses; il trouvera dans la première chambre de la monnaie de cuivre; dans la seconde, de la monnaie d'argent; dans la troisième, de la monnaie d'or. Le soldat trouve le briquet, mais, de retour, il a une querelle avec la sorcière; il la tue. Il va à la ville et y dépense tout l'argent qu'il a puisé dans les caisses. Redevenu pauvre, il a pour la première fois l'idée de se servir du briquet : quand il le frappe une fois, c'est le chien de la

1) Contes, trad. Soldi, 2 édition, Paris, Hachette, 1862, p. 27 et suiv., le Briquet.

monnaie de cuivre qui paraît; deux fois, c'est celui de la monnaie d'argent; trois fois, c'est celui de la monnaie d'or. Il se fait apporter par un des chiens la fille du roi; la seconde fois, une des dames d'honneur court après la princesse et marque à la craie la porte de la maison où le chien est entré; mais le chien marque toutes les portes des maisons. Lors du troisième enlèvement, la reine attache au dos de sa fille une petite poche, remplie de grains de sarrazin, à laquelle elle fait un trou; on découvre la maison par les grains. répandus dans les rues. Le soldat est ainsi découvert et condamné à être pendu. La façon dont il rentre en possession de son briquet rappelle les contes déjà cités; quand le héros bat le briquet, les trois chiens arrivent, tuent les juges, le roi et la reine. Le soldat devient roi.

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Ce que ce conte a de particulier — outre le trait remarquable de la sorcière tuée, qu'on retrouve dans le conte lorrain sont les trois énormes chiens, remplaçant « l'homme de fer »> ou « le petit homme » des contes précédents. Cette conception singulière pourrait bien être le résultat d'une simple confusion. On se rappelle, dans le conte lorrain, cette multitude de bêtes serpents, dragons, ours, léopards qui se trouvent dans le château et semblent avoir pour mission d'en garder les trésors; on les retrouve dans le conte breton, sous forme de « bêtes venimeuses ». Il est probable que les chiens du récit. danois sont également un souvenir des animaux féroces du conte lorrain: les animaux gardiens ont finalement pris la place et le rôle de « serviteur » de l'objet lumineux'.

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Notons encore que, dans le conte danois, comme dans les récits allemands, le talisman cherché semble se trouver dans un souterrain.

Nous avons jusqu'ici trouvé notre conte chez des populations de langue germanique, romane et celtique. Le recit doit avoir pénétré également dans le monde slave, bien que je ne

1) Ces animaux gardiens pourrait bien être un emprunt à des contes d'un autre type; mais le fait qu'on les retrouve à la fois en Lorraine, en Bretagne et au Danemark indique que cet emprunt a dû être assez ancien.

sois pas en état de citer des versions complètes, non contaminées du récit; mais le « briquet » se retrouve dans des récits russes', combiné avec des données d'origine différente. Bien plus loin, vers l'Est, nous retrouvons notre récit dans un conte des Tatares de la Sibérie qui est, comme nous le verrons, pour la majeure partie, un emprunt à une version littéraire, mais qui contient de plus une donnée qui doit provenir d'une version orale.

Je n'ai pas trouvé de version populaire du conte de la Lampe, recueillie en Syrie ou en Egypte, là où fut composé, selon toute vraisemblance, le conte d'Aladdin; mais il y a une version curieuse chez un peuple d'Europe qui a profondément subi l'influence de l'Islam, à savoir les Albanais'; en voici le résumé :

Un jeune homme ruiné achète un coffre, qu'offre en vente un juif, qui passe dans la rue. Il eu sort un petit nègre, avec une longue pipe, qui lui demande : « Veux-tu que je t'en apporte encore? » «Non, je n'en ai pas besoin » — Un jour qu'il était assis dans le jardin, le nègre lui demanda : « Veux-tu que je t'apporte ce soir la fille du roi? » « Avec plaisir ». Le soir, le nègre apporte la princesse, et la rapporte le lendemain matin au palais. Ce manège dure quelque temps: la princesse devient enceinte. Son père lui recommande d'enduire sa main de couleur et de marquer la porte de la maison; le nègre marque ainsi toutes les maisons de la ville. Le roi ordonne ensuite à sa fille de verser sur son amant un verre

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1) Conte chez Afanasiev, no 136 (t. II, p. 118, éd. de Moscou, 1897): un briquet qui, quand on frappe, fait paraître deux individus qui exécutent les ordres qu'on leur donne; ils figurent dans un récit apparenté au no 15 des Griechische und alban. Märchen de von Hahn; conte noté par Romanov, analysé par Aarne, o. c., p. 31; la suite est le conte de l'Anneau (forme populaire), puis le conte des objets magiques. Un troisième conte, noté par Kkoudiakov, où il est question d'un homme qui fait descendre un jeune homme dans un souterrain (Aarne, p. 29) pourrait être un souvenir du conte littéraire d'Aladdin.

2) Nous verrons plus loin qu'un orientaliste désigne l'Egypte comme le pays où le conte littéraire d'Aladdin a été composé.

3) Dozon, Contes albanais, Paris, 1881, in-18, p. 77 et suiv.: le Coffre mérveilleux.

d'eau-de-vie; le lendemain, on proclame que tout le monde sera admis gratuitement aux bains publics; le jeune homme y va, est reconnu à l'odeur d'eau-de-vie qu'exhalent ses habits, arrêté et 'condamné à mort. Le nègre apprend ce qui se passe; il se rend sur les lieux et s'arrache un poil de la barbe; ce poil se change aussitôt en un firman, qui ordonne au colonel qui commande de ne pas pendre le jeune homme, mais les gens qui l'accompagnent; le colonel se conforme à cet ordre. Le roi veut se débarrasser du nègre en l'envoyant combattre des sauvages; mais le nègre revient victorieux et le roi finit par donner sa fille en mariage au jeune homme.

Ici le talisman lumineux, lampe, briquet, etc., a disparu, bien que la pipe en semble un vague souvenir; le sorcier qui envoie chercher le briquet dans un souterrain ou château merveilleux manque également; mais on retrouve l'aventure de la princesse, qui devient enceinte, comme dans le conte breton; l'épisode final, enfin, celui de l'exécution du héros. se présente déformé; mais il s'éclaircit quand on compare une forme littéraire du récit qui, ainsi qu'on le verra, est relativement ancienne et qui, par son origine, nous transporte de nouveau en Syrie ou en Égypte.

Dans quelques manuscrits des Mille et une Nuits on trouve, sous des formes diverses, un conte, dont voici l'aspect le plus simple':

Un magicien arrive à Bagdad et y voit un jeune restaurateur beau et élégant, mais d'un aspect maladif; interrogé, le jeune homme déclare qu'il meurt d'amour pour la fille du calife, qu'il a vue un jour qu'elle se rendait au bain. Le magicien se déclare prêt à l'aider dans ses amours, et lui enseigne une conjuration, qui a pour effet que la princesse est transportée, chaque nuit, dans son lit, vers la demeure du restaurateur. La jeune fille se trouvant finalement enceinte, le calife l'interroge et est mis au courant de son aventure.

1) Mille et une Nuits, trad, anglaise de Burton, édit. 1894, XII, 82 et suiv.; Th. Nöldeke, Das arabische Märchen vom Doctor und Garkoch, dans Abhandungen de l'Académie de Berlin, année 1891.

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