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plus énorme encore, des cultes révolutionnaires. Or, pour l'érudit auteur du beau livre sur les Theophilanthropes, les hommes de la Révolution, en bons élèves des philosophes, ont essayé d'abord de nationaliser le catholicisme, de le mettre au service de l'ordre nouveau. Cette tentative, c'est la Constitution civile du clergé, à laquelle devaient applaudir Montesquieu, Voltaire, tous les encyclopédistes. Mais cette Constitution civile, qui faillit réussir, échoua pour des raisons diverses. Les révolutionnaires s'obstinent deux ans à la faire vivre et triompher. Leur déception se change en colère lorsque l'insuccès devient patent. Ils décrètent la ruine de leur propre création, enlèvent tout caractère officiel au clergé Constitutionnel; mais en abattant le catholicisme, les révolutionnaires ne renoncent pas à leur rêve d'unité morale et religieuse. Leur mentalité ne devient pas laïque. Elle dresse de nouvelles constructions cultuelles : culte de la Raison, culte de l'Etre suprême, culte décadaire, toutes formes de l'État culte et religion. La raison de ce double aspect négatif et positif de la politique religieuse révolutionnaire qui est aussi le double aspect de la politique religieuse des philosophes, M. Mathiez la donne en conclusion de son article: << Philosophes et révolutionnaires ont été élevés par des prètres, les seuls éducateurs d'alors, ne l'oublions pas; leur formation est double, chrétienne et classique, catholique et antique... Ils ont construit leur cité future avec les éléments de la cité présente. Convaincus que la réforme politique et sociale ne pouvait se suffire à elle-mème, ils voulurent la compléter par une réforme morale et religieuse correspondante. En un mot ils eurent la passion de l'unité, passion romaine et catholique ».

-Notre collaborateur M, Hertz a donné à la Revue Philosophique (no de décembre 1909) une importante étude de sociologie religieuse sur la Prééminence de la main droite. M. H. relève les caractères très nets d'une institution sociale dans la différence de valeur et de fonction qui existe entre les deux côtés de notre corps. C'est dans l'étude comparée des représentations collectives qu'il recherche l'explication du privilège dont jouit la main droite. La pensée primitive présente une structure dualiste, une antithèse fondamentale entre le sacré et le profane. La société, l'univers entier sont commandés par cette polarité essentielle : « Dans le principe sacré résident les pouvoirs qui conservent et accroissent la vie, qui donnent la santé, la prééminence sociale, le courage à la guerre et l'excellence au travail. Au contraire, le profane (en tant qu'il fait incursion dans le monde sacré), l'impur sont essentiellement débilitants et léthifères; c'est de ce côté que viennent les influences funestes qui oppriment, amoindrissent, gâtent les êtres. Ainsi, d'une part, le pôle de la force, du bien, de la vie; d'autre part, le pôle de la faiblesse, du mal, de la mort ». La différenciation obligatoire des côtés du corps est un cas particulier et une conséquence de cette polarité. M. Hertz analyse les caractères et les fonctions attribués à la main droite et à la main gauche. Le contraste apparaît déjà dans les mots qui, dans les langues indoeuropéennes, désignent les deux côtés; même opposition sémantique et morale!

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la droite est le côté sacré, le côté de la vie et de la force, la gauche le côté profane, de la mort et de la faiblesse, la droite le haut, le monde supérieur; la gauche le bas, le monde inférieur; la droite est le dedans de la communauté, la gauche le dehors, etc. Les fonctions des deux mains sont au moins aussi nettement opposées chez les primitifs dont la langue est une pure mimique, la main droite sert à exprimer l'idée de moi, de haut, de bravoure, de puissance, de virilité; la gauche désigne le non-moi, les centres, la mort la destruction, l'enterrement. Dans les liturgies primitives ou évoluées, le côté droit est tout privilégié il prie, il bénit, il consacre, il présente l'oblation. La main gauche contient et apaise les êtres surnaturels méchants ou irrités, bannit et détruit les influences mauvaises. La main gauche est toute désignée pour les contacts sinistres. Dans les pratiques que comporte la vie en société, la main droite conclut le mariage, prête serment, contracte, prend possession, porte assistance; elle commande, elle affirme la force et l'emprise sur les choses. La gauche est clandestine, elle est la main du parjure, de la trahison, de la fraude. M. Hertz poursuit ce parallèle dans toutes les manifestations de la vie collective, arts, industrie, guerre, rites de métier. Nulle part la gauche ne doit empiéter sur la droite, pas plus que le profane ne peut se mêler au sacré.

En conclusion à cette rigoureuse enquête, M. Hertz se refuse à nier dogmatiquement l'action du facteur physique dans cette différenciation qualitative entre les deux mains; mais il estime que « pendant de longs siècles la paralysie systématique du bras gauche a exprimé, comme d'autres mutilations, la volonté qui animait l'homme de faire prédominer le sacré sur le profane, de sacrifier aux exigences senties par la conscience collective les désirs et l'intérêt de l'individu et de spiritualiser le corps lui-même en y inscrivant les oppositions de valeurs et les contrastes violents du monde moral ».

On se souvient de l'article que publia ici M. Antoine Cabaton sur la légende de Raden Pakou (Revue, 1906, II, no 3). A propos de cette légende historique musulmane de Java, M. Emmanuel Cosquin publiait quelques mois après, dans la Revue des Questions historiques (avril 1908) une étude sur tout un groupe de légendes, contes et mythes, dont ressortissait l'histoire de Raden Pakou, où la vertu merveilleuse du lait de la mère et l'épisode du coffre flottant occupent une place de premier plan. M. E. Cosquin n'acceptait pas au nombre des variétés du même thème l'histoire de Moïse enfant. Aujourd'hui notre collaborateur M. Israël Lévi reprend cette question de ressemblance folklorique dans une étude publiée par la Revue des Études Juives (1or janvier 1910). Le savant hebraisant estime, avec M. Cosquin, que le récit de l'Exode ne contient pas les traits essentiels du thème de la légende indienne; mais ces éléments, il les montre fournis «< par la littérature juive qui, partant de Josèphe, s'étend sur tout le Midrasch et pousse ses ramifications dans le folk-lore littéraire judéo-arabe ». M. I. Lévi suit pas à pas l'histoire de Moïse enfant dans le Midrasch et dans la littérature musulmane et, comme com

plément irréfutable de preuves de cette parenté entre la légende post-biblique de Moïse et celle de Raden Pakou, il fait ressortir la présence des mêmes éléments thématiques dans la légende midraschique d'Abraham-enfant, qui n'est qu'un doublet de celle de Moïse. Une autre variété du conte javanais conservée dans la littérature juive, est fournie par la légende de Josué bin Noun, que M. N. Slouschz a rencontrée dans le Rab Pealim d'Abraham fils d'Elia, Gaon de Wilna. Cette forme est d'ailleurs tout à fait indépendante de l'histoire de Moïse-Abraham enfant, mais s'apparente étroitement à un autre conte publié par M. Cosquin, celui de Judas, avec, dans la version hébraïque, une mise en valeur plus évidente du trait primitif.

- L'Asiatic quarterly Review publie à des intervalles assez rapprochés de courts et très substantiels « reports » où notre collaborateur M. Ed. Montet annonce et juge en notes précises la production scientifique dans le domaine des études orientales. M. Montet insiste particulièrement, dans les deux plus récents de ces bulletins (juillet 1909, janvier 1910) sur quelques travaux qui ont marqué dans la littérature sémitisante ou arabisante: les Études bibliques (Ancien Testament), de M. Bruston; le beau livre de E. Doutté sur la Magie et la Religion dans l'Afrique du Nord, le recueil de textes berbères de Syed Bulifa, les Apocryphes de l'Ancien Testament, de L. Randon, la seconde édition de l'Histoire du Koran, de Th. Noeldeke, revue par F. Schwally, etc.

La Revue The Open Court vient de publier le dernier fascicule de son vingttroisième tome. De plus en plus, cette active revue s'applique à justifier par ses sommaires son sous-titre : elle se consacre à la science de la religion, à la religion de la science, à l'extension de l'idée du « Religious Parliament », idée quelque peu stationnaire depuis le mémorable meeting de Chicago. La tâche est vaste et la table de ce tome XXIII reflète l'espoir généreux et malheureusement aussi l'imprécision de la synthèse tentée par M. Paul Carus et ses collaborateurs. Nous y trouvons voisinant des articles d'occultisme (G. C. Bartlett, An Episode in the Life of a Medium; H. J. Burlingame, Reminiscences of a Famous Magician; etc.), des articles sur la personnalité religieuse et philosophique de Goethe, dûs surtout à M. P. Carus; des études sur le Darwinisme et son importance morale; les inévitables dissertations sur l'hypothèse retentissante de M. P. Haupt; Aryan Ancestry of Jesus; et aussi des articles d'histoire des religions proprement dite, conçue en toute objectivité: Fr. Cumont, Astrology and Magic; E. Montet, Israel and Babylonian Civilisation; P. E. Osgood, The Temple of Solomon; P. Carus, Buddha of Kamakura Healing by Conspiration in Ancient Babylon, Japan's Seven Jolly Gods, Lao-Tze, etc.

La revue Cultura Moderna, née en juillet 1903, morte en juillet 1906, vient de reparaître au début de janvier 1910 (Cultura moderna, rassegna mensile di studi scientifico-religiosi, Mendrisio (Suisse), et s'affirme par un numéro très

fourni et d'excellente matière: De Pia Cremonini, un article sur H.-C. Lea d'après une autobiographie toute récente communiquée à l'auteur de cette étude nécrologique; un essai sur le problème religieux, par Harald Hoffding; un compte rendu critique sur le livre de L. H. Jordan et B. Labanca, The Study of Religion in the italian Universities et des Notes fugitives sur le mouvement des idées en Italie par le directeur de la Revue, le Prof. Domenico Ballaini. La Cultura Moderna ne'cache pas ses sympathies pour certaines des idées que soutenaient la Cultura Sociale et la Rivista di Cultura, de R. Murri, les Study Religiosi et la Vita Religiosa de S. Minocchi, mais la revue tessinoise se defend de servir une école confessionnelle quelconque et se propose un but uniquement scientifique.

- La Zeitschrift für Missionskunde und Religionswissenschaft, organe de l'Union allemande des missions protestantes évangéliques (Evangelischer Verlag Heidelberg, 1909) a publié dans ses douze fascicules de 1909 un certain nombre de notules intéressantes sur des faits religieux observés en Extrême-Orient par des missionnaires. La description en est en général un peu hâtive mais l'observation directe rend utiles ces «< rapports communiqués aux adhérents de la vaste union pastorale. - Citons: Die Bedeutung des Konfuzius, par M. Rich. Wilhelm; Die Lage des Christentums in Japan im Herbste 1908, par. M. Emil Schiller; Japanisches, par M. Hering Volksgebäuche zur Zeit der Dürre in Hinterland von Kiantschou, par M. W. Schüler; Gogaku no Kumo, par E. Schiller; Aus einem taoistischen Kloster, par M. W. Schüler, etc. En outre, la Zeitschrift f. Missionskunde und Religionswissenschaft donne de nombreux comptes rendus des ouvrages intéressant les religions de l'ExtrêmeOrient.

-L'Excellente Revue des Études ethnographiques et sociologiques fondée et dirigée par notre collaborateur M. A. Van Gennep en 1907 est éditée depuis janvier dernier, sous la même direction et dans le même format 8° jésus par la maison Ernest Leroux, 28, rue Bonaparte. La Revue portera désormais le nom de Revue d'Ethnographie et de Sociologie. Elle est internationale; elle est assurée du concours d'ethnographes et de sociologues européens et américains des plus notables en même temps que de la collaboration active de nombreux fonctionnaires coloniaux et explorateurs.

Enfin nous apprenons, par l'intermédiaire de la Revue historique, la très prochaine apparition à la librairie Letouzey et Ané (Paris), d'une nouvelle revue historique, la Revue d'histoire de l'Eglise de France dont la direction est confiée à M. l'abbé Vogt, professeur à l'Université de Fribourg (Suisse). Cette Revue servirait à préparer une refonte complète de la Gallia Christiana. Elle publiera des articles originaux et des documents relatifs à l'histoire ecclésiastique de la France depuis le moyen âge jusqu'à nos jours, une revue critique des livres et

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un résumé des principaux travaux parus dans les autres recueils périodiques. Elle comprendra 6 livraisons annuelles de 112 pages 8o chacune. Prix de l'abonnement France 15 fr. ; étranger, 17 fr.

La Revue d'histoire et de littérature religieuse, qui avait cessé de paraître à la fin de l'année 1907, vient de reprendre sa publication chez l'éditeur Nourry et sous la direction de M. A. Loisy, professeur d'histoire des Religions au Collège de France, par fascicules de six feuilles tous les deux mois. Abonnement 10 francs pour la France et 12 fr. 50 pour l'étranger. Nous avons reçu le no 1 (Janvier-Février 1910) qui contient les articles suivants : Alfred Loisy, La notion du sacrifice dans l'antiquité israëlite. Franz Cumont, La propagation du manichéisme dans l'empire romain. Charles Michel, Le culte d'Esculape dans la religion populaire de la Grèce ancienne. Chronique bibliographique. Faits et documents religieux contemporains.

En même temps, les Études rédigées par des Pères de la Société de Jésus inaugurent une publication nouvelle Recherches de Science religieuse, paraissant tous les deux mois en fascicules de six feuilles. Abonnement: 10 francs pour la France et 12 fr. pour l'étranger. Le programme stipule : « Des articles de fond, d'un caractère nettement scientifique, viseront à faire avancer, du moins en les précisant, les questions religieuses. » Sommaire du n° de janvierfévrier 1910 J. Lebreton, La foi au Seigneur Jésus dans l'Église naissante. H. Lammens, Qoran et Tradition. Comment fut composée la vie de Mahomet. Notes et Mélanges: A. Condamin, Le sens messianique de Zacharie, XII, 10. A. Durand, Le Christ « Premier- Né ». L. Jalabert, Notes d'épigraphie chrétienne. Martindale, Un miracle d'Apollonius de Tyane. Le Bachelet, Bellarmin sur la Bible de Sixte-Quint. F. Bouvier, Bulletin d'histoire comparée des Religions.

La chaire de Pfleiderer. La succession du Prof. O. Pfleiderer à Berlin est restée longtemps ouverte et l'on ne saurait dissimuler que des questions d'ordre extrascientifique n'ont pas été étrangères à la prolongation de cette vacance. On sait quelle signification philosophique et jusqu'à un certain point politique - avait la personnalité et l'enseignement d'Otto Pfleiderer. Il ne nous appartient pas de rechercher à quels mobiles ont obéi les « les autorités compétentes >> en préférant la candidature du Prof. Lehmann, de Copenhague, à celle du Prof. Tröltsch. Nous n'avons pas autorité pour décider si cette nomination représente, comme on l'a soutenu, un échec pour la théologie progressiste dans l'enseignement officiel.

P. A.

Le Gérant: ERNEST LEROUX.

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