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CHRONIQUE

FRANCE

La littérature religieuse d'avant-hier et d'aujourd'hui, par Henri Bremond, qui forme le no 397 des Études pour le temps présent intitulées << Science et Religion » et dont nous avons reçu la 6e édition (Paris, Bloud), est une esquisse destinée à servir d'introduction et de recommandation à la collection intitulée La Pensée chrétienne, publiée par le même éditeur. Il s'agit de mettre à la portée du public qui ne sait ni le grec, ni les langues étrangères modernes, ou bien qui recule devant la fatigue de lectures graves prolongées, des extraits des auteurs chrétiens du passé. « Notre ambition, est-il dit dans le programme rédigé par M. Albert Dufourcq, professeur à l'Université de Bordeaux, est de faire comparaître et d'appeler à rendre témoignage de ce qu'il a vu et aimé dans la doctrine du Christ, quiconque a voulu et su faire coexister dans sa conscience une foi et une pensée également ardentes. Nous estimons qu'un exposé purement descriptif de cette doctrine constitue la plus efficace des apologies. Des extraits traduits et reliés entre eux par de brèves analyses permettront au lecteur d'entendre chacun exposer lui-même la synthèse intégrale ou les théories particulières que lui a inspirées sa foi» (p. 62).

Les éditeurs ne cachent pas qu'il s'agit ici d'une œuvre d'apologétique. Libre à eux, et l'on accordera volontiers que certains des volumes publiés témoignent d'un effort sincère pour reporter le lecteur dans le cadre vraiment historique où vécurent et écrivirent les auteurs qu'on leur présente. Mais il est étrange que dans certains milieux on ne puisse pas arriver à se pénétrer de cette idée, pourtant bien simple, que les publications dont le but et la raison d'être sont apologétiques, perdent par cela même leur valeur historique pour tout esprit libre qui n'est pas en situation de contrôler par lui-même ce qu'elles lui apportent. Il est bien clair, en effet, que l'auteur de chacun de ces volumes n'est pas libre de mettre en évidence pour ses lecteurs tout ce qui ne cadre pas avec la doctrine ou l'institution dont il a pour mission de prendre la défense. Quand on parcourt la brochure de M. Henri Brémond on est frappé de la prodigieuse abondance des entreprises de ce genre qui existent dans notre littérature française moderne. Et quand on se demande ce que tout cela a produit, on est bien forcé de reconnaître que les résultats sont très minces, en dehors de toute proportion avec la grandeur de l'effort, La raison en est sans

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doute qu'une bien faible partie de ces nombreux écrits ont été inspirés par le souci désintéressé de la recherche historique pour elle-même. Si l'on met à part les Analecta Bollandiana, la Revue biblique et la Revue d'histoire et de littérature religieuse, dont tous les hommes compétents apprécient la haute valeur, quels sont les travaux des autres collections ou publications périodiques mentionnées par M. Henri Brémond, qui aient réellement fait avancer la connaissance de l'histoire religieuse? C'est qu'en réalité tel n'est pas le but véritable de la plupart des collaborateurs. Ils ne servent pas la cause de l'histoire, mais se servent de l'histoire pour défendre des doctrines ou des institutions, pour rendre témoignage à leur foi. Rien de plus légitime en soi et nous nous garderons bien de le leur reprocher. Mais il faut cependant relever le fait, ne fût-ce que pour expliquer pourquoi la part contributive des écrivains de langue française à l'histoire religieuse et spécialement à l'histoire du Christianisme, a été si restreinte dans les temps modernes après avoir été si brillante aux xvie et XVIIe siècles.

J. R.

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Périodiques. Nous avons, plusieurs fois déjà, signalé dans cette Chronique, la contribution précieuse et relativement considérable qu'apporte à l'Histoire des Religions la Revue des Études anciennes publiée par l'Université de Bordeaux cette remarque se trouve encore justifiée par le sommaire des fascicules déjà parus du tome VIII (1906). Dès le n° 1, nous notons un article de M. G. Gassies sur les Déesses-mères à propos d'un monument inédit découvert à Meaux. Le n° 2 renferme la suite de l'importante étude de M. de la Ville de Mirmont sur l'Astrologie chez les Gallo-Romains. Dans le n° 3, une note intéressante de M. Chauvet appelle l'attention sur la découverte de deux statuettes gallo-romaines à la Terne, commune de Luxé, arrondissement de Ruffec (Charente), station antique à environ 15 kilomètres du poste militaire romain de Germanicomagus. Ce sont deux personnages dont le premier est très probablement un Apollon; le culte de ce dieu était très en honneur en Gaule au début de la conquête et ne fit que croître sous le principat d'Auguste. La figure no 2 est particulièrement intéressante. Elle a de grandes analogies avec le dieu accroupi de l'autel de Reims; comme lui, le personnage ici représenté tient dans la main gauche un sac ou une bourse, qui laisse échapper des objets discoïdaux (probablement des monnaies) et la main droite de la divinité les recueille pour les distribuer sur le côté. « Nous avons là, dit M. Chauvet, une divinité distributrice de richesses, dont l'identification est difficile à établir, mais qui répond assez bien à l'idée que M. C. Jullian se fait des Gaulois après l'invasion: «< Ils avaient fini, dit-il, par préférer à leur Mars, ce détrousseur de grands chemins, le Mercure, ce bon gardien des routes, au dieu qui tue celui qui amasse.» (Vercingétorix p. 22). Notre personnage féminin n'est pas Mercure, mais il semble exprimer la même idée. »

Dans ce même no, une spirituelle notule de M. Jullian sur La chute du ciel sur les Gaulois. Cette chute, dit M. Jullian, et avec elle la fin du monde étaient, pour les Gaulois, annoncées par le grondement du tonnerre, l'éclat de la foudre, la grêle et la tempête, et si les Gaulois affirmèrent orgueilleusement à Alexandre qu'ils ne redoutaient que la chute du ciel, «< ils ne lui avouèrent pas qu'ils la redoutaient à la moindre occasion ».

Le Journal de Psychologie normale et pathologique (juillet-août 1906) rend compte en ces termes d'un récent ouvrage de M. Aug. Poulain sur les Grâces d'oraison, Traité de théologie mystique (Paris, Rétaux, 1906): « L'auteur s'est proposé de dissiper autant que possible les obscurités de la théologie mystique. Ancien professeur de mathématiques, il a donné à son exposition une forme quasi-géométrique, procédant par définitions très précises et propositions bien. accusées. Le tout est appuyé de citations longues et nombreuses. M. l'abbé Poulain s'adresse surtout aux directeurs de conscience; mais son livre servira aux psychologues. Ils y trouveront un tableau très net des idées et des interprétations des mystiques catholiques. En pareille matière, il est fort important. de se procurer des documents exacts. Certains auteurs ne s'en sont pas assez préoccupés. Dans son cours à la Sorbonne (1906), M. le Dr Bernard Leroy a consacré des leçons à relever de nombreuses inexactitudes dans les ouvrages bien connus de MM. Murisier et Godfernaux. Dans la Revue philosophique, M. de Montmorand a fait une constatation semblable pour M. Leuba. M. Darlu attirait aussi l'attention sur ce défaut, dans une séance récente de la Société française de Philosophie : « L'histoire du mysticisme, disait-il, est une partie notable de l'histoire des idées... Mais c'est à la condition d'être de l'histoire, de rapporter impartialement ce que disent les mystiques, ce qu'ils éprouvent ou croient éprouver. Au contraire la psychologie du mysticisme se substitue au mystique; elle analyse, elle prétend modifier les états inférieurs qu'il atteste, les classer dans tel ou tel de ses compartiments. Elle est courte, elle est superficielle, elle est exposée par les partis pris de sa méthode à déformer, voire à rabaisser ce qu'elle prétend expliquer. » M. Blondel se plaignit aussi de ce que parfois « la description des faits est altérée. » — V. le Bull. de la Soc. franç. de Philosophie, janvier 1906, chez Colin. Ce numéro est rempli uniquement par une discussion sur la marche des états extraordinaires dans sainte Thérèse. MM. E. Boutroux et Sorel exposèrent leur manière de comprendre la pensée des mystiques. C'est précisément cette manière que présente M. Poulain dans ce qu'il appelle les deux caractères fondamentaux.

M. Poulain distingue en effet avec soin deux sortes d'états d'âme que sainte Thérèse appelle surnaturels ceux qui mettent en rapport avec Dieu tout pur, et qu'on désigne sous le nom d'unions mystiques; puis les révélations ou visions. Avec beaucoup de franchise, il énumère les nombreuses illusions auxquelles ces révélations sont sujettes, même chez de très saints personnages; tandis que les unions mystiques ne poussant pas à des actions déterminées,

mais inspirant seulement la tendance à la générosité, sont inoffensives.

L'ouvrage se termine par des questions complémentaires qui sont intéressantes le quiétisme (avec documentation abondante), la terminologie des mystiques, les méthodes dans la mystique descriptive, etc., et finalement un index bibliographique de cent cinquante-quatre auteurs mystiques ».

L'Histoire des Religions à l'Académie des Inscriptions
et Belles-Lettres.

Séance du 25 mai 1906. M. Clermont-Ganneau communique à l'Académie, d'après un rapport qu'il a reçu du R. P. Lagrange, les résultats d'une exploration archéologique et géographique entreprise, en mars dernier, par une caravane de l'école des Dominicains de Jérusalem sous la direction des PP. Janssen et Savignac. Durant son séjour à Pétra, cette expédition a pu vérifier le texte de l'inscription nabatéenne Corp. Insc. Semit. II, 393 bis. La restitution conjecturale des éditeurs pour la dernière ligne se trouve pleinement confirmée : c'est bien «< devant (le dieu) Dusarès » qu'il faut lire.

M. Chavannes entretient l'Académie des recherches auxquelles il s'est livré avec M. Sylvain Lévi au sujet de trois fragments de manuscrit chinois actuellement en la possession de M. Rudolf Hornle, d'Oxford, et qui proviennent du Turkestan oriental. Ils appartenaient, concluent MM. Chavannes et Sylvain Lévi, à la version chinoise de l'ouvrage bouddhique intitulé « Prajnâpâramitâ ». La copie a dû en être exécutée entre le vie et le xe siècle après J.-C.

Séance du 1er juin. M. Cagnat, président, donne lecture d'une lettre de M. Alfred Merlin, directeur des antiquités et arts de Tunisie, relative aux fouilles de M. le capitaine Benet à Bulla Regia, M. Benet s'occupe de dégager un monument très voisin de l'endroit où M. Lafon a exhumé une tête colossale de l'empereur Vespasien et une base honorifique à Plautien. Dans ce monument M. Beneta découvert un certain nombre de statues, au nombre desquelles : une statue de femme, peut-être une Cérès; une petite statue, malheureusement acéphale, portant sur la poitrine une égide et la tête de la Gorgone; enfin, deux autres statues, l'une de Jupiter, portant encore quelques traces de peinture et l'autre de Minerve ailée. Ce monument semble avoir été public et ouvert sur le Forum. Les statues ont été transportées au camp de Souk-el-Aba d'où elles seront bientôt expédiées au musée du Bardo.

M. Ph. Lauer communique à l'Académie des photographies des reliquaires composant le trésor de la chapelle pontificale du Sancta Sanctorum au Latran. Ces objets dont plusieurs remontent aux iv°, v°, 1x et x° siècles, n'avaient été ni vus ni décrits depuis le moyen âge.

M. Paul Monceaux préseute les principaux résultats de ses travaux sur la

onatiste. Il a plus ou moins complètement reconstitué les ouvrages us, évêque donatiste de Constantine au temps de saint Augustin. ges présentent pour l'étude du donatisme un vif intérêt historique; êt psychologique et littéraire n'est pas moindre puisqu'ils nous font la personnalité de Pétilianus et nous renseignent sur le sens exact emiques d'Augustin.

ace du 8 juin. M. Pottier lit un mémoire de M. G. Radet, correspondant cadémie, où ce savant étudie le type de l'Artémis persique d'après une le de terre cuite qui a été retrouvée à Sardes et que le Louvre a récemit acquise. M. Radet montre que l'origine de ce type est nettement orientale, is que le nom d'Artémis persique est impropre et qu'il faudrait lui substier celui de la déesse lydienne Kybébé. P. A.

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Pendant le premier semestre de 1906 le Musée

Guimet a fait quelques acquisitions importantes.

1° Provenant des fouilles de M. Amélineau à Abydos un lot de coupes, vases, assiettes en marbres, granits, pierres dures, présentant une grande variété de formes et de matières; un lot de bouchons de jarre estampés; un lot de poteries, vases, jarres. Beaucoup de ces monuments portent des légendes aux noms des rois archaïques Ahâ (Menès), Qȧ, Perabsen, ou aux noms de fonctionnaires de ces pharaons. M. Amélineau a mis la plus grande complaisance à céder à M. Guimet ces objets à un prix bien au-dessous de leur valeur réelle, pour permettre la constitution au Musée Guimet d'une salle réservée aux monuments de l'époque archaïque égyptienne.

2° Provenant d'achats faits en Égypte par M. A. Moret, conservateur-adjoint du Musée, au cours d'une mission scientifique : une stèle de la XIX dynastie, trouvée au Fayoum, présentant une scène rare d'adoration à Sobkou-crocodile, coiffé du diadème solaire; une stèle datée de Nekao II concernant une donation de terrain à un Osiris; une stèle d'époque gréco-romaine où un Pharaon anonyme donne un terrain à un type curieux d'Osiris-Shou à forme de bélier; enfin différents fragments intéressants pour l'histoire du culte, parmi lesquels une porteuse d'offrandes provenant d'un mastaba de Gizeh (IVo dynastie) et présentant ses pots à fard dans une attitude guindée et assez originale.

3o Don de M. le Dr Valentino: 16 bas-reliefs en bois sculpté provenant d'un char sacré des environs de Pondichéry, représentant des divinités hindouistes et des motifs décoratifs (lions, éléphants, chevaux, etc.).

Don posthume du lieutenant Grillières: 32 pièces objets de culte en cuivre, bijoux en argent, turquoises, cauries, etc., provenant du Tibet oriental. Legs de M. Charles-Jean Demarçay 43 pièces statuettes religieuses, ustensiles du culte, bijoux provenant de l'Inde, de Sikhim et du Tibet.

A. M.

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