Slike strani
PDF
ePub

personnel consiste dans une connaissance étendue des données anthropologiques et dans les précisions d'un sémitisant averti.

Le premier volume cherche à établir que les anciens Israelites pratiquaient un culte des morts. Si l'on peut différer d'avis avec l'auteur sur certaines interprétations, nous croyons que sa conclusion générale s'imposera. Ce ne sera pas le moindre mérite de l'étude de M. L. d'avoir réagi contre la théorie de M. Grüneisen qui repousse l'idée d'un véritable culte des morts en Israël, surtout un culte des ancêtres. On sait que l'argumentation de ce savant, appuyée sur les plus récentes découvertes anthropologiques, a entraîné la conviction de la plupart de ceux qui ont abordé le sujet après lui.

En premier lieu, M. L. examine (p. 43-75) la notion de l'âme dans l'ancien Israël. La croyance au double est formellement établie : c'est le double de Samuel qui apparaît à la pythonisse d'Endor. Mais ce double qui quittait le corps à la mort de l'individu et mème temporairement dans les cas d'extase, etc., ce double était-il la nefech ou bien la rouah ? La question est controversée. M. L. estime qu'on en a exagéré l'importance; sa solution n'est que secondaire pour l'étude qu'il entreprend (p. 51). Cependant cette définition ne saurait être indifférente et nous ne partageons pas le scepticisme de l'auteur sur la possibilité de <«< construire un système anthropologique unique et cohérent donnant la clé de tous les emplois des mots rouah et nefech en hébreu » (p. 56). Nous estimons même que M. L. n'est pas loin de l'avoir fourni si, toutefois, on n'exige pas du système une rigueur scientifique peu en rapport avec des notions primitives.

Pour la période ancienne d'Israël, M. Lods admet avec MM. Stade et Charles, que la conception populaire de l'âme correspond à la notion animiste du double. L'homme est alors conçu comme composé de deux éléments : la chair (basar) et le souffle ou âme (nefech). La rouah ne serait qu'un synonyme de la nefech et plus particulièrement employée dans le sens de souffle. « Nous conclurons, écrit M. L. (p. 62), que, comme les peuples animistes, les Israélites, dans la période ancienne, 1° ont cru qu'il y a dans l'homme un double qui le fait vivre, qui de son vivant déjà sort quelquefois de son corps et qui survit à la mort, et 2° ont identifié ce double avec le souffle, qu'ils appelaient nefech, et dans certains cas, rouah. »

Ces conclusions sont appuyées par une étude précise des textes. Nous avons, cependant, une réserve de détail à faire; nous préférerions dire que le double était la nefech ou àme, identifiée parfois avec le souffle ou rough comme elle l'était d'autres fois avec le sang (Deut., XII,

23).

REVUE DES LIVRES

ANALYSES ET COMPTES RENDUS

ADOLPHE LODS.

La croyance à la vie future et le culte des morts dans l'antiquité israélite. — Paris, Fischbacher, 1906, 2 vol. in-8, vi-292 et vi-160 pages.

-

Tant qu'on s'en tenait au texte biblique, la croyance à la survie chez les anciens Hébreux pouvait être niée et cette particularité fournissait un caractère distinctif entre Sémites et Ariens. M. Joseph Halévy fut le premier à signaler la vanité de cette prétendue psychologie de peuples et, en 1873, il porta le débat devant l'Académie des Inscriptions. La discussion fut chaude si l'on en juge par les rappels au règlement qu'enregistrent les Comptes rendus.

Renan et Joseph Derenbourg, strictement cantonnés sur le terrain biblique, limitant leur horizon à la critique textuelle, repoussaient de toute leur autorité les idées nouvelles qu'on leur présentait. D'autres académiciens les accueillirent avec plus de faveur. Mais Maury trouva le mot juste quand il fit observer que la question était mal posée, les adversaires confondant l'idée de rémunération avec celle de survie.

Toutefois, en ce qui concerne la survie, M. Joseph Halévy avait donné un argument nouveau, appelé à une grande fortune, lorsqu'il faisait valoir l'universalité de cette croyance chez les primitifs. Ce sont, en effet, les découvertes des ethnographes qui ont permis de donner toute leur portée aux renseignements dont la Bible est avare.

Il est acquis que les croyances animistes régnaient parmi les anciennes tribus hébraïques. Les rites funéraires, notamment, ne peuvent s'expliquer que par la croyance à la survie. Mais les opinions divergent dès qu'on se demande si cette croyance a entraîné un culte des morts.

L'ouvrage si documenté de M. Adolphe Lods vient à point pour fixer les positions et discuter avec impartialité les théories émises. Son apport

personnel consiste dans une connaissance étendue des données anthropologiques et dans les précisions d'un sémitisant averti.

Le premier volume cherche à établir que les anciens Israélites pratiquaient un culte des morts. Si l'on peut différer d'avis avec l'auteur sur certaines interprétations, nous croyons que sa conclusion générale s'imposera. Ce ne sera pas le moindre mérite de l'étude de M. L. d'avoir réagi contre la théorie de M. Grüneisen qui repousse l'idée d'un véritable culte des morts en Israël, surtout un culte des ancêtres. On sait que l'argumentation de ce savant, appuyée sur les plus récentes découvertes anthropologiques, a entraîné la conviction de la plupart de ceux qui ont abordé le sujet après lui.

En premier lieu, M. L. examine (p. 43-75) la notion de l'âme dans l'ancien Israël. La croyance au double est formellement établie : c'est le double de Samuel qui apparaît à la pythonisse d'Endor. Mais ce double qui quittait le corps à la mort de l'individu et même temporairement dans les cas d'extase, etc., ce double était-il la nefech ou bien la rouah? La question est controversée. M. L. estime qu'on en a exagéré l'importance; sa solution n'est que secondaire pour l'étude qu'il entreprend (p. 51). Cependant cette définition ne saurait être indifférente et nous ne partageons pas le scepticisme de l'auteur sur la possibilité de <«< construire un système anthropologique unique et cohérent donnant la clé de tous les emplois des mots rouah et nefech en hébreu » (p. 56). Nous estimons même que M. L. n'est pas loin de l'avoir fourni si, toutefois, on n'exige pas du système une rigueur scientifique peu en rapport avec des notions primitives.

Pour la période ancienne d'Israël, M. Lods admet avec MM. Stade et Charles, que la conception populaire de l'âme correspond à la notion animiste du double. L'homme est alors conçu comme composé de deux éléments la chair (basar) et le souffle ou âme (nefech). La rouah ne serait qu'un synonyme de la nefech et plus particulièrement employée dans le sens de souffle. « Nous conclurons, écrit M. L. (p. 62), que, comme les peuples animistes, les Israélites, dans la période ancienne, 1o ont cru qu'il y a dans l'homme un double qui le fait vivre, qui de son vivant déjà sort quelquefois de son corps et qui survit à la mort, et 2° ont identifié ce double avec le souffle, qu'ils appelaient nefech, et dans certains cas, rouah. »

Ces conclusions sont appuyées par une étude précise des textes. Nous avons, cependant, une réserve de détail à faire; nous préférerions dire que le double était la nefech ou àme, identifiée parfois avec le souffle ou rough comme elle l'était d'autres fois avec le sang (Deut., XII, 23).

Cette définition, la seule correcte au point de vue anthropologique, fait disparaître les difficultés soulevées par les exégètes et notamment elle rend inutile d'attribuer le récit de la création (Gen., II, 7 et 19) à une conception différente. Certes, la littérature monothéiste essaiera d'en tirer des conclusions favorables à sa doctrine, mais la croyance populaire n'en sera pas affectée; il suffit de constater que, jusqu'à une très basse époque, la stèle qui matérialise le double du mort porte le nom de nefech.

A ce point de vue il n'eût pas été inutile de développer la note 2 de la page 62. Il était important d'étendre les rapprochements avec les autres cultes sémitiques. Par exemple, de montrer le tombeau ou la stèle portant le nom de nefech, chez les Nabatéens, notamment, qui prennent un soin extrême même dans les tombeaux de famille, à assurer à chaque mort sa nefech ou stèle. Il n'est pas douteux que les Israélites ont conservé la même idée jusqu'à une époque tardive, puisque, comme l'a expliqué M. Clermont-Ganneau ', le sépulcre des Macchabées à Modin était surmonté de sept pyramides ou nefech, parce qu'il était destiné à recevoir sept personnes et que le mausolée de la reine Hélène d'Adiabène, élevé aux portes de Jérusalem, portait trois pyramides parce qu'on le destinait à trois personnages.

La survie de l'âme mise en évidence, M. L. passe en revue les divers rites funéraires pour déterminer s'ils décèlent un culte des morts. Les remarquables recherches de M. Frazer sur les tabous funéraires ont projeté une vive lumière sur les pratiques israélites. La mise au point n'est peut-être pas définitive, mais on en approche.

M. L. classe les rites funéraires israélites en rites préservatifs : soins donnés au cadavre, vêtements de deuil, gestes de deuil; et rites proprement religieux lamentation, tonsure, incisions, rites alimentaires, purifications. Nous devons discuter en détail cette classification, puisqu'elle décide de l'existence d'un culte des morts en Israël.

L'idée fondamentale des rites préservatifs est de se garer de l'esprit du mort, d'éviter ses maléfices et notamment la contagion de la mort. Les proches parents d'un mort déchirent leurs vêtements et les rejettent parce que l'esprit du mort quittant le cadavre a pu s'y attacher. Ils revêtent alors le sac. M. L. ne doute pas du rôle préservatif de ce dernier; mais il ajoute que le sac était un costume «< à l'origine, tout semblable, par sa forme comme par son étoffe, à ceux qu'on portait d'habitude; il ne s'en distingua par la suite, que parce que, tandis que les modes changeaient, les Sémites conservèrent à perpétuité, par tra

1) Recueil d'Archéologie orient., II, p. 190 et suiv.

dition, au costume de deuil son aspect primitif » (p. 98). C'est ouvrir la porte à l'explication de M. Monseur qui assure que le port du sac constitue un simple cas de « prescription religieuse de l'usage récent ». Ainsi l'Hébreu mettait un sac «< en cas de deuil parce qu'il n'avait jamais vu d'exemple de cérémonies funèbres pratiquées avec un autre costume » 1. Cette explication est inadmissible; elle escamote la difficulté, elle ne la résoud pas.

comme tout vêtement de deuil,

est

L'acte de revêtir le sac d'une nécessité plus complexe. Au regard de l'individu, il évite que la contagion du tabou ne se transmette aux vêtements usuels et au regard de la communauté il signale l'état d'interdiction qui pèse sur les proches du mort. Si l'on démontrait que le sac a été jadis le vêtement usuel des Hébreux, on pourrait affirmer qu'à cette époque reculée, il existait un autre vêtement de deuil que le sac.

M. Lods signale que les rites connexes au port du sac : enlèvement des sandales, changement de coiffure, usage du voile, etc., ont une grande similitude avec les prescriptions du culte ; mais il n'admet pas que ces rapprochements suffisent à démontrer que les Israélites rendaient un culte à leurs morts (p. 99 et 101).

Parmi ces rites, celui qui consiste à se couvrir la tête de cendre ou de terre a suscité les explications les plus contradictoires. On a renoncé, ici comme ailleurs, à y reconnaître un symbole de la douleur. Mais en invoquant l'exemple fourni par Job qui se roule la tête dans la poussière et dans la cendre, on a supposé (Frey) que tous les actes de ce type symbolisaient l'humilité envers Yahvéh.

Robertson Smith et M. Schwally ont supposé que la poussière était prise au tombeau et que la cendre était celle du sacrifice. Mais cela explique-t-il l'attitude de Job? M. L. critique toutes ces explications et fort justement. Lui-même hésite sur la solution. S'inspirant d'une remarque du P. Lagrange, il ne repousserait pas que les parents du défunt aient voulu fuir la maison hantée par l'esprit du mort et se soient réfugiés sur le tas de fumier brûlé qui s'élève à l'entrée du village et sert de gîte aux mendiants sans asile (p. 111). C'est bien là en effet que se réfugie Job, mais cela ne rend pas compte des gestes rituels qu'il accomplit. Surtout, il n'est jamais dit que les proches des morts adoptaient un pareil séjour.

M. L. admettrait encore, et semble-t-il plus volontiers, l'hypothèse du déguisement suggérée par M. Frazer et préconisée par MM. Grüneisen et

1) Monseur, Revue de l'Histoire des Religions, 1906, I, p. 294.

« PrejšnjaNaprej »