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comme marchans; et ont marchandises assez, par mer et par terre, de toutes pars. Il vivent de char et de ris et de lait.

Autre chose n'y a qui à conter face. Et sachiez que ce royaume de Quesivacuran si est la derreniere province d'Inde, alant vers ponent' et maistre 2. Que je vous di que de Maabar jusques à ceste province: si est la greigneur Inde, et la meilleur qui soit au monde. Et vous avons conté, de ceste greigneur Inde, les royaumes et les provinces et les cités qui sont sus la mer. Car de celles qui sont en ferme terre ne vous avons riens dit, pour ce que ce seroit trop longue matiere (2). Et pour ce nous partirons atant 3; et vous conterons encore d'aucune isles qui sont d'Inde. Et commencerai de deux isles qui sont appellées masle et femelle.

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Ce pays de Katch et de Wågur est borné au nord-est par celui d'Adjmîr, ou le Radjpoutâna, dont il est séparé par un grand désert de sable; à l'est par le Goudjarât, dont il est aussi séparé par le Rann (du sanskrit rah, « abandonner, délaisser »; en maràthe rána, « un territoire désert, inculte »); au sud par la mer, et à l'ouest par la branche la plus orientale de l'Indus, nommée Loni, et un marais salant qui le sépare du Sind.

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description étendue qu'en donne Walter Hamilton dans son ouvrage intitulé: Description of Hindostan and the adjacent Countries, London, 1820, 2 vol. in-4°, t. I, p. 585-603.

Ce pays n'est plus aujourd'hui ce qu'il était du temps de Marc Pol, car, peu de temps après son passage dans les mers de l'Inde, en 1319, il

y eut un violent tremblement de terre qui détruisit presque entièrement un grand nombre de villes et remplit d'eau ce territoire, indiqué aujourd'hui sur les cartes sous le nom de Runn. Un autre tremblement de terre, qui eut lieu en 1819, détruisit aussi presque entièrement plusieurs villes, entre autres Bhoudj (lat. 23° 15′; long. 67° 26′), dans laquelle il y avait des ouvriers habiles pour travailler l'or et l'argent; Andjar (lat. 23° 03′; long. 67° 45′). Mandavie (lat. 22° 50′; long. 67° 07') est le port principal de la province sur la côte du sud; c'est la ville la plus peuplée de Katch, ayant environ 35,000 habitants, composés principalement de Bhattias, qui sont une tribu hindoue, et dont font partie les principaux négociants du pays, lesquels commercent avec l'ouest de l'Inde et l'Arabie; les Banyans, également hindous et commerçants; des Mahometans et d'autres étrangers. Les pilotes et les marins de Katch sont renommés pour leur science nautique, et ils prétendent que ce sont eux qui ont enseigné aux Arabes

CHAPITRE CLXXXIII.

Cy dist de .ij. isles qui sont appellees l'une masle et l'autre femelle, pour ce que en l'une ne demeure que femmes, et en l'autre que hommes, si que pour ce ont il ainsi à nom.

Et quant l'en se part de ce royaume de Quesivacuran, qui est en terre ferme, et l'en va par mer entoura .v. (cinq) cenz milles vers midi; adonc si treuve l'en les deux isles masle et femelle (1).

CLXXXIII. -a Ms. A. encore.

l'art de la navigation et celui de construire des navires.

(2) Marc Pol rappelle ici en quelques lignes très-nettes, comme il l'a fait déjà dans d'autres parties de son Livre (voir à la fin du ch. LIV, p. 146, et ch. CLVII, p. 534), les contrées qu'il vient de décrire, et celles que, pour une cause ou pour une autre, il a négligé de comprendre dans sa narration. Il nous dit ici qu'il n'a parlé que des villes maritimes de l'Inde, parce que la description de celles qui étaient en terre ferme l'aurait entraîné trop loin. Il est probable qu'il ne les avait pas visitées; mais ce qu'il nous en aurait dit d'après les récits qui lui en furent faits sans doute eût également renfermé des renseignements précicux.

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CLXXXIII. (1) Les commentateurs ont été très-embarrassés ici, comme en beaucoup d'autres circonstances, pour reconnaître les localités désignées par Marc Pol. Marsden penche à croire que c'est l'ile nommée Abd-al-Curia, et « les Deux Sœurs » sur certaines cartes, ou les Deux Frères» sur d'autres, lesquelles iles sont voisines de l'île de Socotora, dont il sera question dans le chapitre suivant. Mais les distances indiquées par Marc Pol ne concordent pas avec cette hypothèse.

Sans attacher à la détermination de la véritable situation de ces iles une grande importance, nous pensons cependant qu'elles devaient faire partie de celles qui sont situées dans la mer d'Arabie, près de la Baie de Couria Mouria, par environ 17o de latitude N. sur 53° de long. E. Ces îles se trouvent précisément entre Quesivacuran, ou le pays de Katch, et l'ile de Scoira ou So

cotora, à peu près à une égale distance (en latitude du moins), comme l'indique Marc Pol.

D'après le capitaine Haines (Journal of the Geographical Society, an. 1845), une seule de ces îles était habitée lorsqu'il la visita en 1844; c'était celle nommée par les Arabes Djezírát Hulláníyah, «l'ile des Chèvres » ; il n'y restait qu'une population de sept familles ; mais il vit dans l'ile de 600 à 800 tombeaux qui prouvaient une ancienne population beaucoup plus nombreuse. Les habitants y recueillent encore l'ambre gris (ib., p. 33), que cite Marc Pol comme étant un produit de l'île qu'habitaient les hommes. C'est très-probablement Djezirât-Hullânîyah. Celle des femmes était alors vraisemblablement l'ile Sódah du même groupe, qui est voisine de la première, et sur laquelle le capitaine Haines ne trouva que deux seules femmes. (lb., p. 35.)

Quant à la question de savoir si ces îles étaient réellement habitées, l'une par des « hommes » et l'autre par des « femmes » (car c'est ainsi qu'il faut entendre l'expression « îles masle et femelle »), Marc Pol ne paraît pas en douter, et les détails qu'il donne sur ces mêmes îles et leurs habitants paraissent empreints d'un cachet de vérité qu'il est difficile de contester. Nos manuscrits mêmes, aussi bien que ceux qui ont été publiés par la Société de Géographie, renferment des particularités que l'on ne trouve ni dans Ramusio ni dans les autres traductions. Voici comment s'exprime l'ancienne version latine (p. 467): « Isti sunt Christiani baptizati et << tenent legem Testamenti antiqui. Isti nunquam tangerent aliquam mulierem prægnantem, et « postquam peperit ante quadraginta diebus. »

"

Et est l'une pres de l'autre, entour .xxx. (trente) milles. Il sont tuit crestien baptisiez et se maintiennent à l'usage du Viel Testament'; car quand leur femmes sont grosses, il ne les toucheroient en aucune maniere ; et quant elle a fille, il ne la toucheroient jusques à .xl. (quarante) jours.

b Ms. B. à la guise. - Ms. A. Le ms. B. porte: ancien. d Le ms. C. dit : il n'abitent plus à elles. * Id. ensement (pareillement) quant elles ont filles, si n'abitent à elles devant apres .xl. (40) jours.

L'abbé Renaudot, dans les notes jointes à sa traduction de la Relation des deux voyageurs mahometans dans les Indes et à la Chine, au neuvième siècle de notre ère, après avoir cité le présent chapitre de Marc Pol, en empruntant la version italienne de Ramusio, ajoute (p. 140): « Nicolo de Conti dit (d'après Marc Pol) que les hommes sont obligés de se retirer après trois mois de séjour, puisque autrement ils mourroient à cause de la mauvaise disposition du climat. On ne peut rien dire de ces îles, puisqu'il est difficile de les connaître par une description si imparfaite. Mais ce que dit Marco Polo ne peut être véritable à l'égard du temps que les hommes passent à l'ile des femmes. Car, étant chrétiens, selon la discipline qui subsiste encore dans toutes les Églises du Levant, ils étoient obligés de ne pas approcher de leurs femmes durant le Caresme, qu'ils célèbrent presque en même temps que nous. De plus, il est assez difficile de comprendre comment les femmes demeuroient dans une île sans avoir aucun culte exté rieur, qui ne pouvoit être exercé sans la présence des ecclésiastiques, qui pouvoient néantmoins y passer dans le temps marqué par Marco Polo, dans lequel on célèbre la fête de Pâ ques. »

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que ces insulaires, sans doute d'origine juive, quoique baptisés, « suivaient les usages de l'Ancien Testament »; ils pouvaient donc bien être dispensés de pratiquer le Carême.

Dans tous les cas, les « iles mâle et femelle » ne sont pas de l'invention de Marc Pol. Le marchand arabe Soleyman en parle dans sa Relation ci-dessus citée. Le géographe arabe Bakoui (v. 1403) parle d'une île des femmes qu'il place dans les mers de Chine : « Cette ile est << dans le voisinage de la Chine; elle n'est ha« bitée que par des femmes. On dit qu'elles engendrent par l'opération du vent, ou en man«geant du fruit d'un certain arbre qui est dans « le pays. » Kaswîni, autre géographe arabe (m. 1283), parle aussi de cette « île des femmes », en rapportant le récit d'un marchand arabe qui disait y avoir été jeté par les vents et avoir failli être mis à mort par les habitantes; mais une d'elles l'avait sauvé.

On trouve dans la lettre d'un missionnaire français écrite de Manille le 10 juin 1697, le passage suivant (Lettres édifiantes, etc.) : « Ces étrangers (d'iles inconnues supposées au midi des Mariannes) disent qu'une de leurs îles n'est habitée que par une espèce d'amazones, c'est-àdire des femmes qui forment une république où elles ne souffrent que des personnes de leur sexe. La plupart ne laissent pas d'être mariées; mais les hommes ne les viennent voir qu'en une certaine saison de l'année, et après quelques jours ils retournent chez eux, remportant avec eux leurs enfants mâles qui n'ont plus besoin de nourrice. Toutes les filles restent, et les mères les élèvent avec le plus grand soin. » On voit que le récit de Marc Pol est loin d'être imaginaire.

En l'isle qui est appellée masle si demeurent touz les hommes. Et quant vient au mois de mars, si se partent touz, et vont à l'autre isle, chacun an, trois mois : c'est mars, et avril et may. Et en ces trois mois se soulacent avec leur femmes. Et au chief de ces trois moys s'en tournent arriere en leur isle; et font leur semence et leur labour, et leur marchandise, les autres neuf mois.

Il ont en ceste isle l'ambre moult fin. Il vivent de char et de lait et de ris. Il sont moult bons peescheeurs', et prennent en leur mer moult de bons poissons et grans; et en prennent quantité moult grant, et les font sechier, dont il ont tout l'an assez à mengier; et en vendent aus marchans qui vont là. Il n'ont nul seigneur, mais il ont un evesque qui est soubmis à l'arcevesque d'une autre isle, dont nous vous conterons ci avant, qui a nom Scoira. Et si ont langage par eus ". Et les enfans qu'il engendrent en leurs femmes se il est femelle, si demeure à la mere; et se il est masle, si le nourrit la mere' .xiiij. ans, et puis le renvoie à son pere. Et c'est la coustume de ces deux isles. Les femmes ne font autre chose que nourir leur enfans, et cueillir' aucuns fruiz que elles ont dans leur isle. Car les hommes les fournissent de ce que mestier * leur est. Autre chose n'y a qui à conter face; si vous dirons avant d'une autre isle qui a nom Scoira'.

CHAPITRE CLXXXIV.

Cy dist de l'isle de Scoira.

Quant l'en se part de ces deux isles, et l'en va entour .v. (cinq) cenz milles vers midi, adonc treuve l'en l'isle de Scoira (1). Et

f Ms. C. Pescheurs. Le ms. C. dit; il n'ont nul seigneur, mais ont ung leur evesque, d'une autre isle qui a à nom Scoira. Le ms. A. porte aussi Scoira au lieu de Scaira, ms. B. h Cette phrase manque dans le ms. C. i Ms. B. la femme. — į Id. cueillier. Ms. C. besoing. - Nos trois mss. portent Scoira et Scaira.

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est située vis-à-vis Aden. On en tire le sabr ou aloès, et le « sang des deux frères» (le sangdragon) (Notices et Extraits des manuscrits, t. II, p. 411).

On lit dans Ibn Batoutah (t. I, p. 362, tra

3

sont touz crestiens baptisiez; et ont arcevesque. Il ont moult d'ambre; et si ont draps de coton' assez et autres marchandises

CLXXXIV. -a Ms. B. tuit. - b Ms. A. Le ms. B. couton.

duction citée) : « Le cheikh Saïd se mit en route avec Quachl (un pèlerin), et ils achetèrent des marchandises avec l'argent qu'ils avaient disponible; mais quand ils furent arrivés à l'ile Sokothrah, d'où emprunte son nom l'alvès sokothrin (vulgo socotrin), ils furent attaqués par des voleurs indiens, montés sur un grand nombre d'embarcations. Un combat acharné eut lieu, dans lequel beaucoup de monde périt des deux côtés. »

Ou voit, par cette dernière citation, que les pirates étaient encore, vers l'année 1345 de notre ère, tres-communs dans les mers de l'Inde.

On hat aussi dans la « Relation des voyageurs arabes du neuvième siècle » (traduction de M. Reinaud, t. 1, p. 139) : « La même mer renlerme l'ile de Socothora, où pousse l'aloès socothorien. La situation de cette ile est près du pays des Zendj et de celui des Arabes. La plupart de ses habitants sont chrétiens; cette circonstance vient de ce que, lorsqu'Alexandre fit la conquête de la Perse, il était en correspondance avec son maître Aristote, et lui rendait compte des pays qu'il parcourait successivement. Aristote engagea Alexandre à soumettre une ile nommée Socothora, qui produit le sabr (l'aloès), nom d'une drogue du premier ordre, sans laquelle un médicament ne pourrait pas être complet. Aristote conseilla de faire évacuer l'ile par les indigènes, et d'y établir des Grecs qui seraient chargés de la garder, et qui enverraient la drogue en Syrie, dans la Grèce et en Egypte. Alexandre fit évacuer l'ile et y envoya une colonie de Grecs. En même temps il or donna aux gouverneurs de provinces qui, depuis, la mort de Darius, obéissaient à lui seul, de veiller à la garde de cette île. Les habitants se trouverent donc en sûreté jusqu'à l'avènement du Messie. Les Grecs de l'île entendirent parler de Jésus, et, à l'exemple des Romains, ils embrasserent la religion chrétienne. Les restes de ces Grees se sont maintenus jusqu'aujourd'hui (neuvieme siecle), bien que dans l'île il se soit conservé des hommes d'une autre race. »> [Voir aussi

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riple de la mer Érythrée » qui dit: Kai xarà τοῦτον ἐν τῷ πελάγει νῆσος, ἀνὰ μέσον τούτου καὶ τοῦ πέραν ἀκρωτηρίου τῶν Ἀρωμάτων, τῷ Συγγρῳ συνορίζουσα μᾶλλον, ἡ Διοσκορίδου και loupévn, μeyiotn μèv, x. t. λ. « Ex adverso ejus in alto insula est, media inter hoc atque opposita continentis promontorium Aromatum interjecta, Siagro tamen propior, Dioscoridis dicta, amplissima quidem, etc. >> (Geographi Græci minores, t. I, p. 280, éd. Didot). L'auteur du Périple dit ensuite que les insulaires étaient des étrangers, et qu'ils formaient un mélange d'Arabes, d'Indiens et aussi de Grecs, qui étaient allés s'y établir dans l'intérêt de leur commerce: Εἰσὶ δὲ ἐπίξενοι καὶ ἐπίμικτοι Αράβων τε καὶ Ἰνδῶν καὶ ἔτι Ἑλλήνων τῶν πρὸς ἐργασίαν ἐκπλεόντων. (10.)

Ptolémée parle aussi de l'ile de Dioscoride, A:ooxopíòous vñaos (1. VIII, 22, § 17, édit. Nobbe); mais il ne dit pas qu'elle était habitée de son temps par des Arabes, des Grecs et des Indiens, comme l'auteur du Périple, ce qui ferait supposer qu'au moins les marchands arabes et grecs ne s'y établirent qu'après l'époque où écrivait Ptolémée (dans la première moitié du second siècle de notre ère), et ce qui place l'auteur du Périple à un åge postérieur à celui de Ptolémée, comme beaucoup d'autres indices tendent à le démontrer.

L'ile de Socothra est une de celles de la mer d'Arabie que Diodore de Sicile appelait Not εúdaíμovεç (I. III, § 47, 35, éd. Didot), « les iles fortunées». Ce nom répond à celui même de l'ile en question, lequel nom est dérivé du mot sanskrit Soukhádhára, « qui contient le bonheur, la félicité », nom du ciel d'Indra ; et avec le mot dvipa, ile» (forme dialectique

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