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journées, ains qu'il y fust 2. Or avint qu'il avoit un sien oncle qui avoit nom Acomat Soldan, car il estoit devenuz sarrazins. Quant il

› Avant qu'il y fút; —ains que étant dérivé du latin antequam.

les

(2) Get Acomat Soldan était le sultan Ahmed, qui se nommait avant Tagoudar, et qui disputa le trône de Perse à Argoun, son neveu. « Après la mort d'Abaca, dit D'Ohsson (lieu cité, t. III, p. 550, d'après Rachid), les Khatounes (princesses veuves), princes du sang et les généraux présents à Méraga, s'assemblèrent pour rendre les derniers de voirs au monarque défunt, et délibérer sur le choix de son successeur. Le prince Argoun, qui avait été mandé par son père, reçut en route la nouvelle de sa mort, et se rendit à Méraga, où les khatounes et les princes du sang lui présentèrent la coupe, suivant l'usage. Le général Boucaï, dévoué à ce jeune prince, ordonna aux offi. ciers de la maison d'Abaca de faire leur service auprès d'Argoun. Bientôt Tagoudar, frère d'Abaca et le septième fils de Houlagou, arriva de Géorgie. Après les cérémonies funèbres, l'assemblée se rendit à Tehogatou.

« Il se forma trois partis ; les princes Adjaï, Coungourataï, Houladjou, tous trois fils de Houlagou, et d'autres, voulaient élire Tagoudar. Les genéraux Boucaï, Ourouk, Acboukaï et d'autres officiers de la maison d'Abaca, tenaient pour son fils Argoun. Oldjaï-Khatoun, qui avait été la femme de Houlagou, et puis celle d'Abaca, était à la tête d'un troisième parti en faveur de Mangou-Timour; mais ce prince étant mort sur ces entrefaites, elle se rangea, de même que Coutouï Khatoun, du côté d'Argoun (Rachid). C'était toutefois, d'après le Yassa (Code de DchinghisKhaân), l'aîné de la famille qui devait succéder au trone (cette loi est encore en vigueur en Turquie et en Égypte), et A ́hmed était l'oncle d'Argoun. Cette considération prévalut.

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Tagoudar fut proclamé d'une voix unanime le 6 mai 1282. « A la suite des fêtes qui célébrérent son avénement au tròne (dit D'Ohsson, d'après Rachid, lieu cité, p. 552), Ahmed se fit apporter les trésors (d'Abaga), déposés à Schaoutéla, et les distribua aux princes, aux princesses, aux officiers et aux troupes; chaque soldat reçut cent vingt dinars. Sur ces entrefaites survint

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Argoun, qui se plaignit qu'on ne l'avait pas attendu pour la cérémonie de l'inauguration. Ahmed lui montra beaucoup d'égards et lui remit de sa main vingt balischs d'or (valant chacun 2,000 dinars, ou 1,000 florins d'or) qu'il lui avait réservés. Ce fut alors qu'Argoun et Coungcourataï se lièrent d'une étroite amitié, qu'ils se garantirent par des serments mutuels, dans l'Ordou de Touctaï Khatoun, l'une des veuves d'Abaca. »>

C'est ce fait de distribution d'argent que Marc Pol a relevé contre A'hmed, en disant que « il print la seigneurie et se fist seigneur, et trouva

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<< gens d'armes (aux soldats) pour avoir leurs « cœurs et leurs grâces. >> On voit que Marc Pol était bien informé.

L'année suivante, Argoun, qui voyait avee peine son oncle Ahmed sur le trône de son père, chercha à se faire des partisans pour le renverser. Il partit au printemps pour l'Irak Adjemi. Il avait conservé le Khorassan que son père lui avait donné en apanage; mais cela ne le satisfaisait pas. Il fit demander au sultan Ahmed (ce dernier avait pris le titre de sultan, après avoir fait profession de l'islamisme; c'est pourquoi il est nommé Soldan par Marc Pol) la cession des domaines royaux dans l'Irak et le Fars, lui mandant : « Puisque vous possédez, en vertu de vos droits et des suffrages unanimes, le trône de « mon père, il me faut un territoire qui puisse fournir à l'entretien des troupes que je com

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mande. Si vous m'accordez les provinces qui

<< appartiennent maintenant au domaine privé, « la meilleure intelligence régnera entre nous; «< sinon, ce but désiré ne sera pas atteint. » Le sultan répondit : « Par un effet de notre affec«tion et de notre sollicitude à son égard, nous <«<lui confirmons la possession du Khorassan, son « apanage. S'il désire que nous y joignions une « autre province, qu'il vienne au Couriltai; «< après avoir conféré avec lui, nous ne lui refu «< serons pas nos faveurs; mais s'il persiste dans

sor3 que thaga son frere estoit mort, et que Argon son never estoit si loins, si pensa que il pourroit bien estre seigneur Si s'appareilla atout grant gent, et s'en vint à la court Abaga son frere et print la seigneurie; et se fist seigneur, et trouva si grant tresor que ce fu merveilles. Et, comme malicieus, le departi tout aus barocs, et aus gens d'armes, pour avoir leurs cuers et leurs graces. Et quant ses

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• sa déshéissance, nous ferons marcher contre « bai. Vassat.,

A ́hmed, ayant en avis que les partisans d'Argoon conspiraient contre lui, fit arréter un grand nombre des chefs de cette conspiration, entre antres Conngconratai, qui fut mis a mort en lui cassant l'épine du dos; plusieurs autres furent jetés dans les fers et ensuite exécutés. De son côté, Argoan, informé des dispositions du sultan, vit qu'il ne lui restait plus qu'à tenter le sort des armes. Il réunit les troupes stationnées dans le Khorassan et le Mazendéran, Il fit marcher son armée en trois corps, et se mit à la tête du dernier. Il manda au général Névrouz de venir le joindre en diligence avec son touman (dix mille hommes) de Caraounass (voir, sur ce nom et sur celui de Névrouz, la note 8, p. 83 de ce volume), et s'avança avec un corps de cinq mille hommes. Les deux avant-gardes se rencontrèrent à Khailbuzurk, situé à moitié chemin entre Ray et Cazvin.

Ahmed était parti du Mougan le 26 avril 1284, à la tête de 80,000 hommes de cavalerie, Mongols, Musulmans, Arméniens et Géorgiens. Une grande bataille eut lieu dans la plaine d'AkKhodja (c'est l'endroit que Mare Pol appelle, dans le chapitre suivant, « un moult biau plain et moult grant »). Argoun fut défait et se retira dans la forteresse de Kélatkoukh, située au nord de Thous. La plupart de ses généraux, croyant sa cause perdue, avaient passé au camp d'Ahmed. Névrouz, qui lui restait fidèle, le pressait de se retirer au-delà du Djihoun, où il trouverait une armée; Argoun ne voulut pas.

Sur ces entrefaites, des pourparlers eurent lieu entre des officiers d'Argoun et d'A'hmed, qui cherchait à attirer son neveu à sa cour pour s'emparer de sa personne; il y réussit. Argoun se

rendit au camp d'A·hmed le 20 juin 1234 (selon Rachid et Vassaf (dans D'Obsson, Liem cité, t. III, p. 595,. Il ne fut pas introduit tout de suite dans le pavillon du sultan; on le laissa en plein air exposé à l'ardeur du soleil; la sueur coulait de son visage. Sa sour Togan, qui l'aimait tendrement, cédant à sa vive émotion, sortit de la tente royale et alla le garantir avec son parasol des rayons brûlants. Le sultan sortit ensuite pour chasser dans les environs du camp. A son retour, Argoun fut introduit; il entra, plia le genou, et rendit hommage au sultan de la manière usitée chez les Mongols. Ahmed l'embrassa. Il dit ensuite à Argoun qu'il conserverait en apanage le Khorassan, comme sous le règne de son père. Néanmoins Ahmed le fit garder à vue.

Pendant ce temps un projet se forma, à la cour même d'A'hmed, pour le détrôner et délivrer Argoun. Ce projet réussit. A'hmed s'étant enfui, il fut atteint par les Caraounass, qui se saisirent de sa personne, lui ôtèrent ses habits et le gardèrent dans sa tente. Des généraux qu'il avait emprisonnés et d'anciens officiers du prince Coungcourataï furent chargés de le juger; il fut condamné à mort et exécuté de la même manière qu'il avait fait périr ce prince. «< peine du talion, dit Vassaf, fut appliquée au sultan; on lui cassa l'épine du dos. » Ce supplice eut lieu le 10 août 1284.

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La conversion d'Ahmed au mahométisme et son zèle pour cette religion avait indisposé contre lui les généraux mongols, comme celui d'Abaca pour le christianisme causa sa perte; car, selon quelques historiens, ce prince mourut empoisonné. (Voir la note 1 du chapitre précédent.) Les apostasies ne sont pas toujours heureuses.

barons et ses genz d'armes virent que il avoient tant eu de lui, et disoit chascun que il estoit bons sires. Et l'amoient et disoient que il ne voloient autre seigneur que li. Mais il fist puis une mauvese chose qui moult fu reprise de chascun. Car il print toutes les fames son frere Abaga, et les retint puis toutes por soi.

Quant il ot la seigneurie, et ne demoura pas gramment que il oï nouvelles comment Argon son neveu venoit atout grant ost, si ne fist nulle demeure; mais de maintenant fist mander ses barons et ⚫toute sa gent, et fist en une semaine appareillier moult grant ost de genz à cheval, pour aler encontre Argon. Et y aloit moult volentiers, si comme celui qui cuidoit la bataille gaaingnier; et ne se monstroit de riens esbahis.

CHAPITRE CXCIX.

Comment Acomat Soldan se departi atout son ost pour aler contre son neveu qui venoit prendre la seignorie si comme droiz estoit.

Et quant1 Acomat Soldan ot appareillié bien .LX.M. (soixante mille) hommes à cheval, si se mist à la voie, et chevauchierent bien .x. (dix) journées et orent nouvelles comment leur anemis estoient près d'eus, et avoient bien autant de genz comme il avoient. Si fist, Acomat, tendre ses paveillons en un moult biau plain et moult grant (1). Et illec fist atendre Argon pour combatre à lui. Quant il ot son fait appareillié, si fist assembler ses barons et ses chevaliers, et les genz d'armes, pour estre au parlement avec eus1; car il, comme malicieus hom2, vouloit savoir le cuer et la volenté de chascun; et commença à parler en tel maniere (2) :

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Seignors, dist il, vous savez bien comment je doi estre seigneur « par raison de tout ce que Abaga, mon frere, tenoit, pour ce que

CXCIX.

1 Pour délibérer avec eux sur les mesures à prendre. • Homme malintentionné, mais adroit.

CXCIX. (1) Voir la note 2 du chap. pré- bouche d'A'hmed ne manque ni d'art ni d'élocédent.

(2) Le discours que Marc Pol met dans la

quence; il est parfaitement dans la situation. C'est un véritable modèle du genre persuasif.

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je sui tilz de celui pere de cui3 il fu filz 3, ; et pour ce que j'ai «esté toutes foiz avec lui à aidier à conquester les terres et les provinces que nous terros. Elen est voir que Argon, le filz Abaga, « moco frere, se asco vodoit dire que à lui deust venir la seigneu« rie, je dimnie, sauve la garde et la grace de touz ceus qui le vou« mient+ dire que a 11 deust venir la seigneurie, que ne seroit pas • raisoo te firme close; pour ce que son pere tint le regne tant, • commme vous savez, toute sa vie, si est raison aussi que je la doie navour trote ma vie, depuis sa mort. Et ores puis qu'il est ainssi. comme je vous ai dit, je vous pri que nous deffendons notre Brun, et que le regne et la seigneurie remaingne à nous touz enཟླ་འ sene que je vous di que je en vueil avoir l'onneur seulement cet la renommée, et, vous, en aurez le proufit et l'onneur et l'avoir,

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et la seigneurie par toutes nos provinces et terres (4). Autre chose De vous dirai; car je sais bien que vous estez sages et preus; et • que vous amez droit; et que ferez chose que, à touz, nous sera honneur et bien. »

Si se test atant 5, et ne dit plus. Et quant il orent tuit ce entendu, si respondirent tuit communement que il ne li faudront 6 jamès, tant qu'il aient la vie ou cors; et qu'il li aideront contre touz les hommes du monde, et contre Argon proprement; et qu'il n'ait jà doutance; que il convient que il prengnent Argon mort ou vif. Et li rendront en ses mains. En tel maniere, comme vous oï avez, parla Acomat à ses hommes, et sot 8 leur volentez.

Or vous lairons de Acomat et de son ost9; et vous dirons de Argon et de son ost.

3 Dont; forme de Bourgogne, à la fin du douzième siècle. - Voudraient. tut alors. 6 Ils ne lui feront pas défaut. -7 Prennent.

(3) Ceci est tout à fait conforme au droit d'hérédité établi dans le Yassa ou Code de Dehinghis-Khaan, comme nous l'avons déjà remarqué précédemment.

(4) On voit, par la teneur de ce discours, que le sultan Ahmed sait employer les arguments qui sont les plus sûrs moyens de persuasion. Il était difficile que son auditoire ne fût pas à la fin con

_8 Sut. -9 Armée.

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vaincu. Marc Pol se montre ici vraiment habile écrivain. Il se pourrait toutefois que le rédacteur de son livre, Rusticien de Pise (voir cidevant le Prologue, p. 4), ne soit pas étranger à l'art avec lequel les discours mis dans la bouche des principaux personnages sont disposés. Le fond a été certainement fourni par Mare Pol; mais un rhéteur y a mis la main.

CHAPITRE CC.

Comment Argon se conseille à sa gent pour aler combattre contre Acomat Soldan son oncle qui li avoit prinse sa seigneurie.

Sachiez que quant Argon sot certainement que Acomat l'atendoit ou champ avec moult gent, si en ot moult grant ire. Mais toutefoiz ne s'esbahi pas, porce qu'il ne vouloit pas monstrer à ses hommes qu'il eust paour; car il li pourroit trop nuire. Mais n'en fist nul semblant; ains monstroit que il ne les doutoit de riens, pour conforter sa gent, si comme sages hons qu'il estoit (1).

Nota.

Les mss. A. et B. s'arrêtent ici. Le premier portait ensuite la mention suivante, effacée, mais encore cependant lisible:

« Ce livre est au duc de Berry.

(Signe) JEHAN. »

Le second se termine ainsi :

<< Et atant fine, Messire Marc Pol, son Livre de la Division du monde et des merveilles d'icelluy. »>

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(1) Ce chapitre n'est évidemment pas terminé. Le texte français publié par la Société

de Géographie de Paris continue ainsi (p. 258) :

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«riter de nostre tere. Et encore savés tout voi<< remant comant il n'est de nostre loi, mès le a

«

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‹guerpir (déguerpir, abandonnée) et est devenu

de saracinz et aore (adore) Maomet; or véés « coment seroit doingne (digne) cousse (chose) << qe Saracinz deust avoir seingnorie sor Tartars; « or biaus frères et amis, puis che toutes cestes raisonz hi sunt bien voz doit croistre cuer «<e volunté de faire ce qe convient, qe ce ne « avegne, dont jeo prego chascun qu'il soit vai<< lant home et qe s'eforce outre poir de com« batre si ardiemant qe noz veincon la bataille, « e qe la seingnorie remaingne à voz e ne à Sarazinz; e certes chascun se doit conforter qe noz veinquiron la bataille por ce qe nos avón droit, «e nostre ennimis ont le tor. Or ne voz diroi

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