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HANS STUMME.

Maltesische Studien, Maltesische Märchen, Gedichte und Rätsel (fasc. 4 et 5 du vol. I des Leipziger Semistische StuLeipzig, Hinrichs'sche Buchhandlung, 1904, in-8°, 124 et XVI

dien). 102 pp.

Jusqu'ici l'on n'avait rien, ou peu s'en faut, qui pût donner une idée exacte des dialectes arabes parlés dans les îles de Malte et de Gozzo. Le maltais littéraire était bien connu, et depuis longtemps, mais, hormis trois contes publiés par M. L. Bonelli (Supplementi periodici dell'Archivio Glottologico italiano IV, p. 53 seq.), on ne possédait aucun texte populaire, noté phonétiquement, dans cette langue curieuse et d'origine obscure. M. H. Stumme s'est proposé de porter remède à notre indigence. Il a visité les îles de Malte et de Gozzo au printemps de l'année dernière (1903) et en a rapporté, avec un certain nombre de petits poèmes variés et d'énigmes, trente-sept contes et anecdotes, où la langue parlée se trouve reproduite avec le plus grand soin. Ces textes sont réunis dans le premier des deux volumes annoncés ici, dans les « Études maltaises »; tandis que leur traduction allemande forme la matière du second, qui est intitulé «< Contes, poèmes et énigmes maltais ».

Assurément il serait difficile de trouver quelqu'un qui fût mieux préparé que M. Hans Stumme à l'étude des variétés occidentales de l'arabe moderne. Ses travaux sur les parlers de la Tunisie et de la Tripolitaine sont bien connus des linguistes et des sémitisants: ils ont placé leur auteur à côté de MM. Socin, Fischer, Lüderitz, au premier rang des savants allemands qui ont inauguré de si brillante façon l'étude scientifique des dialectes du Maghrib. Aussi les Maltesische Studien sont-elles une contribution excellente à la connaissance de l'arabe maltais. La transcription adoptée par M. Stumme satisfait aux deux conditions essentielles qui s'imposent à tout système de notation phonétique : elle est claire et pourtant exacte, grâce au soin avec lequel elle a été adaptée strictement à son objet. Le choix des textes est heureux, et M. S. a eu la bonne fortune de trouver des sujets d'origine diverse en nombre suffisant; son opuscule contient des spécimens en prose, qui sont comme on sait les meilleurs au point de vue linguistique, de sept parlers locaux, dont cinq dans l'île de Malte (Lavalette, Balzan, Città Vecchia, Musta, Dingli), et deux dans l'île de Gozzo (Victoria et Sciarra). De plus, il contient quelques morceaux en langue commune, sorte de xový, comprise sur toute l'étendue du domaine maltais, à la ville comme aux champs. Enfin, et ce n'est pas la partie la moins intéressante du volume, des notes nombreuses sont jointes aux textes. Ces notes sont consacrées pour la plus grande partie à l'exposé de la phonétique du maltais et des traits originaux de ce dialecte dont les relations avec l'arabe maghribin sont encore peu claires (cf. sur ce point la note de M. Stumme, pp. 82-83 des Maltesische Studien).

Quant au fond, les contes recueillis par M. Stumme reflètent curieusement

l'état particulier de ce petit peuple maltais à la fois si oriental et si occidental. Quelques-uns d'entre eux sont de simples faits divers, brusques changements de fortune ou crimes passionnels. D'autres sont visiblement apparentés de près à nos contes de fées : ainsi le no I au Petit Poucet, le no II à la Belle au Bois Dormant, le n° III au Chat botté, le no IV aux Trois Souhaits, le n° VI à Barbe-Bleue. D'autres enfin ont des attaches orientales évidentes. Le n° XII de la collection de M. Stumme est une histoire fantastique qui se retrouve dans le recueil des Mille et une Nuits. Le mauvais plaisant, qui est le héros de plusieurs anecdotes et qui porte généralement le nom de Djahan, rappelle tout à fait Si Djeh'a et ses fourberies telles que MM. Mouliéras et René Basset nous les ont fait connaître. Il serait certes intéressant de savoir comment Malte est devenu le point de rencontre de traditions si diverses d'origine, et par quelles voies elles se sont transmises; malheureusement les contes venus de l'Orient sont nombreux en Europe même, et le folk-lore de l'Italie méridionale ne s'oppose pas nettement à celui de l'Afrique septentrionale.

Quoi qu'il en soit la couleur locale est des plus curieuses : l'arabe et l'italien, l'orient et l'occident s'y mêlent intimement. Le roi est indifféremment appelé re, prinčep, ou sultán, le sorcier se nomme toujours saḥḥar, mais le dragon serp ou dragún; enfin le pacha du sultán porte le titre de gvernatúr. Les noms propres sont à l'avenant. Seule la religion catholique couvre d'une teinte uniforme tous ces éléments bariolés la messe est mentionnée à tout propos, les inconnus sont interpellés par les noms de Céppi (Joseph) et Mári (Marie), comme en Afrique du Nord par celui de Mhammed, le rosaire exerce son influence salutaire et le moment de l'Ave Maria sert à déterminer l'heure.

C'est donc aux folkoristes autant qu'aux linguistes que s'adresse le travail de M. Stumme; aux uns comme aux autres il offre des documents de premier ordre mis en œuvre avec science et habileté.

Rob. GAUTHIOT.

NAHUM SLOUSCHZ (BEN-DAVID). - La Renaissance de la littérature hébraïque (1743-1885). Essai d'histoire littéraire. Thèse présentée à la Faculté des Lettres de Paris pour le doctorat de l'Université.!- Paris, Société nouvelle de librairie et d'édition, 17, rue Cujas, 1902. In-8, x1-228 pages.

On sait le succès prodigieux qu'eut au xvi siècle le philosophe socialiste Thomas Morus; il consigna dans un précieux ouvrage sa conception de la vie, du travail et de l'oisiveté; il proclama le droit de chacun à l'instruction et l'égalité absolue des sexes; il voulait que la femme fût prêtre et soldat; et il nomma son livre Utopie (De optimo reipublicae statu deque nova insula Utopia). Morus fit école et Morelly publia à son tour un certain nombre d'utopies; il décrivit dans un poème en 14 chants le Naufrage des îles flottantes, qui ne sont autres que les multiples préjugés qui flottent autour de nous. Sa Basi

liade est la peinture d'un peuple heureux parce qu'il est régi par les lois de la nature. Pour peu que l'on poursuive l'enquête dans la succession du temps, il semble bien qu'il faille ranger dans la même catégorie la thèse de doctorat èslettres de M. S.

Le titre semblerait annoncer un ouvrage de linguistique et de philologie, ou tout au moins un livre de littérature où ces deux sciences occuperaient une place prépondérante; un parallélisme pourrait être établi entre la jeune littérature hébraïque, que l'on veut nous faire connaître, et les antiques documents littéraires, historiques et religieux renfermés dans la Thorah, dans les Nebiim. et dans les Ketoubim; de la sorte, le lecteur se ferait aisément une idée des différences et des ressemblances de ces deux littératures et il prendrait plaisir, en lisant l'ouvrage de M. S., à constater en quoi consiste la renaissance, le rajeunissement des vieux prophètes et des antiques écrits de l'ancienne Alliance.

Tel n'apparaît pas le livre de M. S. Dès les premières pages, il s'insurge à la pensée de classer l'hébreu, à l'instar du grec et du latin, parmi les langues mortes; l'hébreu, comme le peuple qui le parle, n'a jamais été une langue morte; il a peut-être sommeillé; il a peut-être été dédaigné et méconnu en extrême-occident; mais le ghetto l'a toujours conservé, s'en servant comme d'un instrument à réveiller les masses « dans le sein même du judaïsme traditionnel », et c'est bien à tort que l'on présente la littérature hébraïque moderne comme rabbinique et casuistique; « elle est anti-dogmatique, anti-rabbinique..

Les contradictions, apparentes et réelles ne paraissent pas gêner grandement M. S. dans l'exposé de sa thèse ; il se peut que la nouvelle littérature hébraïque soit «< la reprise de l'ancienne littérature des humbles, des déshérités, d'où sortit la Bible. » Il est loisible de se demander jusqu'à quel point la Bible est sortie de la littérature des humbles; celle-ci a bien plutôt donné naissance aux écrits apocalyptiques post-exiliens, qui engendrèrent à leur tour et préparèrent les conceptions messianiques; mais à côté des Ebionim, il y avait les Pharisiens, les Sadducéens, que l'on ne flatterait pas grandement en les qualifiant de déshérités, et dont la dominante n'était pas précisément l'humilité.

Si « le retour à la langue et aux idées du passé glorieux marque une étape décisive dans le chemin agité du peuple juif », on ne comprend pas très bien comment la littérature hébraïque moderne « fournit des documents précieux sur la marche que les idées nouvelles ont suivie pour pénétrer dans un milieu qui s'est toujours montré réfractaire aux courants d'esprit venus du dehors. Cette lutte, qui dure depuis plus d'un siècle, de la libre-pensée contre la foi aveugle, du bon sens contre l'absurdité consacrée par l'âge, exaltée par les souffrances, nous révèle une vie sociale intense, un choc continuel d'idées et de sentiments. » Ainsi la marche en avant des idées nouvelles consiste dans le retour au passé; c'est une façon d'avancer qui s'appelle reculer, en français. Enfin, et pour ne pas multiplier les citations, relevons encore ce trait: parmi

les écrivains de la nouvelle école, il en est des rêveurs optimistes «<< dignes disciples des prophètes »; les écrits prophétiques ne constituent pas à eux seuls la Bible; dans ce livre, précieux entre tous, les ouvrages ne manquent pas, où la note pessimiste, même très fortement accentuée, est loin de faire défaut.

L'enquête de M. S. porte sur plusieurs pays d'Europe, l'Italie, l'Allemagne, la Pologne, l'Autriche, la Russie; son livre est rempli de faits intéressants, à peu près inconnus du grand public; il valait la peine de les signaler, par des analyses détaillées et des extraits bien choisis; il y a lieu surtout de féliciter M. S. d'avoir écrit dans un langage nerveux, chaud, passionné, et dans une langue qui n'est pour lui qu'une langue d'adoption. Son style appelle la convicton de la part du lecteur; peut-être se laisse-t-il quelquefois entraîner à des expressions qui dépassent sa pensée, mais que l'on doit pardonner chez un écrivain maniant une langue étrangère.

M. S. soutient une thèse les Juifs, par trop maltraités, surtout en Russie et en Pologne, ne peuvent plus songer à une assimilation avec l'élément slave; il leur faut quitter ces terres inhospitalières et regagner le pays de leurs pères, la terre des rêves ; il leur faut reconstituer un état juif en Palestine, où ils vivraient la vie qui leur convient. Il leur faut, en un mot, réaliser à la lettre, le programme du sionisme. N'est-ce pas là, du fait de l'auteur, se ranger sous le sceptre du roi des Utopies et faire courir à ses projets le risque d'un naufrage avec les Iles Flottantes?

F. MACLER.

Dr OTTO. STOLL.

Suggestion und Hypnotismus in der Völkerpsychologie. 1 vol. in-8 de 738 pages. Leipzig, Veit et Cie, 2e édition, 1904. Prix, 16 Marks.

La deuxième édition de cet important ouvrage diffère de la première, parue en 1894, non seulement par l'adjonction d'un chapitre nouveau sur les phénomènes psychiques collectifs sous la Révolution française mais aussi par le commentaire critique des textes étudiés.

Dans son ensemble, l'œuvre est de premier ordre; on y trouve rassemblés beaucoup de faits bien choisis, typiques, contrôlés et commentés avec soin, de telle sorte que la lecture du livre terminée, on a acquis une vue suffisante de la complexité de la vie psychique des collectivités de régions et d'époques diverses.

Mais voilà: il faut avoir du courage pour lire en entier ce volume où la description, l'analyse et l'explication des faits sont mises sur le même plan; il faut avoir du courage aussi pour, avec l'aide seulement d'un index absolument insuffisant (de 4 pages et demie) et des en-têtes de page, se reporter à chaque instant d'un passage à un autre notés avec soin au cours de la lecture et feuilleter sans cesse, afin de se rendre compte des diverses formes d'un même phénomène. Qui voudrait, par exemple, étudier l'extase, le chamanisme, les métamorphoses,

les hallucinations auditives, les procédés de suggestion, etc., chez les divers peuples devrait lire toutes les 723 pages de texte ! C'est là un grave défaut de plan: car il ôte précisément à l'ouvrage ce caractère de répertoire pour quelques années définitif que l'auteur espérait lui voir reconnaître.

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Ainsi un même phénomène est successivement étudié chez les différents peuples, le classement des faits étant géographique dans les quatorze premiers chapitres et historique dans les sept suivants; quant au dernier chapitre, Conclusion, il est loin de résumer l'ouvrage et de présenter une synthèse des nombreux faits présentés. Les éléments de la synthèse se trouvent dans le corps même du livre, un seul fait typique offrant souvent à l'auteur l'occasion d'une large généralisation dont les preuves sont données ultérieurement, çà et là. On pourrait à l'aide de coupures adroites et sans presque avoir à formuler de transitions, extraire des divers chapitres les éléments d'un chapitre final vraiment synthétique. Le mode d'exposition adopté par l'auteur est permis dans une monographie mais ici, tout comme dans le Rameau d'or de J. G. Frazer, ou dans la Legend of Perseus de Sidney Hartland, il serait nécessaire, par un arrangement typographique (en employant par exemple des caractères différents) de nettement différencier l'exposé méthodique de la description critique et de l'analyse. Voici entre autres un exemple de la méthode de M. Stoll: le chapitre IV est consacré à l'étude approfondie des phénomènes de suggestion et de psychopathie chez les Hindous de l'antiquité et modernes : pp. 63-65 une analyse du Yoga se termine par cette vue d'ensemble: « Les soi-disant forces surnaturelles que les adeptes du Yoga se sont soumises avec tant de soin ne sont pas l'apanage exclusif des Yoghins hindous mais sont au contraire les attributs ordinaires des magiciens de tous les pays et de toutes les époques, d'après leur propre affirmation et d'après la croyance générale du peuple ». Il eût donc été naturel d'étudier précisément dans un chapitre spécial toutes ces forces domestiquées par les magiciens en gardant comme point central la théorie, tant poussée dans le détail, du Yoga. De même l'étude des actes des fakirs est interrompue (p. 83) par un excellent développement de cette idée générale « C'est un fait intéressant et très important au point de vue ethnopsychologique qu'il existe, même parmi les personnes intelligentes et instruites, bien mieux, savantes, de nombreux individus qui deviennent, dans certains cas tant soit peu extraordinaire, le jouet d'illusions ou même d'hallucinations »... et que (p. 85) le manque

1. 1, Introduction; II, phénomènes de suggestion chez les Ouralo-altaïques ; III, chez les Chinois et les Japonais; IV, chez les Hindous; V, chez les Indonésiens et les Australiens; VI, chez les indigènes des Antilles; VII, au Mexique et dans l'Amérique Centrale; VIII, dans l'Iran ancien, en Mésopotamie et chez les Hébreux; IX, dans l'Ancien Testament; X, aux premiers siècles du christianisme; XI, dans l'Islam; XII, chez les populations africaines; XIII, dans la Grèce ancienne; XIV, en Egypte.

2. Chapitre XV-XXI: les phénomènes de suggestion dans l'Europe occidentale.

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