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tous les mythes', en attendant que le sabre apparaisse à tous comme l'âme du guerrier, le miroir comme l'âme de la femme, mystérieusement transmises et prolongées dans les choses qui sont le plus chères à leur cœur. A plus forte raison en sera-t-il de même, enfin, des objets illustres qui ont joué un rôle éclatant dans la légende. Tous seront animés d'un pouvoir spirituel'; et parmi eux, beaucoup deviendront des dieux ou tout au moins des fétiches, quand ils ne seront pas les deux à la fois.

quiconque touchait au lit d'un absent appelait le malheur sur sa tête (voir une poésie du Manyóshiou, dans Chamberlain, Classical poetry of the Japanese, p. 79; et cf. la coutume, encore existante, d'attendre au moins un jour pour balayer les nattes de la personne partie en voyage, puis d'apporter son repas aux heures habituelles comme si elle était toujours là). Enfin, pour le lit impérial, cérémonies particulières lors du service de l'Oh-tono Hoghaï (description de cette fête religieuse, au Ixe siècle, dans T, IX, part. 2, p. 184).

1) N, I, 24, 25, 47, 48, 52, 96, 98; II, 425. Nous y reviendrons à propos de la Magie.

2) Conceptions tournées en proverbe à l'époque féodale, mais qu'on trouve déjà en germe dans la mythologie (voy., pour le miroir, K, 109, N, I, 341, pour le sabre, K, 74, 220, etc.), et pareillement dans le culte (R V, 187-188).

3) Par exemple: K, 74 (le sabre de vie, l'arc et les flèches de vie).

4) Exemples: K, 34 (le sabre d'Izanaghi), 40-41 (son bâton, les diverses parties de son vêtement, ses bracelets), 43 (son collier), 63, 99, 135 (divers sabres), etc.

5) C'est ce qui arrivera presque toujours lorsqu'on pourra croire que l'objet historique a été conservé. Exemple: la pierre que l'impératrice Djinnghô mit dans sa ceinture pour retarder sa grossesse, au moment de son expédition en Corée (K, 233), et qu'on adorait dans un village de Kioushiou (ibid., 234).

6) En ce cas, nous aurons des dieux dont un fétiche représente le corps apparent. Exemple : le dieu-sabre Také-mika-dzoutchi (voir plus haut, t. L, p. 173, n. 3). De même, le dieu Foutsou-noushi, qui d'ailleurs se confond peut-être avec le précédent. Après avoir vaincu les rebelles terrestres, il éprouve le désir d'aller rejoindre les dieux d'en haut: il laisse donc derrière lui son bâton, son armure, sa lance, son bouclier, son sabre, ses pierres magiques et, montant sur un nuage blanc, il s'élève aux cieux. (Tradition du Hitatchi Foudoki; cf. Satow, dans T, VII, part. 4, p. 413 seq.). C'est l'apothéose normale du guerrier, dont le sabre favori demeurera le fétiche visible. Kaempfer le constate, au XVI° siècle : <«< Ils conservent encore dans quelques-uns de leurs Temples des épées et d'autres armes, qu'ils regardent comme des restes de ces anciens temps, et ils croyent que ces héros demi-divins se sont servis de ces armes-là pour vaincre et détruire ceux qui troubloient la paix et la tranquillité du Pays. Les sectateurs de la Religion du Sinto ont une vénération particulière pour ces

Des objets artificiels aux actes humains, qui sont euxmêmes divinisés', la transition est insensible; elle l'est encore plus lorsqu'on passe des actions humaines à l'homme vivant, que nos Japonais primitifs adorent aussi en maintes rencontres, et dont le culte à son tour prépare d'une manière directe la religion des morts'.

(A suivre.)

M. REVON.

saintes reliques, et il y en a même qui croyent qu'elles sont animées de l'Ame de ceux à qui elles appartenoient autrefois. » (Op. cit., II, 7.)

1) K, 41-42 (les diverses phases du bain d'Izanaghi), 114 (celles de la noyade de Sarouta), etc. Cf. la même conception, bien plus développée encore, dans la religion romaine (Gaston Boissier, Rev. d'hist. des. religions, IV, 309, etc.).

2) L'âme primitive s'incline devant les puissances humaines comme devant les forces de la nature; le germe religieux est le même dans les deux cas; de sorte qu'ici encore nous avons une transition entre le naturisme et l'animisme, le culte immédiat de l'homme visible engendrant le culte plus abstrait de l'homme mort.

REVUE DES LIVRES

ANALYSES ET COMPTES RENDUS

E. H. BERGER. - Mythische Kosmographie der Griechen. Leipzig, Teubner, 1904, grand in-8°, 41 p.

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M. Berger s'était chargé, pour les suppléments du Dictionnaire de Roscher, de l'article Cosmographie mythique des Grecs. Il en corrigeait les épreuves lorsque la mort le frappa, à la suite d'une cruelle maladie. C'est à cette cause, sans doute, qu'il faut attribuer l'insuffisance de sa dernière œuvre, inférieure à ce qu'on était en droit d'attendre, en cette matière favorite de ses études, de l'auteur de la remarquable Histoire de la connaissance scientifique de la Terre chez les Grecs (1887-93). Le défaut essentiel de ce mémoire est qu'il ne répond pas aux promesses du titre. On s'attend à trouver exposés, classés, expliqués les éléments cosmographiques, si nombreux et si confus, dans les mythes grecs; on ne trouve qu'une dissertation, d'ailleurs pleine d'aperçus ingénieux, sur quelques points de géographie plutôt que de cosmographie, non point chez les mythographes anciens, mais chez les premiers poètes, Homère et Hésiode.

C'est sur Homère surtout que porte l'étude de M. Berger. A première vue, les textes homériques qui se rapportent à la connaissance de la terre et du monde semblent peu conciliables, voire contradictoires. C'est qu'ils ne présentent pas une conception définie d'une époque donnée, mais une série de conceptions qui s'échelonnent à travers les deux ou trois siècles de poésie épique qui nous ont donné notre Iliade et notre Odyssée. Ainsi, les dieux homériques ont, à l'origine, habité les hautes cimes; chaque peuple les a placés sur la montagne la plus élevée de la région qu'il habitait; ainsi, les Achéens, qui ont long

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temps vécu le long de la côte thessalienne, de l'Olympe à l'Othrys, les ont logés au sommet des trois mille mètres de l'Olympe. Avec la suprématie des Achéens, leur montagne des dieux l'emporte sur ses rivales, s'impose avec eux en Grèce, passe avec eux en Asie. Là, sur les confins de la Phrygie, par assimiliation peut-être d'un nom indigène analogue, paraît un nouvel Olympe, plus proche de Troie; le rationalisme grec, de bonne heure à l'œuvre, a pu y transférer le siège des dieux, plus à portée ainsi du théâtre de la guerre. Mais déjà, grâce à cette première confusion, la notion d'un Olympe défini se perd. L'Olympe n'est plus thessalien ni phrygien; où qu'il soit, il est la montagne des dieux et n'est plus que cela; il perd tout rapport avec la terre; sa cime inaccessible disparaît dans les nuages et les dieux, laissant toute attache terrestre pour s'établir dans le vaste Ouranos, ne gardent de leur séjour primitif que le nom d'Olympiens. Mais le vieil Olympe subsiste chez Hésiode; le poète d'Askra chante pour ces Béotiens qui, avant de descendre en Béotie, ont sans doute succédé aux Achéens en Thessalie; il conserve Zeus et les jeunes dieux sur l'Olympe thessalien, campés en face des vieux dieux vaincus assis plus bas au sud, sur l'Orthrys, qui fut sans doute la montagne divine de quelque peuple soumis par les Béotiens.

Plus difficile à suivre est l'évolution du concept du monde chez Homère. Avant qu'il ne place les dieux dans le ciel, l'aède ne songe qu'à la terre; il se la figure plate, elliptique. L'Océan l'enveloppe comme un anneau; sur ses confins, le royaume des morts. Mais le sol grec est déchiré de fissures profondes où s'engouffrent les eaux, Katavothres, Képhalaria. Où vont ces eaux? Sous la terre où l'on marche. Il faut donc que la terre ait un dessous; conçue d'abord comme un disque, elle s'arrondit alors en œuf. Courbe, elle ne peut être comprise que dans un corps courbe; en vertu de ce raisonnement, le ciel est conçu comme une voûte dont les bords se confondent au loin avec l'Océan; mais il faut qu'une voûte ait des supports, et la voûte céleste ne peut être soutenue que par des piliers; ces piliers, bientôt personnifiés par l'anthropomorphisme grec, seront les montagnes qui ferment l'horizon du navigateur hellène et que repousse de plus en plus loin le progrès de ses explorations. Atlas ne s'arrêtera qu'aux Colonnes d'Hercule; si ses épaules portent le ciel, ses pieds plongent dans l'Océan; il est autant dieu de la mer que du ciel et ses filles sont aussi bien l'enchanteresse Kalypso 1) A laquelle s'ajouta sans doute celle avec l'Olympe ionien au nord-est de Smyrne.

et les charmeuses Hespérides, nymphes de l'Océan, que les célestes Pléiades toujours pluvieuses, car elles sortent de la mer à la fin de l'automne; et la mer d'où sortent ces Atlantides sera, pour le premier Hellène qui y pénétrera, l'Atlantique. C'est là que se couche Hélios, son orbite journalier décrit; mais le matin il reparaît à l'Orient; c'est donc que, la nuit, il a passé sous la terre, décrivant dans un autre ciel un orbite semblable. L'époque homérique a admis par rationalisme, audessous de la terre, quelque chose de vaguement semblable à ce qu'il y avait au-dessus; mais elle n'a jamais voulu admettre que cet hémisphère eût comme le sien, le privilège d'être éclairé. Hélios ne brillait qu'en traversant l'Ouranos; de l'autre côté, c'était le Tartare, région des ténèbres éternelles, Erébos avec toute son horreur. Naturellement, quand s'assombrit la conception du séjour des morts, des extrémités de la terre il passa sous terre; les fleuves qui s'engouffraient sous le sol, comme le Styx, devinrent des fleuves infernaux; les régions où le feu central s'échappait en fumerolles, soufrières, volcans, comme aux Champs Phlégréens, devinrent des bouches des enfers. Mais toujours, par terreur de la nuit froide du Tartare, les Grecs, s'efforcèrent de maintenir aux bords de l'Océan, au doux pays où se couche Hélios, un séjour des bienheureux, prairies de l'Élysée, jardins des Hespérides, ile Erytheia. L'île de Kalypso1 dans l'Odyssée a déjà les traits d'une pzzápwv vñsos.

1) A propos de Kalypso, une observation originale de Berger permet de résoudre un des plus difficiles problèmes de la géographie homérique. Fille d'Atlas, on est tenté de la placer au voisinage des Colonnes d'Hercule; par conséquent, d'Ogygie à Ithaque, Ulysse devrait, nous semble-t-il, naviguer vers le nord-est; au contraire, le texte odysséen, en indiquant qu'il doit constamment tenir la Grande Ourse à sa gauche, implique qu'il navigue au sud-est. Pourtant, il arrive en vue d'lthaque. C'est donc qu'Ogygie n'est point située au sud, mais au nord d'Ithaque, ou plutôt, comme le dit Berger, que l'aède homérique, à qui nous devons cet épisode, connaissait les différences climatériques en longitude, mais non en latitude. Aussi peut-il décrire Ogygie comme un pays chaud à flore luxuriante, parce qu'elle est à l'Occident, c'est-à-dire voisine du royaume du soleil; il lui importe seulement qu'elle soit à l'ouest d'Ithaque; nord ou sud lui est indifférent. Il est donc antérieur à l'aède des Lestrygons, qui a ouï parler des nuits boréales; antérieur à ceux qui connaissent l'Italie, car il ne sait manifestement pas que le chemin sud-est d'Ogygie à Ithaque est barré par la péninsule Italienne ou, s'il la connaît, il la remonte au-dessus du 40° de latitude. Quant à l'autre difficulté de ce même voyage arrivé en vue d'Ithaque, Ulysse est jeté par le vent du nord vers Phéacie-Corfou qui est au nord d'Ithaque, elle provient de ce que l'épisode de la vue d'Ithaque vient d'un récit différent maladroitement intercalé dans le premier ce Borée est bien le vent qui doit pousser Ulysse d'Ogygie vers Ithaque; l'arrangeur a oublié de le

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