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sait lire dans l'épitre de Clément » (1). Des deux côtés, même zèle immodéré pour la résurrection des morts. Des deux côtés, indice révélateur, un curieux petit conglomérat biblique : J'ai trouvé David, homme selon mon cœur où se combinent le Psaume LXXXIX, 21 (j'ai trouvé David...) et I Samuel XIII, 14 (David, homme selon mon cœur) (Act. XIII, 22; Clément XVIII, 1).

Le second auteur des Actes des Apôtres paraît être aussi le correcteur des épîtres pauliniennes (2) l'auteur ou le correcteur des épîtres pastorales (3), le second rédacteur du quatrième évangile (4). Tout ce grand travail de refonte, d'adaptation, d'atténuation, appliqué à plusieurs livres éclatants et forts mais dangereux, ne pourrait-il être l'oeuvre opportune du sage Clément ?

Quant à Luc, c'est le nom qui a été mis en avant après l'achèvement du livre pour désigner le disciple de saint Paul qui dit nous en certains passages et que le premier auteur avait laissé anonyme. Ce nom figurait dans l'épître aux Colossiens (IV, 14) et dans l'épître à Philémon (24). Au premier endroit fut ajoutée la désignation de médecin bien-aimé, ὁ ἰατρὸς ὁ ἀγαπητός, qui donne une précision intéressante mais peu sûre (5). Luc, prétendu médecin de saint Paul, devint le commun prête-nom des deux auteurs qui, l'un combattant l'autre, ont bâti les Actes des Apôtres.

P.-L. COUCHOUD et R. STAHL.

(1) Loisy, p. 117.

(2) Voir La première édition de saint Paul dans la Revue de l'hist. des relig. 1926 p. 259.

(3) Voir plus haut p. 18 et p. 48, n. 2.

(4) Voir H. Delafosse. Le quatrième évangile, Paris 1925 p. 47-127. (5) La première édition de s. Paul, p. 260.

LA LETTRE DE CLÉMENT ROMAIN AUX CORINTHIENS

La lettre de Clément Romain aux Corinthiens a été écrite à la suite de graves troubles survenus dans l'église de Corinthe. Les chrétiens de cette ville avaient destitué leurs ministres et établi à leur place des hommes qui les avaient séduits. La lettre de Clément leur montre la faute dont ils se sont rendus coupables et les conjure de rentrer dans le droit chemin dont ils se sont écartés. Elle exhorte aussi les ministres intrus à céder la place aux ministres destitués et à se retirer.

Jusqu'en 1875 on ne connaissait la lettre de Clément Romain que par le manuscrit grec Alexandrinus, dans lequel manquaient six chapitres situés à la fin de la lettre (de LVII, 6 à LXIII inclusivement). Depuis 1875 ont été publiés successivement un second manuscrit grec, une version latine, une version syriaque et une version copte qui (cette dernière version exceptée) donnent le texte complet.

I. Elle est écrite au nom de l'église romaine.

Voici le titre de la lettre :

L'église qui habite Rome à l'église qui habite. Corinthe. Aux élus sanctifiés selon la volonté de Dieu par notre Seigneur JésusChrist.

Voici le début :

Les calamités soudaines et réitérées qui nous ont frappés sont cause, frères, que notre attention se tourne un peu tard vers votre

situation regrettable, bien-aimés, vers cette sédition déplacée chez les élus de Dieu, odieuse et impie que quelques hommes téméraires et insolents ont soulevée...

Et voici la fin:

Nous avons envoyé vers vous des hommes fidèles et sages qui, depuis la jeunesse jusqu'à la vieillesse, ont vécu sans reproche au milieu de nous. Ils seront témoins entre vous et nous. Nous avons agi ainsi pour vous montrer que toute notre préoccupation à été et est de voir la paix rentrer promptement chez vous. Que Dieu qui voit tout, qui est le maître des esprits et le seigneur de toute chair, qui a choisi le Seigneur Jésus-Christ, qui nous a choisis par son intermédiaire pour être son peuple particulier, donne à toute âme qui invoque son nom glorieux et saint la foi, la crainte, la paix, la patience...

Dans les lignes qui précèdent l'église romaine, c'est-à-dire la communauté des chrétiens de Rome, a seule la parole, est seule à intervenir. La lettre nous donne, d'un bout à l'autre, le même spectacle. Denys de Corinthe, qui la mentionne vers 170, nous dit qu'elle a été rédigée par Clément. Son renseignement doit être exact. Mais nous constatons que, pas une seule fois, le rédacteur ne se montre ni même ne se laisse deviner. La lettre de Clément Romain aux Corinthiens a été écrite au nom de l'église romaine. C'est une lettre collective.

II. - La primauté de l'église romaine.

Comment l'église de Rome est-elle intervenue dans les affaires de Corinthe? Les victimes de la rébellion l'ont-elle appelée à leur secours? Les insurgés lui ont-ils demandé son appui? La réponse à ces questions se trouve dans le texte suivant (XLVII. 7):

Le bruit de cette révolte n'est pas parvenu seulement jusqu'à nous. Il est arrivé aux oreilles des païens eux-mêmes; en sorte votre folie provoque le blasphème contre le nom du Seigneur.

D'où il suit que l'église romaine n'a été informée des événements de Corinthe ni par les auteurs de la révolte ni par ses

victimes, mais par la rumeur publique. C'est donc de sa propre initiative qu'elle a marché à la défense du droit outragé.

Cette initiative l'a-t-elle prise en vertu d'un mandat supérieur et pour obéir aux prescriptions du Christ qui l'aurait chargée du maintien de l'ordre? Dans cette hypothèse elle a dû exhiber ses titres, mentionner les pouvoirs divins dont elle était investie et surtout parler avec autorité. Voyons-là à l'œuvre et notons son langage. Après avoir constaté les ravages causés par la jalousie chez les Corinthiens, elle ajoute (VII, 1):

Nous vous écrivons ceci, chers amis, non seulement pour vous rappeler à l'ordre, mais pour nous instruire nous-mêmes, car nous sommes dans la même arène que vous : le même combat nous attend.

Et. après avoir prouvé l'origine apostolique du clergé, elle ajoute (XLIV, 3) :

Nous estimons qu'il n'est pas juste de rejeter du ministère ceux qui ont été établis par les apôtres ou, plus tard, par d'autres personnages éminents avec l'approbation de l'église entière... Ce n'est pas une faute légère que de démettre de l'épiscopat des hommes qui ont offert les dons saintement et correctement.

Vers la fin de la lettre (LVI, 1) nous lisons:

non

Acceptez

Intercédons pour les coupables, afin qu'ils se soumettent pas à nous certes, mais à la volonté de Dieu... LVIII, 2 notre conseil et vous ne vous en repentirez pas... S'il en est quelques-uns qui refusent d'écouter les paroles que Dieu a dites par nous, ceux-là doivent savoir qu'ils se mettent dans un grave péril... LXIII, 2 Vous nous procurerez joie et allégresse si, tenant compte de ce que nous Vous avons écrit par le Saint-Esprit, vous coupez court à l'emportement coupable de la rivalité, conformément aux conseils de paix et de concorde que nous vous avons donnés dans

cette lettre.

Nous apprenons que la lettre a été écrite par le Saint-Esprit Mais, au quatrième siècle, l'empereur Constantin dira, dans sa lettre à l'église d'Alexandrie qu'il a convoqué le concile de Nicée sous l'inspiration du Saint-Esprit; le concile romain de 378 attri

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buera à l'inspiration du Saint-Esprit les mesures prises par Gratien relativement à l'Eglise; et le pape Damase décernera à l'évêque de Thessalonique un brevet d'inspiration par le SaintEsprit (1). Dans ces temps anciens l'inspiration du Saint-Esprit était une faveur banale dont il n'y a pas à tenir compte. Il n'y a pas lieu non plus d'attacher de l'importance au texte qui parle des paroles que Dieu a dites par nous. Ces paroles que Dieu a dites ce sont les nombreux oracles scripturaires cités dans la lettre, oracles qui sont parvenus aux Corinthiens par le canal de l'église romaine, mais qui émanent de Dieu. Quand on a écarté les paroles dites par Dieu et l'inspiration « par le Saint-Esprit », il reste que l'église romaine donne des conseils, mais que, pas une seule fois, elle n'impose des ordres. Et, quand il lui arrive de réclamer la soumission, elle précise que l'on doit cette soumission non à elle-même, mais à la volonté de Dieu. La lettre de Clément Romain se présente comme un acte de charité; elle n'est à aucun degré un acte d'autorité.

Ce qui est vrai, c'est que, pour porter secours au malheureux, il faut lui être supérieur en force et en richesse. L'église romaine qui essaie de sauver sa sœur de Corinthe, possède la santé spirituelle dont cette dernière est privée. Elle se sent forte, puissante ; et elle emploie sa force et sa puissance à faire du bien autour d'elle. Voilà la primauté dont témoigne la lettre de Clément Romain. C'est une primauté de fait, qui n'a aucun lien avec l'oracle Tu es Pierre dont les pièces pontificales ne cesseront plus tard de rebattre les oreilles.

III. L'origine apostolique du clergé.

Les chrétiens de Corinthe avaient changé le personnel de leur clergé. Ce procédé révolutionnaire se rattachait à des causes qui seront bientôt démêlées. Il entraînait à sa suite des conséquences. La lettre condamne les mobiles de la révolte. Elle s'occupe aussi des conséquences. Mais c'est seulement dans la dissertation qui

(1) Turmel, Histoire du dogme de la papauté, p. 212, 222, 330, 331, 447.

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