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CHRONIQUE

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Pour fêter le cinquantenaire de sa fondation, l' Association pour Tencouragement des Etudes grecques» vient de publier un volume de Mélanges qui constitue le tome XXII de la Revue des Études grecques. Nous devrions citer tous ces articles d'une haute tenue scientifique, mais il faut nous limiter à ceux qui touchent à la religion. Ils sont d'ailleurs nombreux et offrent un vif intérêt, M. Adhemar d'Alès étudie la fortune du mot oikonomia dans la langue théologique de saint Irénee, M. E. Babelon, d'après une obole d'Astacos en Acarnanie au type de la ventouse, reconnaît que le culte d'Asclepios était en honneur dans cette cité. · M. Victor Bérard met en garde, contre le texte reçu de l'Odyssée, les exégétes qui voudraient y chercher les élements d'une messe noire de Circé. M. J. Bidez critique quelques opinions de M.C. Praechter concernant Jamblique de Chalcis et sa réforme du mysticisme païen au iv siècle qu'il réussit à adapter aux traditions religieuses de l'Orient. Né vers 250 au plus tard, il mourut vers 325-326 et c'est d'Apamée de Syrie qu'il fit rayonner son action. Il ne fut pas un simple théoricien, opé rant la purification des âmes a la manière de la philosophie grecque. « C'est bien lui qui fut le fondateur des « mystères platoniciens», dont les fantasmagories impressionnèrent si vivement Julien dans les cryptes d'Ephèse. M. Emile Bourguet etudie la disposition donnee aux offrandes des Argiens à Delphes. M. Maurice Croiset établit le rôle d'Apollon dans les Eumenides d'Eschyle. M. Franz Cumont expose comment Plotin détourna Porphyre du suicide et reconnait que les idées de Porphyre sont dominées par les croyances religieuses de son temps qui interdisaient le suicide (judaïsme romain, christianisme et paganisme de Syrie). Macrobe explique « que si l'âme est arrachée par la force de son corps, elle emporte une portion de matière et est par suite impure. Étant nécessairement au moment suprême en proie à une passion violente, elle est ainsi troublée et polluée à l'instant même où se détermine son sort futur. » Cette explication remonte aux Pythagoriciens.

M. W. Deonna part d'un vase italiote montrant un jeune garçon aux prises avec un saurien pour étudier la valeur religieuse des sauriens andro phages et pour mettre en évidence la relation que les croyances populaires ont établies entre le saurien et le batracien. Ces animaux auraient, à la fois,

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une fonction infernale et un caractère céleste : «L'animal infernal et androphage est en même temps céleste, et ces deux notions sont unies dans les monuments antiques et chrétiens ». M. F. Dürrbach donne la première édition complète de la hiera syngraphè de Délos, c'est-à-dire de la loi qui réglait le régime des fermages des domaines sacrés. Un décret de la ville thessalienne de Gonnoi sert de point de départ à M. Paul Foucart pour définir les fonctions des theores. Mais l'intérêt du décret est surtout d'établir définitivement que les Eleusinia et les Mystères étaient deux fêtes distinctes et indépendantes l'une de l'autre, ce que M. Foucart avait soutenu dans les deux mémoires bien connus qu'il a consacrés aux mystères d'Eleusis. Suit un exposé très précis de la fête des Eleusinia d'une si grande importance pour Athènes. Enfin, M. Paul Foucart explique que les Eleusinia et les Mystères marquent deux périodes dans l'histoire de la religion de Déméter à Eleusis. La première fête, purement agraire, commémore le don de l'agriculture que Déméter fit aux populations de l'Attique; il n'y a aucune invraisemblance à ce que cette fète remonte au règne des Cécropides, au temps où les Pharaons de la XVIIIe dynastie faisaient sentir leur influence dans le bassin de la mer Égée. Le second bienfait de Déméter est l'initiation qui intervient « vers le vi ou le vi° siècle à la suite d'un nouveau contact avec l'Égypte. Il consiste dans l'introduction de mystères, imités de ceux d'Isis »; c'est-à-dire de croyances nouvelles sur la vie future. En discutant le problème de la frise du Parthénon, M. Gustave Fougères a écrit un intéressant chapitre d'architecture religieuse. Phidias est avant tout un sculpteur: « La frise du Parthenon est la transposition en un motif grandiose de décoration architecturale d'un tableau de piété couramment exécuté dans les ateliers de praticiens, specialistes de la petite imagerie religieuse à l'usage du public dévot ». M. Bernard Haussoullier étudie, à la lumière des textes épigraphiques, le sacerdoce de Dionysos à Milet et notamment le rôle de la prètresse de ce dieu en tant qu'elle conduisait à la montagne son thiase de Bacchantes. M. Léon Heuzey publie et traduit un jugement synodal en faveur du couvent de la Panaghia des Grandes-Portes qu'il eut l'occasion de copier en 1858, au cours d'une excursion en Thessalie. M. Théophile Homolle soulève un curieux et grave problème d'iconographie religieuse en signalant la ressemblance de l'omphalos delphique avec quelques représentations égyptiennes. Après Eleusis, Delphes aurait-elle subi les influences égyptiennes au point d'emprunter à l'Egypte l'omphalos accosté des deux aigles et associé au serpent? La difficulté résulte de ce qu'on ne paraît pas bien connaître ni à Delphes ni en Égypte la valeur des images à comparer. Quelle est la part d'interprétation personnelle dans les explications fournies par les égyptologues? A examiner la fig. 2, il est surprenant qu'on puisse interpréter comme figurant le soleil un élément triangulaire couronné d'une tête de femme. Et sur quoi s'appuie l'explication, comme chambre voûtée, de

l'image analogue à l'omphalos accosté des deux oiseaux? Il semble plutôt que l'objet en forme d'omphalos figuré dans le Livre de l'Hadès, dans les tombeaux ou sur des sarcophages «< est la châsse funéraire et sacrée d'Osiris, dieu de la mort et de la résurrection; ...il est placé sous la garde vigilante et tendre des oiseaux, sous celle aussi du serpent son compagnon, parmi les embûches des genies malfaisants et du serpent hostile. » Ces indications appellent l'attention sur les textes anciens qui regardent l'omphalos de Delphes comme la tombe de Dionysos et M. Homolle groupe des faits en nombre impressionnant pour conclure que Dionysos ayant précédé Apollon à Delphes, il est plausible d'admettre a que l'adyton était la chapelle de Dionysos, et l'omphalos sa châsse funéraire ». Or, Dionysos était couramment identifié à Osiris dès le temps d'Hérodote, mais probablement dès une époque beaucoup plus ancienne comme les mémo res de M. Paul Foucart sur les mystères d'Eleusis et le culte de Dionysos tendent à le démontrer. « Quelque valeur, ajoute M. Homolle, que l'on puisse ou doive accorder à cette démonstration générale, il convient de se tenir soigneusement en garde contre les duperies des ressemblances attribuables à l'universalité des faits du folklore, comme aussi contre les illusions possibles des témoignages les plus sincères de l'antiquité. » Toutefois, la question est posée et ne peut manquer d'amener à définir plus exactement les éléments en cause, M. Paul Monceaux relève des exemples de dialogue socratique dans les controverses de saint Augustin. M. E. Pottier décrit un beau lécythe à reliefs représentant les divinités d'Eleusis qu'il a fait entrer au Musée du Louvre. Il incline à reconnaître Apollon parmi les figures représentes, ce qui constitue une particularité remarquable. - M. A. Puech étudie les mythes dans la IX Olympique de Pindare. M. Salomon Reinach interprète un passage de Psellos comme nous conservant le résumé d'un mime byzantin qu'on pourrait intituler: Les mystères du paganisme dévoilés. M. Léon Robin étudie la doctrine de la réminiscence. M. Rostovtzeff expose des idées très neuves sur le culte de la Grande Déesse dans la Russie méridionale. Son interprétation des monuments découverts dans cette région est à retenir. La critique que fait le savant russe de la théorie exposée par Leonhard sur les Amazones est tout à fait convaincante: les explications rationalistes de Leonhard sont à écarter. Faut-il même comme le pense M. Rostovtzeff invoquer le culte de la Grande Déesse, les milliers d'hierodules des deux sexes qui vivaient autour de ses temples, remonter à un état social où la femme aurait joué un rôle prépondérant? M. R. écarte justement le mot de matriarcat dont on a fait un usage abusif, car le matriarcat à la manière de Giraud-Teulon n'a jamais existé. C'est probable en ce qui concerne le culte, moins en ce qui concerne l'état social; car il ne faut pas perdre de vue que le point de départ est tout à fait légendaire. Le premier noyau de légendes s'est développé en mythe en s'attachant à un centre cultuel. Mais la légende

et le mythe out en commun la recherche de l'exceptionnel et le renversement des valeurs; c'est pourquoi l'explication rationaliste leur convient si peu. Dira-t-on que le récit de Cronos avalant un caillou remonte à l'epoque où les hommes avaient un estomac d'autruche? Ne voit-on pas apparaître en plein moyen âge une legende arabe sur les Amazones franques : « Il y a parmi les Francs, assure un historien arabe des croisades, des chevalières qui portent la cuirasse et le casque; sous ce vêtement, elles se jettent dans la mêlée et ces maîtresses du gynécée se comportent comme le sexe fort'. » Ce n'est qu'une legende qui n'a pas trouvé le terrain favorable pour se développer en mythe, mais elle doit nous rendre prudents en ce qui touche les interprétations historiques ou à base sociale des Amazones de l'antiquité. A propos d'Astyanax, M. P. Roussel signale quelques caracteristiques des << dieux-enfants »>, notamment comme protecteurs de la cite.

Sous le titre Marsyas et les Phrygiens de Syrie, M. S. Schiffer a publié (Revue des Études Anciennes, 1919, p. 237 et suiv.) une ingénieuse élude qui nous parait bien aventurée dans ses conclusions. Le vocable sous lequel Damas est connu dans certains textes assyriens, Imerishu, est identifié à Marsyas dont le nom est appliqué a la vallée comprise entre le Liban et l'Antban. S'appuyant sur la demonstration de M. Salomon Reinach que Marsyas était primitivement un âne divin, on postule un culte de l'âne en Syrie.

M. l'abbé J.-B. Chabot poursuit dans le Journal asiatique, avril-mai 1921, p. 177 et suiv., la publication de ses Mélanges épigraphiques. Il faut signaler un nouveau fragment de tarif des sacrifices provenant de Carthage et surtou, une dédicace au dieu Shadrapha, Satrapès, que M. Clermont-Ganneau a mis en pleine lumière dès 1877 par son mémoire intitulé: Le dieu Satrape et les Phéniciens dans le Peloponese et dont il a retrouvé mention sur la grande stèle phenicienne de la collection de Clercq. M. l'abbe J.-B. Chabot groupe tous les monuments connus jusqu'ici mentionnant cette divinité qui reste assez énigmatique. Un bas-relief de Palmyre, aujourd'hui au British Museum paraît la rapprocher d'Esculape, dieu guérisseur, puisqu'il lui prête le bâton autour duquel s'enroule le serpent.

M. Paul Monceaux (Comptes-rendus Académie des Inscript., 1920, p. 290) fait connaître, d'après une inscription latine nouvellement découverte à Djemila (ancien Cuicul, en Algerie), les noms de plusieurs martyrs, martyrs locaux victimes des luttes religieuses d'Afrique. Les fouilles poursuivies, ces dernières années, à Djemila ont mis au jour un forum, un Capitole avec un autre forum,

1. Histor, orient. des croisades, IV, p. 434.

plusieurs autres temples, d'autres édifices dont un beau théâtre, de riches habitations à mosaïques et deux églises.

R. D.

Le dernier numéro de la Revue d'Histoire et de Littérature religieuses (juin 1921) renferme la fin de l'importante étude de M. P. Alfaric sur Zoroastre avant l'Avesta. En voici les conclusions:

<< En somme, toutes les données que nous avons sur la vieille théologie de Zoroastre nous amènent à la considérer, en sa forme première, comme une œuvre essentiellement grecque, faite, en partie, avec des matériaux étrangers, à cette époque de large syncrétisme qui vit paraitre les œuvres similaires. d'Orphée, de Musée, de Linus, de Phérécyde, d'Épiménide et d'Empedocle.

a Elles nous permettent, du même coup, de comprendre assez bien son rôle historique. En effet, le système zervanite a influé sur les milieux helléniques bien plus que sur ceux de l'Iran. Il paraît avoir été complètement ignoré de la Babylonie et de la Perse durant l'époque achéménide. Il semble s'y être répandu peu à peu depuis la conquête d'Alexandre, qui assura le triomphe de l'hellénisme, jusqu'à la chute de la dynastie des Arsacides, qui fit toujours une si large part aux influences grecques. Enfin il y fut supplanté par la doctr ire de l'Avesta et n'apparut plus que comme une hérésie importée du dehors après l'avènement des Sassanides dont la politique, foncièrement nationaliste, cherchait à éliminer tous les éléments étrangers. Mais son action se fait seutir à travers le recueil avestique, jusque dans les précautions qu'on prend pour le combattre. »

SOCIÉTÉ ERNEST RENAN

Séance du 22 mars 1921.

La séance est ouverte à 4 heures 1/2, M. H. Cordier préside.

Présents M Maspero, Mile Brunot, MM. Cordier, Alphandéry, BarrauDihigo, Danon, Dehérain, R. Dussaud, d'Eichthal, H. Girard, Giotz, Goguel, Guignebert, Huet, Kindberg, Mayer Lambert, Lebègue, Lods, Macler, MassonOursel, Moncel, Moret, Ort, Sidersky.

Le Secrétaire des séances donne lecture du procès-verbal de la précédente séance, qui est adopté sans observations.

Le Président prononce l'allocution suivante à l'occasion du centenaire de la naissance de l'illustre égyptologue Mariette.

Il y a cent ans naissait à Boulogne-sur-Mer d'une modeste famille. un homme qui, à travers mille difficultés, sans appui, sans fortune, mais doué d'une vive intelligence et d'une rare ténacité, sut, en suivant la tradition inaugurée par l'illustre Champollion le jeune,

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