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et son étude s'en ressent. On pourrait reprocher à l'auteur restant cette fois ci sur le terrain des Indes de négliger certains courants spirituels d'une importance certaine, tel p. e. le Joga; de reculer outre mesure la date des Upanisads qu'il estime pré-bouddhiques dans leurs presque totalité de ne point distinguer suffisamment entre les différentes écoles et les différentes étapes du jaïnisme ; de vouloir trouver dans les poèmes épiques une monde » et aussi d'y retrouver le védantisme.

<< conception du

M. Radhakrishnan n'a pas atteint le but qu'il s'était proposé. Son livre, qui devait décrire l'évolution de la pensée hindoue et nous la rendre accessible en la rapprochant d'une pensée qui nous est familière ne remplit aucune de ces deux tâches. Il sera certainement consulté avec profit par tous les orientalistes, car il contient beaucoup de faits et beaucoup d'idées. Mais le profane fera bien de ne pas se fier à lui entièrement.

A. K.

FRANZ CUMONT.

Fouilles de Doura-Europos (1922-1923), avec un appendice sur le céramique de Doura par M. et Mme Félix Massoul (Bibliothèque archéol. et histor. du Service des Antiquités de Syrie, t. IX). Un vol. in-4o de LXVIII et 533 pages et un atlas de CXXIV planches. Paris, Paul Geuthner, 1926.

Dans le bel ouvrage que M. Cumont a consacré aux fouilles de Salahiyé sur l'Euphrate, site qu'il a pu identifier avec la ville de Doura devenue, après Alexandre, colonie macédonienne sous le nom d'Europos, on trouvera deux importants chapitres consacrés aux cultes locaux.

D'abord le chap. I décrivant le temple des dieux palmyréniens et ses peintures, qui nous montrent le culte en action, puis le chap. III concernant le temple d'Artémis et ses sculptures. Le premier de ces sanctuaires a été ainsi dénommé parce que tout y signale le culte des dieux de la métropole du désert. Notamment, un des murs est orné d'une scène peinte d'un singulier intérêt, dont M. Cumont présente une belle planche en couleur appuyée, pour les détails, par des planches en noir.

Au centre est placé un thymiatérion sur lequel un officier, debout et tête nue, dépose des grains d'encens. Une inscription donne son

nom et son titre: Iulius) Terentius trib(unus). Derrière lui, sur le côté, se presse la troupe, officiers en tête; près de lui, un prêtre indigène Themès, fils de Mokimos, tient de la main gauche une fleur et un bouquet de brindilles.

De l'autre côté de l'autel est le porte-enseigne et, derrière le drapeau, sont rangées les statues des divinités. On crut tout d'abord car M. Breasted, qui a le premier révélé cette peinture, n'avait pu reconnaître l'ensemble de la scène qu'on était en présence de la statue de l'empereur. M. Clermont-Ganneau devina qu'il s'agissait de divinités palmyréniennes en costume militaire et M. Cumont précise que Beelsamin se dresse au centre tenant le globe céleste et ayant à ses côtés Yarhibol et Aglibol. En dessous sont assises la Tyché de Palmyre et la Tyché de Doura identifiées par des inscriptions grecques. Cette dernière domine un nageur barbu, qui figure l'Euphrate, et elle pose la main gauche sur la tête d'un enfant nu, vraisemblablement Europos.

Dans une salle latérale (p. 122), M. Cumont a dégagé une autre peinture représentant un sacrifice à cinq dieux palmyréniens. D'autre part, les graffites, soigneusement relevés dans le temple, << ne laissent aucun doute sur les divinités qui y étaient adorées. A côté de Zeus mégistos ou kallinikos, c'est-à-dire Bêl (inscr. 17, 25), on y trouve mentionnés Iarhibolos, Aglibolos (inscr. 12) et Athéna, qui représente Allath (inscr. 25); un proscynème palmyrénien (inser. 10) y ajoute Arsou et Godlat (?). C'est donc aux dieux de la capitale du désert que le sanctuaire était consacré, et, nous l'avons dit (p. 37), il fut probablement dès l'origine et resta jusqu'à la fin la chapelle des archers palmyréniens qui tenaient garnison à Doura (p. 40). Tout cela est parfaitement dit et observé; nous ne ferons qu'une réserve sur le mot « dès l'origine ». Les Palmyréniens ne nous paraissent ici que des occupants tardifs, car le temple de Bel devait exister à Doura bien avant qu'ils aient étendu leur domination sur le pays.

Nous ressentons, en effet, une impression d'archaïsme devant la plus surprenante des scènes peintes de Doura que M. Breasted a, par bonheur, pu photographier en couleurs au printemps de 1920 et qu'il a publiée dès 1922 (1). On y voit tout une famille, celle de

(1) Syria, 1922, pl. XXXVIII et suiv. Depuis, la fresque a été mutilée par les nomades.

Konon, prendre part au sacrifice. Deux prêtres, haute mitre en tête, vêtus de blanc et les pieds nus, officient. Devant l'un d'eux se dresse l'autel à parfums dont M. Cumont relève la ressemblance avec les autels portatifs des monuments assyro-babyloniens. Devant l'autre prêtre est placé un vase élancé, rempli d'eau dans laquelle le célébrant plonge de la main droite un rameau d'une plante à tige droite garnie de feuilles lancéolées. Ce vase est la survivance du vase sumérien dans lequel plongent des rameaux sur lesquels se pratique la libation d'eau. Le vase de Doura est, il est vrai, d'aspect plus compliqué avec ses trois renflements superposés et ses cannelures, mais une autre fresque (tableau II) conserve un modèle plus simple. Il n'est pas jusqu'aux palmes tenues par les assistants qui ne se retrouvent sur les stèles sumériennes, notamment sur les stèles de Goudéa.

Ce sont là des détails, dira-t-on, mais ils nous servent à introduire l'argument décisif qui est fourni par le plan même du temple (pl. XXV). M. Cumont a bien reconnu son caractère oriental puisqu'il le qualifie de << purement sémitique» (p. 34), définition qui est précisée en ce qu'il compare le naos du temple de Doura au naos de l'E-Makh de Babylone. Mais comme son nom l'indique, l'E-Makh était un temple sumérien.

Le temple sumérien

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ainsi que le confirment les récentes décou

vertes d'Our, se compose essentiellement d'une cour extérieure, à laquelle succède une cour intérieure d'où l'on passait dans le pronaos, plus large que profond, et dans le naos de forme semblable et d'ailleurs de dimensions assez réduites. Or, tous ces éléments, avec leurs particularités, se retrouvent dans le plan du temple des dieux palmyréniens (pl. XXV). Celui-ci conserve à ce point la tradition sumérienne qu'on peut se demander s'il n'est pas plus ancien que l'installation des Macédoniens à Doura. Lorsque ces derniers tracèrent l'enceinte, ils ne manquèrent pas d'y englober le sanctuaire de Bel, mais la disposition du terrain semble les avoir obligés à serrer de près la muraille du temple. Le sanctuaire fait à ce point corps avec le rempart que M. Cumont en a déduit que le temple avait été élevé à l'usage des archers palmyréniens. S'il s'agissait d'une simple chapelle, on pourrait l'admettre; mais l'édifice avec ses deux cours et ses annexes est trop important, son personnel de prêtres trop nombreux pour qu'on puisse accepter cette hypothèse.

En tout cas, on doit reconnaître que les Palmyréniens, à basse

époque, n'auraient pas construit un temple sur un tel plan; il faut donc l'attribuer aux gens de Doura qui, depuis une très haute époque, avec tout le pays environnant, ont subi fortement l'influence de la Chaldée (1). Des fouilles dans le sous-sol du temple pourraient apporter des lumières sur ce point. Sans essayer de pousser trop loin la conjecture et pour s'en tenir aux faits acquis, il n'est pas douteux que le Zeus vénéré dans ce temple est, comme l'a reconnu M. Cumont, le dieu Bel. On peut ajouter, d'après les constatations faites plus haut, que c'était le Bel de Babylone, autrement dit Mardouk, auquel l'épithète de kallinikos convient parfaitement. Nous ne pouvons dire, si ce Bel a supplanté une ancienne divinité du pays de Tirqa dont Doura faisait partie, mais c'est fort probable (2).

La constatation du culte de Bel à Doura, dès une époque relativement ancienne, nous permet de comprendre par quelle voie ce dieu a pénétré à Palmyre où on lui a élevé le temple le plus important de la ville. Cela nous explique aussi la disposition, assez surprenante à première vue, de ce grand sanctuaire. Nous ne parlons pas de la vaste enceinte qui est du meilleur type sémitique (Damas, Boetocécé, Jérusalem, Hébron), mais du naos lui-même sans autre exemple, même à Palmyre, avec sa forme oblongue. Cette disposition a été déterminée par un compromis entre le naos de type grec et la cella sumérienne. En même temps, le Bel de Babylone semble avoir emprunté le costume militaire et les attributs de Baalsamim ou maître des cieux sémitique, devenu Beelsamin dans la langue araméenne qu'on parlait de l'Oronte à l'Euphrate. On comprend avec quelle facilité, lorsque, à la suite des défaillances des rois séleucides, Palmyre étendit sa domination sur Doura, celle-ci accueillit dans son vieux temple de Bel les autres dieux palmyréniens. Ainsi Doura recevait plus qu'elle n'avait donné. C'est cette alliance des cultes, allant jusqu'à la communauté, que le peintre a voulu commenter dans le sacrifice du tribun militaire, en figurant les deux Tychés au-dessous des trois dieux, debout sur leur socle. A notre avis, il faut donc reconnaître le Bel

(1) Les listes dynastiques comptent parmi les dynasties sumériennes la dynastie de Mari. c'est-à-dire de la région envisagée.

(2) Il ne faut pas oublier qu'à la chute de la première dynastie babylonienne, la statue de Bel-Mardouk fut emmenée de Babylone au pays de Hana sur l'Euphrate (Ana) qui devint ainsi un centre du culte.

de Doura, mis à la mode palmyrénienne, dans le principal des dieux figurés à la fresque sur les murs du temple.

Ce ne sont pas les seules preuves de la vogue des cultes sumériens à Doura. Dans la grande fresque qui groupe, en vue du sacrifice, la famille de Konon, figure une femme assise, richement parée, qui porte le nom de Bithnanaïa. Ce nom (1) atteste la survivance à Doura du culte de la déesse sumérienne Nanai, déesse d'Ourouk sur laquelle M. Cumont a groupé maint renseignement. Ajoutons un trait qui permet de mesurer la persistance de ces cultes: la statue de Nanai, qui fut enlevée d'Ourouk et transportée à Suse par Koudour-Nakhounté I, se vit replacer dans son sanctuaire, seize siècles après, grâce au zèle pieux d'Assourbanipal. Sans doute, à son retour d'exil, ne trouvat-elle d'autre changement, dans son naos, que la figure de son prêtre. Nanai était en grand honneur à Doura si l'on en juge par l'importance du temple d'Artémis, nom sous lequel M. Cumont a reconnu, rajeunie par le vocable grec, la vieille déesse sumérienne. Le plan de cet Artémision oriental n'apparaît pas encore en entier; mais les vestiges mis au jour ont permis à M. Cumont de reconnaître « que les modèles dont se sont inspirés les architectes ne doivent pas être cherchés en Occident, mais dans la vallée de l'Euphrate. » Ici, aussi, des fouilles dans le sous-sol pourraient être singulièrement fructueuses et nous reporter d'un coup dans la haute antiquité.

Nous avons signalé les faits principaux d'histoire religieuse qu'apportent les découvertes de Doura-Europos, par ailleurs encore si remarquables; nous ne pouvons insister sur maint détail typique, bien mis en valeur par le savant commentaire. Tel le théatron sacré et l'odéon en forme d'hémicycle, adjoints au temple d'Artémis, tels aussi quelques morceaux de sculpture dont le plus notable est une statuette acéphale d'Aphrodite à la tortue, exécutée à Sidon ou à Antioche d'après un modèle que M. Cumont fait remonter à Phidias. Le chapitre des inscriptions grecques et sémitiques est particulièrement riche en renseignemeents de tout ordre.

La position de Doura, au carrefour de deux routes qui mènent de Chaldée en Syrie, explique les apports religieux divers qu'on y

(1) Ce nom nous paraît s'expliquer non par un arabisme, mais par la survivance de l'ancienne prononciation attestée par l'assyrien Bi-it-ti-Dagan, dans BAUER, Die Ostkanaanaeer, p. 7.

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