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Asiates de l'Antiquité et qu'il distingue soigneusement des Sorts bibliques dont l'origine ne serait point païenne mais proprement ecclésiastique. M. Van Gennep pose des règles de méthode fort propres à doser la valeur documentaire réelle, pour le folklore, des canons des conciles, ou des constitutions synodales.

Quant à la communication de M. Coulton, elle eût mérité mieux que l'auditoire restreint d'une séance de travail, et il est regrettable qu'on eût ignoré dès l'abord sa portée. C'est en effet le problème redoutable de la véracité historique que le médiéviste de Cambridge n'hésita pas à poser : nul contrôle dans le domaine de l'histoire, chacun s'arroge le droit d'y porter une plume ignorante ou passionnée. Le public désarmé se laisse prendre, car les spécialistes ne peuvent à peu près rien, individuellement, pour le mettre en garde. Les conséquences du mensonge historique s'avèrent pourtant parfois désastreuses, et M. Coulton en fournit des preuves effrayantes. Ne pourrait-on concevoir un comité d'historiens, à qui l'on déférerait tel ouvrage incriminé, qui jugerait des méthodes employées par l'auteur, et vérifierait le bien-fondé de ses références? Les historiens ont droit de défendre les esprits, comme les médecins les corps, contre la pseudoscience, et leur honneur professionnel contre les charlatans.

A l'époque de la Réformation s'attachent trois études, celles de MM. G. Krüger (Giessen), Kwaçala (Bratislava), et J. Baruzi. Le suppléant de M. Loisy au collège de France nous montre la machination de la lutte acharnée et savante conduite contre le protestantisme et l'illuminisme par l'Inquisition d'Espagne. L'exemple choisi passionne d'autant plus que l'accusé se trouve être le cardinal Carranza, archevêque de Tolède, l'accusateur, le théologien fameux Melchior Cano, et que l'issue de cette joute théologique sera la prison et la mort.

De l'Espagne du xvre nous passons dans la Lettonie du xviie siè cle, dont le peuple ignorant, abèti sous le joug des gros propriétaires allemands, naît à la vie religieuse, et, peu à peu, à la vie intellectuelle et sociale, sous l'influence d'un réveil provoqué par les Frères Moraves Hernhutes, ainsi que l'expose M. Adamovics (Riga).

Puis, nous revenons en France avec M. Mathiez la Séparation des Eglises et de l'Etat a-t-elle existé réellement sous la Révolution? En fait, elle exista depuis le 18 septembre 1793, et non depuis le décret d'un an plus tard, ainsi qu'on a l'habitude de le dire. En théorie, ce ne fut pas une séparation comme nous l'entendons de nos jours, et les Conventionnels, fidèles disciples de l'abbé Reynal, restaient incapables, M. Mathiez le démontre magistralement, de concevoir l'idée de la neutralité, de la laïcité de l'Etat.

Dans la salle où il enseigna, M. Alba évoque Albert Réville, et étudie son Manuel (1865), premier exposé d'ensemble des doctrines du protestantisme libéral français. Enfin M. Bouvier, dans une communication très objective et nourrie de faits, esquisse l'histoire des religions universalistes depuis 1914. leur recul, par l'effet de la guerre, sous la triple poussée du nationalisme, de l'individualisme, du laïcisme; puis leur reprise, manifestée par la lutte qu'elles mènent actuellement contre ces trois facteurs de désagrégation.

Le Congrès se termina par une causerie de Miss Petre sur un modernisme de croyants catholiques (1). « Le modernisme est mort » va-t-on répétant après ceux qui trouvent un intérêt à l'affirmer. M. Loisy lui-même, lorsqu'il en parle, éprouve l'impression de remuer ses cendres ». Pour la fidèle discipline de Tyrrell, les cendres restent chaudes, une flamme en jaillit encore, «< plus brillante et intense que tout feu allumé depuis »>; elle anime et illumine le visage inspiré.

A cette chaleur d'évocation, le cœur du Jubilaire a frémi ; d'une voix très basse, il conte les efforts du baron von Hügel et de Mgr Mignot pour écarter de son œuvre la condamnation romaine, et devant l'assistance recueillie, il ajoute quelques curieux épisodes à Choses passées.

De nouveau, l'atmosphère de « fête de famille », si caractéristique de ce Congrès, flottait dans la salle, aussi l'espoir de

(1) Cf. The Modern Churchman, juin 1927.

réunions nouvelles se leva-t-il presque de lui-même l'assemblée vota d'enthousiasme la reprise des Congrès internationaux d'Histoire des Religions, à périodicité régulière. Elle souhaitait que le Comité chargé avant-guerre de leur organisation se complétât et reprit vie, ou qu'à son défaut un organisme international nouveau se créât pour les provoquer.

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Plusieurs congressistes étrangers, Anglais notamment, devant reprendre leur service universitaire dès la fin de la semaine de Pâques, force avait été aux organisateurs de bloquer sur quatre jours seulement, le travail du Congrès. De ce fait, il restait peu de temps pour les délassements collectifs et réceptions, qui durent être reportés après la clôture officielle de la réunion.

Néanmoins, un dîner amical réunit dès le 21 au soir, les délégués des Universités et Corps savants ainsi que les membres du Comité du Congrès, autour des représentants de l'Université de Paris, les professeurs Guignebert et Lods. M. le Ministre de l'Instruction publique s'était aimablement fait représenter, et de nombreux congressistes s'étaient joints aux personnalités officielles. Seul, M. Loisy manquait à cette petite fête : nulle supplication n'avait pu le faire consentir à passer outre à la règle absolue qu'il observe de ne jamais sortir le soir. Nous dûmes nous contenter de porter sa santé, sur l'invitation pleine de verve de M. Guignebert, qui déplora cette absence.

Le Congrès à peine terminé, ses membres se transportèrent en masse au Louvre, où la Société Ernest Renan tenait en leur honneur une séance extraordinaire. Le lendemain, ils se partagèrent entre une réception où les avait priés M. Charléty, Recteur de l'Université de Paris, dans les salons de la Sorbonne, et une visite à la cathédrale de Chartres, guidée par le Dr Couchoud, secrétaire général du Congrès.

Enfin, le dimanche, les privilégiés qui pouvaient prolonger leur séjour à Paris se retrouvèrent au Cercle Autour du Monde

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à Boulogne, dont ils visitèrent, malheureusement sous la pluie, les célèbres jardins, et où ils admirèrent des projections en couleurs, photographies prises en Orient, choisies pour eux parmi les collections remarquables de M. Albert Kahn.

Notons, pour terminer, qu'une exposition des livres français traitant d'histoire des religions était organisée au Collège de France pendant le Congrès, et qu'audessus des gros livres gris et des petits livres rouges signés de M. Loisy, se détachait le buste à peine terminé du Jubilaire. OEuvre de Madame Delcour Guinard énergique et ressemblante, fixant le sourire ironique et désabusé de M. Loisy, l'une des attitudes de cet homme qui, si sobre de gestes, ne complète sa parole ou son silence, que de jeux de physionomie. Les admirateurs du Maitre s'unirent pour lui offrir, en une souscription qui dépassa largement son objet, cette effigie, souvenir tangible de ces journées de fête et de travail heureux.

Marguerite BRUNOT.

PEUPLES ET CIVILISATIONS

Sur l'histoire religieuse des « Premières civilisations » (1).

Tandis que vers la fin du XIXe siècle, l'esprit historique se résolvait volontiers en monographies et analyses, notre époque semble faire bonne mesure au travail de synthèse. Les Histoires générales n'ont jamais été plus nombreuses, ni plus soignées,

(1) PEUPLES ET CIVILISATIONS. Histoire Générale, publiée sous la direction de MM. L. Halphen et Ph. Sagnac. I, LES PREMIÈRES CIVILISATIONS, par G. Fougères, G. Contenau, R. Grousset, P. Jouguet, J. Lesquier, Paris, Librairie F. Alcan, 1926. Un vol. in-8o, de vi-437 pages, I tableau synchronique et 3 hors texte. Je ne crois pas inutile, dans un compte renducritique, de rétablir, d'après les renseignements mêmes dont les auteurs m'ont fait bénéficier, l'indication des parts respectives des collaborateurs. G. Fougères : pp. I, 12-19, 112-122, 160-201, 216-218, 223-235, 242-274, 286-381, 383-430. G. Contenau: pp. 9-12, 73-111, 136-140, 149-151, 205-206, 212-214, 239-241, 274-283.

R. Grousset: pp. 123-135.

P. Jouguet: pp. 1-9, 21-72, 140-149, 151-159, 202-205, 207-212, 214-215, 218-221, 283-286, 381-383.

L. Halphen: pp. 233-239.

en raison d'une Le nom de Jean Lesquier a figuré sur la couverture ébauche préparée avant 1921 par le regretté professeur de la Faculté d'Aix. En corrigeant ces épreuves, il me faut hélas! adresser déjà l'hommage funèbre à un autre des collaborateurs de la collection: G. Fougères, qui fit tant pour ce premier volume, vient d'être très prématurément emporté. Ce n'est que peu à peu qu'on mesurera ce qu'une telle perte coûte à l'hellénisme.

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