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M. Kreglinger pourra facilement faire disparaître ces taches dans les éditions ultérieures de son livre, que nous souhaitons nombreuses et prochaines.

Adophe LoDs.

ALI TABARI, The Book of religion and empire, a semi-official defence and exposition of Islâm... translated with a critical apparatus..... by A. Mingana, D. D. - Manchester, University Press, 1922; 1 vol. in-8o, XXIV-174 pages.

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Les collections de manuscrits arabes formées en Europe n'ont pas cessé de nous présenter des surprises. C'est le cas de cet ouvrage, découvert dans la bibliothèque de John Rylands par M. A. Mingana, qui est à la fois attaché au département des manuscrits de cet établissement et lecteur d'arabe à l'Université de Manchester ; ce savant nous en donne la traduction, en attendant la publication du texte, promise pour le printemps prochain, c'est-à-dire précisément le moment de l'année où nous sommes parvenus. Ce manuscrit est probablement unique, et d'autant plus intéressant qu'il nous livre un traité d'apologétique musulmane composé, sur l'ordre du souverain, durant le règne du Khalife Abbasside el-Motawakkil, qui régna de 847 à 861 de notre ère.

L'auteur, Ali Tabarî, n'a rien de commun avec le célèbre historien et commentateur du Qorân, Mohammed ben Djérir et-Tabarî, sauf le surnom ethnique; il lui est même quelque peu antérieur. C'était un chrétien, comme le montre le nom de son père Rabban (déformé par la plupart des copistes) et comme il ne s'en cache pas lui-même au cours de son traité; sa conversion à la nouvelle religion paraît avoir été sincère, et sa connaissance des livres saints, et surtout de la traduction syriaque de la Bible, la Pechittô, lui a fourni une érudition considérable qu'il met au service de la cause nouvellement embrassée. Il semble bien être le même que l'auteur cité par le Fihrist, qui dit qu'avant sa conversion il avait été le secrétaire de Mâzyâr ben Qâren, et qu'il est l'auteur du Paradis de la médecine, sans doute le même ouvrage que le Kunnâch ; il était aussi, en conséquence, médecin.

Son argumentation (p. 14) repose sur dix points: le prophète, comme tous les autres d'ailleurs, appelle les hommes à reconnaître un Dieu éternel et tout-puissant ; il était pieux et sincère; il a produit des miracles évidents; il a prophétisé des événements qui sont arrivés durant sa vie, et d'autres qui ne se sont réalisés qu'après sa mort; il a révélé un livre, signe indubitable d'une mission divine ; sa victoire sur les nations est aussi un signe de ce genre; ses missionnaires étaient des gens honnêtes dont on ne peut suspecter la véracité ; il clot la série des Envoyés de Dieu, et s'il n'en était pas ainsi, les anciennes prophéties le concernant ainsi qu'Ismaël seraient vaines; enfin, les prophètes ont annoncé sa venue longtemps avant son apparition.

Que répondent les chrétiens (p. 15)? 1o Ils ne constatent pas qu'un prophète ait annoncé sa venue; 2o on ne trouve pas dans le Qorân la mention d'un miracle qu'il ait accompli ; 3° le Christ a dit qu'aucun prophète ne viendrait après lui. Mais réplique l'auteur (p. 16), est-ce que Moïse, David, Isaïe, Jérémie ont été annoncés par d'autres prophètes? Est-ce que les Psaumes de David contiennent la mention d'un miracle de ce roi-prophète ? Est-ce que Ezechiel, Osée et autres en ont fait? Et quant à des prophètes postérieurs à Jésus, n'avons-nous pas les Actes des Apôtres qui nous parlent des prophètes d'Antioche, Barnabas, Simon, Luc de Cyrène (Act. XIII, 1) et d'Agabus de Jérusalem (Act. XI, 28)? On voit que l'auteur était bien renseigné. C'est évidemment de ce passage, ou d'un traité du même genre, que provient la mention des prophètes d'Antioche dans le Livre de la Création et de l'Histoire de Motahhar ben Tâhir elMaqdisî.

L'ascétisme, l'austérité, la pauvreté de Mahomet (p. 25) feront sourire ceux qui sont au courant des recherches du R. P. Lammens. Le hadith: el-faqru fakhri « la pauvreté est ma gloire » n'était pas encore inventé, sans cela l'auteur l'aurait cité. Faire un mérite au Qorân d'exiger deux témoins équitables (entendez plutôt : « de bonnes mœurs », adl) << pris parmi vous »> (les musulmans), tandis que les lois de Moïse et de Jésus se taisent sur la qualité des témoins, est simplement absurde. C'est d'ailleurs de ce verset (LXV, 2) que découle l'obligation, pour le juge musulman, de rejeter le témoignage d'un non-musulman contre un de ses coreligionnaires (à lui, juge), et c'est

un des motifs qui ont présidé à l'élaboration des Capitulations de l'empire ottoman.

A l'époque où écrivait l'auteur, les légendes qui entourent la vie de Mahomet étaient définitivement fixées, et comme tous ses contemporains, il y croyait fermement. Le moindre sens critique, s'il en avait eu, aurait dû lui faire voir (p. 45) que la mention du Khorasan, d'où est parti Abou-Moslim, ne pouvait être que postérieure à l'avènement des Abbassides, mais les auteurs de Çahîh, Bokhâri et Moslim, s'y sont eux-mêmes trompés, malgré leur croyance à l'authenticité des traditions qu'ils n'avaient pas rejetées. On notera que, parmi les miracles, il n'est pas fait mention de la lune fendue en deux, bien que ce phénomène météorologique soit cité dans le Qorân.

Pour l'annonce de la venue de Mahomet dans l'Ancien Testament, le procédé est simple : partout où, dans la version syriaque, il y a un mot signifiant « gloire », traduit en arabe (un peu abusivement) par hamd, c'est Mohammed qu'on a en vue; il en est ainsi de Ps. XLV, 2-5; Is. II, 19, XXXV, 2; Hab. III, 3-13, etc., et du fameux mechabbeha d'Ezechiel. En ce qui concerne le Paraclet, la démonstration est bien faible; l'auteur en est réduit à calculer la valeur numérique des lettres. Je ne vois pas qu'il y soit question de παρακλύτος == παρακλήτες. Quand on reproche à Mahomet d'avoir dit : « Dans le monde futur il y aura à boire et à manger » (cf. Qor. passages connus), l'auteur répond : « Le Christ n'a-t-il pas dit à ses disciples : « Je ne boirai pas de ce fruit de la vigne, jusqu'à ce que j'en boive une autre fois avec vous dans le royaume des cieux » (Matth. xxvi, 29). En y joignant Luc, xxii, 30 : « Vous mangerez et boirez à la table de mon père », il faut reconnaître que la réplique est topique. Page 95, « Mâhin » (à la note 6) est bien la Médie, mais il faut lire Mâheïni au duel, car il y a le mah de Baçra et celui de Koûfa.-P. 97. « Khuzistan », en note: Contrée s'étendant entre Ahwâz, Baçra et Ispahan, d'après Yâqoût; mais chacun sait que c'est le nom de la Susiane, le pays des Cosséens, dénommé aujourd'hui administrativement Arabistan, à raison des nomades arabes qui parcourent ces plaines désolées. P. 98. « A secret to me »>, et en note « Possibly a literal translation of the syriac expression Raz li, meaning figurativeley « Woe is me ». Le traducteur n'a pas vu que râz dans le sens de « secret » est un mot

persan. P. 121. « The city of Irân-Shahr » et en note : « A big city in N. W. of the province of Khurâsân... That the Persian language was not spoken beyond this city is historically interesting. » Ce n'est pas cela du tout. Erân-Shahr est l'empire de Perse; voir l'ouvrage de J. Marquart qui porte ce titre; et d'ailleurs Yâqoût, IV, 857, cité ibidem, dit bien que c'est le nom du pays entre le Djaihoûn et Qâdisiyya, c'est-à-dire entre l'Oxus et l'Euphrate, ce qui est fort exact pour l'époque des Sâsânides. - P. 127. « City of Peace »>, et en note: «< i. e. Baghdad ». Le texte arabe porte indubitablement dâr es-Salâm, qui est en effet un des surnoms de la capitale des Abbassides; cette expression ne signifie pas «la ville de la paix » ou « du salut», comme on la traduit communément, mais « le paradis », ainsi que d'ailleurs le nom d'el-Khold, donné au palais des Khalifes.

CL. HUART.

Hippolyte DREYFUS. L'Euvre de Bahâou'llàh. T. Ier. Paris, Editions Ernest Leroux, 1923; 1 vol. in-18, 143 pages.

On ne peut qu'admirer le courage avec lequel M. H. Dreyfus a entrepris de faire connaître au public français et à celui qui lit la langue française, bien plus étendu que l'autre, les élucubrations sorties de la plume de Béhâ-oullâh. Le petit volume que nous avons sous les yeux contient différentes œuvres du continuateur du Bâb : la Très sainte tablette, rédigée à Andrinople ou au début du séjour (lisez internement) du prophète à Saint-Jean-d'Acre (p. 9-20); les sept Vallées du voyage vers Dieu, avec le sous-titre : Sur les mystères de l'ascension vers Dieu, le tout Puissant et le Miséricordieux (p. 25-60); les Paroles cachées en arabe (p. 63-78) et en persan (p. 81-106); ces deux ouvrages ont été composés à Bagdad, probablement en 1247 hég. (1857); et enfin la lettre sur le Bayân (p. 109143), contemporaine du premier de ces quatre traités. C'est dire que nous sommes encore à une période où la pensée de Béhâ-oullâh ne s'est pas encore dégagée des formules du Bâb ; une polémique contre Çobh-é Azal et ses adeptes, d'une tonalité violente, indique que séparation des deux disciples n'était pas fort éloignée. On a prétendu

que la réforme de l'islamisme prêchée en Perse par Ali-Mohammed n'avait rien à faire avec les mystiques; ce volume prouve que cette opinion était erronée; il n'y a qu'à constater, passim, le rôle qu'y jouent les voiles qui séparent l'entendement humain de la connaissance de l'Etre suprême, et cela est tout à fait dans la note de la mystique persane.

On remarquera (p. 34) une rencontre fortuite et néanmoins étrange entre les spéculations des çoûfîs et les hypothèses les plus récentes sur le rôle des ions : « Si tu cherches à l'intérieur de chaque atome, au milieu tu trouves un soleil. » Signalons aussi le point de doctrine formulée p. 137 : « La création a toujours existé et elle existera toujours. » Au point de vue musulman, c'est une hérésie parfaitement caractérisée, un chirk (association de créatures à Dieu) de premier ordre. Ainsi, éternité de la matière : Dieu n'est plus qu'un démiurge.

La traduction est élégante; il n'était pas facile de rendre, dans un langage accessible à un public non prévenu, la phraséologie particulière aux ratiocineurs d'Orient. On eût souhaité un peu plus de notes; en effet, que signifie un membre de phrase comme celui-ci (p. 19): « Le Kauther de ma science », si l'infortuné lecteur ne sait pas qu'il s'agit d'une source du Paradis? Les quelques indications. que l'on rencontre au bas des pages ne sont pas exemptes d'erreurs. P. 29, Léïli, lire Léïla ; il n'y a pas que Djâmî qui ait chanté les amours de Medjnoûn et de Léïla. P. 42, « les mélodies de Hijaz et d'Irak. » En note : « l'arabe et le persan ». Ce sont les noms de deux modes musicaux, de deux gammes; cf. p. 48 : « L'oiseau d'Irak a dans sa tête tous les chants merveilleux de l'Hijaz. » P. 53. Lokman est bien un « sage légendaire de l'Arabie », mais non un fabuliste, puisque les fables placées sous son nom sont la traduction de celles d'Esope. - P. 85, « L'arbre d'Anissa ». Les Béhâïs ne savent plus ce que veut dire cette expression. Je m'y suis moi-même trompé dans un précédent article. C'est tout uniment « l'arbre du feu », c'est-à-dire le buisson ardent : anîsa « la compagne » (nâr est féminin en arabe) est un synonyme de « feu » chez les anciens Arabes. P. 131. Le chiffre 6 n'a la forme d'un hamza que dans l'écriture persane; attribuer cette valeur à ce signe orthographique n'est qu'une plaisanterie sans portée.

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