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Vous savez que vous les serviteurs de Dieu vous habitez sur une terre étrangère; votre cité est loin de cette cité. Si donc vous connaissez votre cité, la cité que vous devez un jour habiter, pourquoi achetez-vous ici des champs, des meubles somptueux, des palais, des habitations superflues? Qui fait ces acquisitions pour la cité d'ici ne songe évidemment pas à retourner dans sa propre patrie. Insensé, indécis, infortuné ! Ne vois-tu pas que tous ces biens te sont étrangers et au pouvoir d'un autre?.... Réfléchis donc, tu habites sur une terre étrangère, n'acquiers que ce qui est nécessaire à tes besoins, et tiens-toi prêt. Et lorsque le despote de cette cité voudra t'expulser parce que tu n'obéis pas à sa loi, tu sortiras de sa ville sans dommage et le cœur plein de joie, pour aller dans ta cité et y vivre selon ta propre loi.

En attendant le monde durait et il fallait y vivre. La loi de la cité terrestre s'imposait brutalement aux messianistes. Entre l'idéal évangélique et les réalités politiques et sociales de l'ancienne société le conflit était inévitable.

« Je suis venu allumer un grand feu sur la terre, avait dit Jésus, je suis venu apporter l'épée et la division »><

(A suivre.)

1) Hermas, Sim,, I, 1 à 3, 6.

I

A. CAUSSE.

QUESTIONS D'ARCHEOLOGIE RELIGIEUSE ET SYMBOLIQUE

XIII

LES MONUMENTS « GAULOIS » DU MUSÉE DE DOLE

1

La Revue de l'Histoire des religions a publié dernièrement une notice de M. J. Toutain sur les curieux monuments du Musée de Dôle, décrits et reproduits par M. Feuvrier lors du IXe Congrès préhistorique de France. Signalés dès 190 par M. Févret au Congrés des Sociétés savantes des Départements, ils ont été alors taxés d'inauthenticité par M. Héron de Villefosse. M. Feuvrier s'efforce de les disculper de cette accusation, mais MM. Toutain et S. Reinach ne peuvent lui donner raison, divers détails, disent-ils, étant suspects; M. Jullian hésite, et M. Espérandieu les croit l'œuvre d'un fou de la maison d'aliénés où ils ont été trouvés. Une enquête est actuellement en cours.

Attendons-en les résultats. Mais dès maintenant, et, à ne tenir compte que des monuments eux-mêmes indépendamment de toute circonstance accessoire, on peut montrer à l'aide d'exemples plus caractéristiques que ceux de M. Feuvrier, qu'aucun motif n'est insolite, et que leur association est très naturelle. Les reliefs sont-ils inauthentiques, la valeur historique de leur ornementation n'en subsiste pas moins. Abandonnons toutefois le terme de « gaulois », qui risque d'induire en erreur et de faire croire que ces sculptures

1) 1916, LXXIV, p. 117.

2) Session de Lons-le-Saulnier, 1913, p. 544 sq.

3) Ibid., p. 548.

4) Cf. encore Rev. des Ét. anc., 1917, p. 271.

5) Rev. arch., 1915, I, p. 344; L'Anthropologie, 1915, p. 582.

6) Rev. des Et, anc., 1918, P. 115.

datent de l'époque de la Tène; elles sont en réalité gallo-romaines, mais répètent quelques vieux emblèmes qui furent en usage en nos, pays dès l'âge du fer, et plus anciennement encore.

Les reliefs I et II ont assurément fait partie du même ensemble. Le thème, avec quelques variantes, est le même : emblème céleste qui, sur l'un, est une roue à huit rais terminés par des maillets, sur l'autre une rosace à huit pétales; coq becquetant un végétal. La tranche gauche de l'un, la tranche droite de l'autre sont ornées, ce qui indique que le relief I était placé à la gauche du spectateur, le relief II à sa droite, terminant le monument de chaque côté; les motifs sont inversés avec une rigoureuse symétrie,

Le monument III, en une autre matière, a été découvert à quelques cent mètres des précédents, et les motifs qui le couvrent ont le même sens.

Examinons chacun des éléments de cette curieuse ornementation.

-

1. La roue à huit rais terminés par des maillets. M. Feuvrier reconnait en elle l'équivalent de la roue aux multiples maillets portée par le Sucellus de Vienne (Isère), dont l'authenticité, jadis contestée, est actuellement admise sans restriction. On peut signaler encore un barillet analogue de Vienne, qui a appartenu à une statuette de la même divinité. Cette répétition de l'emblème sacré, pour en accentuer la puissance', apparait aussi sur un relief gallo-romain de Saint-Gilles, où une grande bipenne est surmontée de trois bipennes plus petites.

Il y a cependant entre les monuments de Vienne et celui de Dôle

1) Jullian, Emblèmes conjugués, roues et maillets, Rev. des Ét. anciennes, 1918, 113-5.

2) S. Reinach, Bronzes figurés de la Gaule romaine, p. 175; Répert. de la stat., II, p. 21, 6. La statuette, dont on ignorait le sort depuis longtemps, a été récemment retrouvée; elle a fait partie de la collection Tylor à Londres, vendue en 1912. Rev. arch., 1912, II, p. 173.

3) Bronzes figurés, p. 156, no 176.

4) Sur cette répétition intensive, La monstruosité de puissance, Rev. des. études grecques, 1915, p. 312 sq.

5) Espérandieu, Recueil des bas-reliefs de la Gaule romaine, I, p. 327, n° 497.

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quelques divergences. Dans les premiers, les petits maillets, rayonnant autour d'un maillet central, sont emmanchés normalement, par leur milieu. Dans le second, ils sont fixés à leur manche par une de leurs extrémités, et il n'y a point de corps central. Cet emmanchement inusité s'explique par des raisons techniques, car les conditions du relief sont autres que celles de la ronde-bosse. L'ouvrier peu habile, en quelque temps et à quelque pays qu'il appartienne, ne reproduit pas le modèle tel qu'il le voit, mais il s'efforce d'en donner la vue la plus complète, en modifiant sans scrupule les relations des différentes parties entre elles. L'artiste grec sculpte une tête et des jambes de profil sur un corps de face, et un œil de profil dans une tête de face; les chevaux divergents, vus comme s'ils marchaient à droite et à gauche, traînent en réalité le quadrige de face. L'art égyptien procède ainsi, et son architecture figurée combine en un même ensemble, suivant les nécessités, le plan et l'élévation; au XIII° siècle, Villard de Honnecourt est soumis aux mêmes conventions. Les instruments, les armes, qui devraient être vus par leur tranche ou par leur petit côté, pivotent sur leur manche ou sont rabaltus sur lui comme autour d'une charnière, de façon à être représentés dans toute leur étendue, tout comme la voile, au lieu d'être figurée de profil, est tournée de face, bien que le navire s'avance à gauche ou à droite. Sur le relief de Dôle, la roue étant de face, chacun des maillets devrait être vu en profil absolu, par son petit côté, et être réduit à une simple circonférence. Celle ci n'eût pas été comprise, et on eût confondu ce symbole avec celui de la roue aux extrémités bouletées 3. L'ouvrier a donc rabattu les maillets verticalement sur leur manche respectif, en les faisant pivoter autour de leur point d'attache.

Le manche qui supporte la roue aux maillets, vertical dans les bronzes de Vienne, est ici horizontal. Cette direction est-elle exacte, ou faut-il supposer un rabattement semblable, pour suppléer à la difficulté de rendre un manche perpendiculaire au plan de la roue,

1) Ex. Foucart, Les conventions de l'architecture figurée en Egypte, Rev. arch, 1893, 29, p. 279 sq.; id., Rev. hist. des rel., 1994, 49, p. 170 sq.; 1905, 52, p. 103.

2) Rev. arch., VI, 1849, p. 73.

3) Ci-dessous, p. 158.

qui se serait enfoncé dans la profondeur du relief, et qui eût été réduit à un simple point? Les deux hypothèses sont possibles.

Cette convention, tout à fait conforme aux principes du relief antique, est un indice en faveur de l'authenticité du monument. Le faussaire moderne, choisissant cet attribut caractéristique du Dispater celtique, aurait-il songé à en tenir compte?

Le sens de la roue, emblème du soleil', celui du maillet, emblème de la foudre, sont bien connus; il est donc inutile d'y insister.

**

2. La rosace à huit pétales du monument II est très proche parente de la roue aux maillets, qui a le même nombre de rais; elle est aussi munie d'une tige horizontale. Apparaissant dans une scène à peu de chose près semblable, elle permet de penser a priori que les deux emblèmes sont équivalents.

Le feu céleste, le soleil, la foudre, ne sont pas seulement assimilés à une roue, mais aussi à une fleur brillante; les étoiles sont des fleurs et des fruits 2. C'est là un symbolisme général dont les textes et les monuments antiques fournissent de nombreux exemples', et que les croyances populaires des temps modernes ont conservé: le soir de la Saint-Jean, fête qui est une survivance des rites solaires de la végétation, la fougère porte une fleur enflammée, en un instant fanée; celui qui la cueille possède un talisman rendant invisible *. L'identification de la fleur avec le feu céleste est souvent très nette sur les monuments, et fleur, disque, rouelle, tête humaine du soleil, feuilles et flèches ardentes, se confondent et permutent entre eux ou forment les mêmes groupements. Qu'on feuillette patiemment le beau recueil que M. Espérandieu a consacré aux reliefs de la Gaule romaine, on en trouvera à chaque instant la confirmation. J'ai

1) Gaidoz, Rev. arch., 1884, II, p. 7 sq.; Déchelette, Manuel d'arch, prehist., II, p. 413, 453; Rev. hist. des rel., 1915, LXXII, p. 65 sq. Deonna, Les croyances religieuses et superstitieuses de la Genève antérieure au christianisme, Bull. Inst, national Genevois, 1917, p. 353 sq., etc.

2) Eisler, Weltenmantel und Himmelszell, I, p. 32.

3) Jacobstahl, Der Blitz in der orientalischen und griechischen Kunst, p. 10

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