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dans l'étude citée plus haut (p. 180 et suiv.), que bien des savants ont posé en principe l'utilité du grec moderne pour cette branche d'études, sans que cependant on ait passé de la théorie à l'application. C'est qu'en effet, il ne suffit pour cela ni d'un dictionnaire, ni d'une grammaire; des connaissances plus étendues sont nécessaires, et il y faut surtout le sentiment de la langue, uni, cela va de soi, à une méthode scientifique qui empêche de rien exagérer dans ce sens.

Là est l'intérêt principal des recherches entreprises par M. Pallis, qui est Grec. On connaît, par les difficultés qu'en a soulevées l'interprétation, l'exemple de xxxpílov závra tk ßpúpatz, Marc, 7, 19. La traduction courante « déclarant purs tous les aliments >> oblige à donner à xz0zpo un sens détourné, sans qu'on arrive du reste à rien de satisfaisant. Il n'en est plus de même, dès qu'on prend Bpóztz dans le sens moderne d'immondices ». M. P. a adopté avec raison dans sa traduction des Évangiles la leçon xxxgov que donnent certains manuscrits, et rendu la phrase par xxi xoтρedet xále άxx0xpoíx « et nettoie toutes les impuretés ». Il eût pu dire κάθε ἀκαθαρσία aussi, mais d'une façon plus crue, xxi xx0zpiše: čλz tà Вpúpaτa. L'acception moderne de ßpopz a été pour ce passage insérée par le P. Zorell dans son Lexique.

Marc, 6, 45 : καὶ εὐθὺς ἠνάγκασεν τοὺς μαθητάς αὐτοῦ ἐμβῆναι εἰς τὸ hotov. Le sens de « contraindre >> ne convient pas ici. Celui de << presser »>, que le contexte a suggéré aux traducteurs, est probablement encore trop fort. Les auteurs byzantins emploient avzyxálw dans le sens d'« inciter, inviter ». C'est vraisemblablement ainsi qu'il faut entendre le mot dans ce passage. « Et il invita ses disciples à monter en barque », plutôt que « dans la barque », comme l'indique le grec moderne μπαίνω στὸ πλοῖο, στη βάρκα.

Il serait aisé de multiplier les exemples. Toute une partie de la syntaxe de Marc, celle du pronom relatif, reste obscure, si l'on n'a pas présente à l'esprit la construction du grec moderne à ce point de vue. Elle devient limpide avec elle, et cette particularité, jointe à beaucoup d'autres du même genre, montre que Marc a employé la langue courante de son temps. L'emploi de et, au lieu de ĉs, , relevé par M. Pallis à de nombreux passages (p. 106 s'explique de la même façon,

Rom. 8, 29),

P. 127, l'auteur signale (Rom. 11, 11) va méswav dans le sens de dióti neozv et renvoie à Jaunaris, Historical Greek Gramm. § 1741, qui est important pour Marc, 4, 12, ἵνα βλέποντες βλέπωσιν καὶ μὴ ἴδωσιν, καὶ ἀκουόντες ἀκούωσιν καὶ μὴ συνιῶσιν, μή ποτε ἐπιστρέψωσιν καὶ άçe autois. Ce verset, si obscur dans Marc, s'éclaircit lorsqu'on donne à ïvz le sens de diót et à pote celui du grec moderne << pour voir si ». « Mais pour ceux-là du dehors tout se passe en paraboles, parce qu'ils regardent et ne voient pas, qu'ils entendent et ne comprennent pas, pour voir s'ils ne viendront pas à résipiscence (gr. mod. yupíccuv, qui vient immédiatement à l'esprit et qui se trouve en effet chez Pallis), afin (sens moderne de xz en pareil contexte) qu'il leur soit pardonné ». Cette explication ne résout pas toutes les difficultés, mais elle mérite en tous cas de retenir l'attention.

P. 74 (Rom. 4, 23), il ne semble pas que M. P. ait tort de rapprocher δι' αὐτὸν du grec moderne γι' αὐτὸν = περὶ αὐτοῦ. P. 106. (Rom. 8, 28) le sens moderne de « toujours » attribué à závra est tentant.

Je ne suis pas d'accord avec l'auteur sur tous les points. P. 72 par exemple (Rom. 4, 15), il ne me semble pas nécessaire de corriger

(d'autres manuscrits ont 3) en ou; comparer le proverbe Tου λαλοῦν πολλοί πετεινοὶ ἀργεῖ νὰ ξημερώση. A sa place je ne me serais pas arrêté un instant sur des formes telles que λάρυνξ, ἄνγελος, μévpetz, qui sont de simples fautes d'orthographe. Mais ce sont là des détails. La méthode, dans l'ensemble, mérite qu'on la prenne davantage en considération. Elle est de nature à donner d'excellents résultats.

Hubert PERNot.

Henri BASSET.

Essai sur la littérature des Berbères.

Un vol. in-8 de 446 pages. Alger, Carbonel, 1920. Le culte des grottes au Maroc. Un vol. in-8 de 129 pages. Alger, Carbonel, 1920.

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La littérature des Berbères n'a jamais dépassé le stade folklorique mais par cela même elle offre un intérêt particulier pour l'histoire des religions. M. Henri Basset a pris texte des nombreux documents, publiés pour analyser les contes et légendes de Berbérie qu'il classe

en contes merveilleux, contes plaisants, contes d'animaux et légendes. Le côté magique des contes merveilleux est bien mis en valeur. L'influence étrangère, notamment orientale, est très marquée, mais les personnages prennent rapidement une couleur berbère; aussi, aventures romanesques mises à part, le héros de ces contes merveilleux n'est point « si loin de quelques-uns des chefs berbères qui nous combattent aujourd'hui au Maroc, gens de rien parfois, que leur astuce et leur courage, autant que leur baraka, ont mis au premier rang. »

Les contes, qui mettent en scène les animaux, sont l'objet d'une étude très soignée; le rattachement au totémisme est écarté. Si les contes merveilleux semblent être entrés pour la plupart en Berbérie par l'intermédiaire des Arabes et si les thèmes occidentaux y sont en minorité, par contre les contes d'animaux ont une origine plus diverse. Les apports orientaux y sont très nels, le Soudan a aussi fourni quelques éléments; mais M. Henri Basset montre « les affinités étonnantes que présentent les contes berbères d'animaux, pris un à un, avec les versions occidentales de ces mêmes contes: soit qu'elles se transmettent encore dans la tradition orale, soit qu'on les trouve relatées dans les recueils littéraires des fabulistes médiévaux ou dans les diverses branches du roman de Renart. » Une différenciation s'est produite par le fait de la transposition des principaux personnages: « ainsi, le personnage central de ces contes berbères est un animal totalement inconnu en Europe, le chacal; et, par contre, le loup et le renard, personnages principaux en Europe, sont l'un tout à fait ignoré, et l'autre, fort rare en Berbérie. » Ces constatations sont des plus curieuses; malheureusement si on devine le contact, il est impossible de déterminer où et quand la transmission s'est opérée.

Les légendes offrent une matière non moins riche; elles sont classées en légendes historiques, légendes religieuses (le mahdi), légendes hagiographiques et légendes explicatives.

En tout pays, le culte des grottes représente une survivance des plus anciennes croyances. Au Maroc, comme ailleurs, on a essayé de ramener à l'orthodoxie ces manifestations héritées de l'ancien paganisme. Seuls, d'ailleurs, les petites gens se rendent à certains jours devant ces grottes, y sacrifient, y déposent quelque offrande, y passent la nuit. Nous retrouvons ici nombre de légendes orien

tales le dragon à sept têtes, les sept dormants, les trésors enfouis. La croyance aux génies a fini par obscurcir la véritable fonction des grottes. Faut-il dans les récits relatifs à la «< nuit de l'erreur »> reconnaître « des rites sexuels à caractère essentiellement agraire, destinés, par un procédé de magie sympathique, à assurer la fécondation des champs et la bonne récolte future? » Nous l'admettrions volontiers si ces récits reposaient sur des faits réels; mais jusqu'ici il ne semble pas qu'on ait établi leur réalité. Ce sont des accusations invérifiées que l'on dresse contre des populations considérées comme hérétiques. Elles ont cours non seulement dans l'Afrique du Nord, mais aussi en Syrie où elles sont une manifestation attardée des anciennes controverses religieuses.

Qu'il s'agisse des grottes à oracles, des grottes guérisseuses ou à fonction indéterminée, c'est aux génies plus ou moins individualisés et spécialisés qu'on s'adresse : les grottes ne sont que la demeure préférée des djinns.

Une des cérémonies les plus curieuses est celle de l'asifed, découverte par M. Laoust dans l'Anti-Atlas. Elle se pratique à l'approche de la moisson des maïs et des orges; sous des formes diverses elle a pour objet de capter, de localiser, de rendre inoffensives les forces magiques qui tendent à détruire les récoltes ou à en écarter l'homme. Il y aurait lieu de rechercher si l'asifed ne se propose pas aussi de conserver l'esprit de la végétation au moment de la moisson. En d'autres termes, si les rites d'expulsion et de préservation ne se doublent pas d'un rite de renouvellement. Car ces cérémonies paraissent, dans leurs formes diverses, présenter des tendances multiples et elles n'aboutissent pas toutes à la grotte; nombre d'entre elles finissent à l'arbre ou à la source. Il semble qu'il y ait là matière à étendre ce que nous savons des cultes agraires; nous sommes frappés de certaines comparaisons à établir avec les anciens rites de la pâque chez les Israélites.

Avec ces deux travaux qui témoignent de connaissances étendues et de réelles qualités d'observation, l'auteur apporte une remarquable contribution aux études berbères que son père, M. René Basset, a tant contribué à développer.

René DUSSAUD.

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A. HOUTIN. Le Père Hyacinthe dans 1 Église romaine, 1827-1869. Paris, E. Nourry, 1920. Un vol. in-12 de 396 p. avec un portrait.

Tout éloge de la méthode et de l'érudition de M. A. Houtin serait superflu à cette place: nos lecteurs le savent, peu de savants possèdent une information aussi étendue que la sienne sur l'histoire de la pensée et de la hiérarchie ecclésiastiques; bien, peu exposent et jugent l'une et l'autre avec un tact aussi ingénieux, avec une critique aussi pénétrante.

Mais il y a lieu d'ajouter, cette fois, que M. A. H. a rarement joué et gagné une partie aussi ardue ce livre sur le P. Hyacinthe est d'une sûreté dans la mesure qui donne dès l'abord le ton et l'aspect de l'histoire d'un passé déjà serein à cette histoire qui date d'hier à peine. M. A. H. aime son sujet, mais il ne s'en efface pas moins derrière lui, laisse parler le document le plus souvent possible. Ici le document parle avec abondance: jour par jour, presque heure par heure, le P. Hyacinthe tenait depuis 1850 et tint jusqu'à ses derniers moments le journal exact de sa vie, faits matériels et faits spirituels, ces derniers en proportion plus forte, cela va sans dire. Ce journal, M. A. H. l'a eu entre les mains, il en a éclairé nombre de passages à l'aide d'une volumineuse correspondance qui lui a été confiée par le P. Hyacinthe ou par les siens, de papiers retrouvés dans sa succession, de souvenirs recueillis surtout de la bouche de son fils, M. P. Hyacinthe-Loyson, libre et ardent esprit tout récemment disparu... Ce livre sort directement de cette masse de témoignages dont tous sont vivants et concoureut à faire de cette histoire d'une âme austère le plus poignant des récits.

Ce premier volume retrace les années de formation du P. Hyacinthe, les expériences diverses que tente ce cœur droit à la recherche d'une vie religieuse, sa triomphale carrière de prédicateur, la période de doute, d angoisse, puis la rupture avec son ordre et avec l'Église romaine. Drame aux lentes péripéties, où l'évolution apparaît parfois comme indécise; mais sans doute se tromperait-on si l'on ne prêtait à ce drame qu'un intérêt purement religieux. Dans l'histoire de la pensie nous dirions pour un peu des formes littéraires de la pensée en France au xixe siècle, la physiono mie du P. Hyacinthe est de premier plan. M. Houtin a fait res

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