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selon leur technique, les organisent en systèmes particuliers. Elles sont les collaboratrices indispensables de l'histoire, mais elles ne sauraient la remplacer. C'est à l'historien qu'il appartient de peser ces résultats partiels et de les fondre en une synthèse. Et quand il s'agit d'une religion, mieux encore d'une religion de forme primitive, il faut à l'historien une préparation qui ne s'improvise pas.

La part que la science des religions a prise jusqu'ici aux études scandinaves est extrêmement limitée; il faut le regretter. Le livre de M. Chantepie de la Saussaye (The religion of the Teutons, Boston, 1902) n'a pas réalisé les espoirs suscités par un si grand nom. En Allemagne et en Scandinavie, divers auteurs ont essayé d'utiliser les méthodes de la sociologie ou de l'ethnologie religieuses et les ont appliquées de façon mécanique au monde des Germains. M. Fr. Kauffmann a par exemple essayé d'interpréter par les rites le mythe de Balder; la méthode dont s'inspire son livre (Balder, Mythus und Sage, Strasbourg, 1902) a fait ses preuves dans d'autres domaines, mais elle ne s'est pas montrée féconde dans le domaine germanique où tout le rituel nous échappe. D'autres auteurs ont emprunté au Golden Bough quelques schèmes commodes et les ont plaqués sans discernement sur les récits norrois: M. Gudmund Schütte a retrouvé à tort et à travers le rite du meurtre du dieu (cf. son article Gudedræbning i nordisk Ritus «Meurtre du dieu dans le rite scandinave » dans la révue Samlaren, 1915, p. 21 et suiv.). D'autres enfin cherchent des parallèles ethnographiques dans la religion des primitifs. M. Helge Rosén a usé largement de la méthode comparative dans ses études sur « le royaume des morts et les rites funéraires >> (Om dödsrike och dödsbruk i fornnordisk religion, dissert., Lund, 1918). Ce sont là des efforts méritoires. Mais il ne suffit pas d'avoir lu Frazer pour aborder avec compétence l'histoire des religions. L'étude des primitifs n'est féconde que si l'on a l'expérience de la pensée religieuse sous ses formes rudimentaires et si l'on est capable devant un système donné d'en saisir

la structure interne. Les sondages rapides dans l'ethnologie religieuse ne sont qu'un trompe l'oeil, car toutes les pièces se commandent elles perdent toute valeur quand on les considère isolément. En dehors de tout préjugé doctrinaire, il faut apporter à ces études une certaine perspicacité psychologique qui permette de dominer les ensembles. C'est à ce don de pénétration que l'œuvre de M. Vilhelm Grönbech (Vor Folkeætt i Oldtiden « Les Germains dans le passé », 4 vol. Copenhague, 1909-12) doit une place à part dans la production scientifique du début de ce siècle. Dans cette puissante synthèse, dont le premier volume a été âprement discuté, l'auteur a effacé de propos délibéré toute perspective historique; se bornant à l'analyse des textes où s'exprime la mentalité religieuse des anciens Germains, il a tenté une vaste reconstruction psychologique.

La carence des spécialistes est donc à peu près complète et il est apparu au cours du précédent exposé que l'histoire du paganisme est en grande partie l'œuvre des philologues. C'est eux qui le plus souvent ont assumé le travail difficile de la synthèse. Ils ont développé la runologie et la toponymie; ils ont combiné les résultats de l'archéologie et du folklore. En travaillant ainsi à l'histoire religieuse, les philologues continuent une tradition vieille d'un siècle. Fondée par Jakob Grimm, la «< mythologie» est restée une annexe de la philologie germanique. On ne saurait déplorer une tradition aussi honorable: elle a assuré la continuité des recherches et maintenu de précieuses habitudes de rigueur. Mais on peut souhaiter aujourd'hui, comme le font les philologues eux-mêmes, que l'histoire de la religion des Germains s'émancipe enfin de cette tutelle un peu lourde et qu'elle profite davantage d'une science dont elle relève naturellement de la science des religions.

Maurice CAHEN.

LA PENITENCE DANS LES ÉGLISES D'ITALIE

AU COURS DES IV ET Ve SIÈCLES

On va mettre ici à contribution saint Ambroise, les papes Sirice et Innocent, saint Jérôme, les papes Célestin, Léon et Gélase. On n'a rien à glaner dans les écrits de Maxime de Turin, de Rufin, de Gaudence, de Pierre Chrysologue, de Nicétas. Le pape Marcel est mentionné dans l'étude sur saint Léon et un texte du pape Félix III est incorporé dans l'étude sur Gélase.

I. SAINT AMBROISE.

Celui qui veut connaître la doctrine pénitentielle de saint Ambroise, doit interroger tout d'abord le De paenitentia écrit vers 384. Cette dissertation est assez décousue. On peut, par la pensée, en remanier l'ordonnance et la diviser en deux parties : l'une d'un caractère polémique et dirigée contre les novatiens; l'autre d'un caractère pratique et comprenant des exhortations à l'adresse des pécheurs.

Contre le rigorisme novatien qui excommunie le pécheur et lui prescrit la pénitence, mais lui refuse le pardon, Ambroise reconnaît que ceux qui ont commis des fautes graves doivent être excommuniés et soumis à la pénitence publique; mais il veut qu'on les réintègre et qu'on les admette à la communion quand leur pénitence est accomplie.

La loi de l'excommunication pour les péchés graves repose, selon lui, sur le texte de saint Paul qui menace les Corinthiens de venir avec une verge (I, 78): « Il est venu avec une verge, parce qu'il a écarté le coupable de la communion sacrée. Il est vraiment livrée à Satan, celui qui est séparé du corps du Christ... On doit donc écarter celui qui est gravement coupable pour empêcher un peu de levain de corrompre toute la pâte ».

La loi de la réintégration repose, elle aussi, sur l'exemple de Paul qui s'est déclaré prêt à rendre les sacrements au coupable pénitent (I, 80): « Reddendum sacramentis judicavit coelestibus si purgari se ipse vellet ». Elle repose surtout sur la parole évangélique Quorum remiseritis, parole par laquelle le Christ a accordé aux apôtres et aux évêques successeurs des apôtres le pouvoir de remettre les péchés par la pénitence (II, 12, voir aussi I, 6-8): « Impossibile videbatur per paenitentiam peccata dimitti, concessit hoc Christus apostolis suis, quod ab apostolis ad sacerdotum officia transmissum est ». Elle repose sur cette autre parole évangélique : Quaecumque ligaveris, parole qui a octroyé à Pierre le pouvoir de lier et de délier, et en vertu de laquelle les apôtres ont prêché la pénitence, promis le pardon et remis les fautes (II, 34, 35; voir aussi I, 32, 33) : « Apostoli hoc habentes secundum Christi magisterium paenitentiam docuerunt, spoponderunt veniam, culpam relaxaverunt ».

Attestée par les textes évangéliques et la conduite dest apôtres, la loi de la réintégration des coupables pénitents est encore postulée par la raison. Comment, en effet, aménera-ton le pécheur à faire une pénitence dont il ne doit retirer aucun fruit? (I, 89; voir aussi I, 29): « Frustra enim dicitis vos prædicare pænitentiam qui tollitis fructum pænitentiae ». Or une pénitence qui n'est pas couronnée par la communion est une pénitence sans fruit, sans récompense (I, 90): « Quomodo ista recipit, si ei communio non refunditur? » « Je veux, poursuit Ambroise, que le coupable puisse espérer le pardon : Volo veniam reus speret». Il ajoute un peu plus loin que le pécheur est incité à la pénitence par l'espoir d'obtenir la com

munion (II, 16): « Emerendi gratia sacramenti ad precandum impellimur; et hoc auferre vultis propter quod agitur paenitentia ». Il conclut (II, 19) que le Seigneur ordonne très clairement d'accorder aux plus grands coupables, quand ils ont fait pénitence, le bienfait du sacrement céleste sacramenti coelestis refundendam gratiam.

Les Novatiens, cela va sans dire, alléguaient en leur faveur divers textes scripturaires, notamment le passage de l'épître aux Hébreux qui semble présenter comme irréparable la chute du chrétien. Mais Ambroise a réponse à tout et, avec une demi-douzaine d'enfantillages, il dénoue comme en se jouant les difficultés qui paraissaient les plus insolubles (I, 44-78; II, 6-12, 20-34). Et puis il met les Novatiens en opposition avec eux-mêmes. II leur dit : (I, 36) « Pourquoi baptisez-vous puisque vous prétendez que les péchés ne peuvent être remis par le ministère d'un homme? Tous les péchés sont remis par le baptême. Qu'importe que les évêques prétendent exercer ce droit par la pénitence ou par le baptême, Quid interest utrum per paenitentiam an per lavacrum hoc jus sibi datum sacerdotes vendicent? Vous direz peut-être que, dans le baptême, c'est la grâce des mystères qui opère operatur mysteriorum gratia. Mais, dans la pénitence, n'est-ce pas le nom de Dieu qui opère? Quid in paenitentia? Nonne Dei nomen operatur? » Donc le pouvoir de remettre les péchés a été donné par le Christ aux apôtres qui l'ont transmis aux évêques (11, 12):

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quod ab apostolis ad sacerdotum officia transmissum est »; en d'autres termes, le Christ a octroyé aux évêques le droit de remettre tous les péchés sans exception (I, 10) : « Relaxandi licentiam sacerdotibus suis sine ulla exceptione concessit ». Mais, remarquons-le, pour remettre les péchés, il faut avoir reçu le Saint-Esprit, attendu que le Christ, avant de dire: Quorum remiseritis, a commencé par faire cette déclaration : Accipite Spiritum sanctum (I, 8). La fonction qu'exercent les évêques est un don du Saint-Esprit (ibid.): « Munus Spiritus sancti est officium sacerdotis ». Or, pour recevoir le Saint

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