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forme de figures géométriques1 dans lesquelles nous reconnaissons volontiers des bétyles (pl. III, 1-7). La même interprétation peut s'appliquer, semble-t-il, à certaines silhouettes offrant l'apparence de momies (pl. III, 8) ou de jarres. Sur quelques autels cependant, il s'agit bien de représentations humaines déesse se touchant les seins, personnage debout.

Les stèles appartiennent au type courant déjà représentés par milliers d'exemplaires au C. I. S. Toutefois quelques-unes ayant la forme d'un obélisque emboîté sur une base rectangulaire pourraient être en définitive de lointaines images de bétyles (pl. IV, 1).

Le décor presqu’invariablement gravé au trait ou à la roulette, offre rarement une représentation de l'homme ou de l'animal. Deux ex-voto font pourtant exception. Leurs images inspirées des gravures des hachettes-rasoirs des nécropoles, l'un des produits les plus caractéristiques de l'industrie carthaginoise 2, témoignent de la gaucherie et du manque d'habileté du lapicide. Sur l'un de ces petits monuments (pl. IV, 2) le vêtement est indiqué par un ensemble de traits flottant le long du corps depuis les hanches jusqu'à mi-jambes et plaquant la robe aux poignets et au cou3. Le graveur a été incapable de se reconnaître dans cet enchevêtrement de lignes. Des traits qui devaient figurer la robe, un seul est gravé, qui, par une bizarrerie que seule l'incompréhension du modèle peut expliquer, forme en arrière du corps un angle droit avec la ligne de sol. On remarquera de même, sur la stèle au faucon (pl. IV, 3), que les serres s'attachent directement aux tarses. Du reste, dans le rendu des symboles qui couvrent la majorité des stèles, on constate de nombreux exemples de déformations analogues. C'est ainsi, par exemple, que la bouteille subit de graves altérations :

1. On notera que parmi ces figures il est en une que l'on rencontre beaucoup plus fréquemment que les autres, c'est celle de l'hexagone losangé.

2. Gsell, op. cit., IV p. 77.

3. Pour un rendu analogue des vêtements, voir certaines hachettes-rasoirs de la nécropole punique d'Ard-el-Kheraïb. (Merlin et Drappier, La nécropole punique d'Ard-el-Khéraïb, p. 40, 51; Cat. du Mus. Alaoui, suppl. pl., LXII, LXIIN.

ici les deux parois du vase seront maladroitement rapprochées vers la base jusqu'à en faire une sorte de jarre sans pied (pl. IV, 17); dans d'autres cas, la bouteille, à l'instar du signe de Tanit, se convertira en une sorte de bonhomme informe par un rapprochement du disque solaire se soudant au goulot 2.

Certaines règles ont présidé à la disposition des images sur les stèles : elles occupent toujours la place d'honneur au sommet du monument; quand il s'agit de l'homme ou de l'animal ils regardent vers la gauche et cela, semble-t-il, pour un motif rituel 3.

L'interprétation de l'oiseau est certaine : c'est le faucon d'Horus, pour la première fois figuré sur une stèle. Celle du personnage est plus délicate. On doit toutefois rejeter nettement l'hypothèse d'une représentation divine. De même que l'on retrouve l'épervier gravé sur une hachette punique de la nécropole d'Ard-el-Khéraïb 5, un sujet identique à celui de la stèle au personnage est reproduit sur une autre hachette provenant du même cimetière. L'une des faces de ce petit monument montre des représentations figurées. dans lesquelles on avait cru reconnaître un petit personnage accroupi dans les branches d'un arbre au pied duquel passe un animal, veau ou bélier; en haut, à gauche, des traits assez vagues se rapportent à un motif difficile à préciser. Un nouvel examen de la hachette a permis de distinguer très nettement l'épaule, l'échancrure du vêtement à la base du cou et le haut bonnet d'un homme debout contre la poitrine duquel est accroupi

1. Gsell op. cit., IV, p. 382-383.

2. Cette dégénérescence du type primitif par incompréhension du graveur est particulièrement apparente sur quelques stèles de Carthage. Cf. C. I. S., pars I, t. II, pl. XXVIII, no 132; pl. LIX, 2869; etc. Cf. Gsell, op. cit., p. 370, n. 6.

3. M. Vassel (Revue Tunisienne, 1919, p. 186) signale que les images de béliers, si fréquemment reproduites sur les monuments de Carthage sont toujours tournés vers la gauche. Il en est de même pour la plupart des autres animaux (du même. Revue de l'Histoire des Religions, 1921, p. 74-75).

4. Les oiseaux jusqu'à ce jour figurés sur les stèles puniques sont le coq, la colombe et le cygne. Cf. Vassel, Revue Tunisienne, 1920, p. 320.

5. Merlin et Drappier, op. cit., p. 65, fig. 37.

6. Ibid., p. 58, fig. 32.

le petit personnage, dans une position identique à celle figurée sur notre grande stèle. L'explication de ces deux scènes nous est fournie par un texte également recueilli à Salammbô et sur lequel M. Dussaud' a lu la mention d'un sacrifice humain offert à la divinité, à Tanit. Nous sommes donc en présence de deux personnages, deux Carthaginois bien reconnaissables à leur bonnet cylindrique et à leur longue robe, apportant l'un et l'autre le petit enfant destiné au sacrifice.

Sur les autres stèles, on rencontre exceptionnellement figurés la main, le caducée, le rameau arborescent, la palmette, les épis, la fleur de lotus, la fleur cordiforme, les vases sacrificiels, le disque et le croissant3; la majorité des représentations se rapporte au symbole dit de Tanit et à la bouteille.

La figure que pour plus de commodité nous avons désignée sous le nom de « bouteille », diffère totalement des images de vases reproduits sur les ex-voto puniques. Il est d'autant plus remarquable de la rencontrer dans notre sanctuaire avec une telle fréquence, que jusqu'à cette découverte on n'en connaissait qu'un nombre d'exemplaires relativement res

1. Ce texte a d'abord été publié par M. l'abbé J.-B. Chabot dans les C. R. de l'Acad. des Inscr., 1922 p. 112 et suiv. M. Dussaud (Bull. Arch. du Comité, 1922. sous presse) propose la lecture suivante : « Offrande du fils que ton serviteur a voué » au lieu de « stèle de pierre qu'a vouée... » selon la traduction de M. l'abbé Chabot,

2. La feuille cordiforme sur les stèles du sanctuaire de Salammbô occupe une place de premier plan, soit en haut du monument, soit inscrite dans un symbole de Tanit. On la retrouve sur un certain nombre d'ex-voto puniques (C. I. S., pars I, t. I, pl. LI, 300; t. II, pl. VIII, 716, 721 ; pl. X, 823 ; pl. XVII, 1121 ; pl. XVIII 1558; pl. XXX, 1593; pl. XCIV, 2158; pl. LII, 2469; pl. LIII, 2522; pl. LVII, 2759). Le même symbole apparaît sur des anses d'amphores puniques accompagné du croissant et du disque (Gauckler Nécropoles puniques, II, p. 588, fig. 752). La feuille cordiforme si souvent reproduite sur les mosaïques romaines d'Afrique a donc vraisemblablement son origine dans un symbole divin usité à Carthage. Cf. A. Merlin, Bull. Arch. du Comité, 1912, p. 518-519.

3. Pour l'étude de ces divers motifs et pour celui du signe dit de Tanit, nous ne pouvons que renvoyer aux pages excellentes que leur consacre M. Gsell, op. cit. p. 352-371, 377-390.

4. Vassel dans Renault, Cahiers d'archéologie tunisienne, nouv. ser., II, 1914, p. 208-209; Gsell op. cit., IV, p. 370.

treint. Nous inclinons volontiers à reconnaître dans cet objet placé sur un socle à forte gorge la figure plus ou moins schématisée d'un bétyle tenant en quelque sorte le milieu entre un omphalos de forme ovoïdale 2 et celle d'un cylindre coiffé d'une demi-coupole 3. Le symbole dit de 3. Tanit et la palmette qui, à deux reprises, couvrent en partie la bouteille reproduisent peut-être des motifs gravés ou incrustés sur le bétyle; dans la partie supérieure formant goulot, nous proposons de voir soit un ornement, soit plutôt un moyen d'attache.

Il est en tout cas hors de doute que le symbole de la bouteille ait été une image divine. La place d'honneur qu'il occupe sur la stèle, la transformation du socle en un petit autel à gorge et à base trapézoïdale nettement caractérisée (pl. IV, 16, 18) et le temple d'ordre éolique (pl. IV, 19-20) qui l'encadre le prouvent suffisamment . C'est une pierre sacrée, l'habitat d'un dieu, comme l'obélisque, la pyramide, le cône qui, du haut d'un socle ou d'un autel, s'offre à la vénération des fidèles.

Ce bétyle, de même que le signe de Tanit, paraît alors associé à l'un des cultes de Tanit Péné Baal ou de Baal Ham

1. Bouteilles figurant sur des ex-voto de Carthage, d'Hadrumète, de Nora (Sardaigne), cf. Gsell, op. cit, p. 370 et no 4-6.

2. Les bétyles en granit de la cachette de Gauckler Bull. Arch. du Comité, 1899, p. CLXII; des Inscr., 1899, p. 170.

Dermech sont ovoïdes. Cf. du même, C. R. de l'Acad.

3. Sur les bétyles de Carthage, cf. Delattre, Cat. du Mus. Lavigerie, I, p. 78-79, pl. XI, fig. 4; Cat. du Mus. Alaoui, p. 47, no 1; Gsell, op. cit., IV, p. 374 et suiv. De même certains boulets semblent bien être des bétyles (cf. Gauckler, Nouv. Arch. des Miss., XV, p. 573-574).

4. M. Carton (Le sanctuaire punique d'El-Kenissia, p.. 57, 142) propose de voir dans le goulot de la bouteille «< un appendice cervical ». Comme nous avons tenté de le démontrer, l'aspect anthropomorphique présenté à une basse époque par certaines de ces images (étage D) est le fait de graveurs ignorants qui veulent interpréter des symboles qu'ils ne comprennent plus à l'aide de figures n'ayant aucun rapport avec ces représentations.

5. Des bijoux trouvés à Carthage et en Sardaigne montrent des bouteilles dressées sur des autels et flanquées de serpents, cf. Gsell, op. cit., IV, p. 371, n. 1. 6. Gsell, op. cit., IV, p. 389.

mon que les inscriptions1 de stèles nous montrent avoir été adorés en ce sanctuaire.

Il serait tentant de voir également dans le fragment de statue utilisé dans le mur romain, l'image d'une des divinités de ce lieu de culte, peut-être même celle de Tanit assise entre deux sphinx. Mais on ne doit pas oublier que l'hospitalisation d'une divinité par une autre est fréquente en Afrique; notre sanctuaire en fournit un exemple caractéristique par la présence du faucon d'Horus en tête d'une des stèles.

C'est en tout cas la première fois que dans le sol de Carthage on a pu recueillir un fragment de statue de divinité punique exécuté en ronde-bosse .

La céramique des deux premières couches archéologiques est un nouveau témoignage de la facilité avec laquelle la civilisation punique s'empare d'éléments étrangers et les transforme au point de les rendre difficilement reconnaissables. Les fouilles de Salammbô, à cet égard, confirment les déductions que l'on pouvait tirer de l'examen de poteries tout à fait identiques découvertes à Motyé, en Sicile, au cours de ces dernières années.

1. Les estampages des dédicaces recueillies ont été envoyées à M. l'abbé Chabot et à M. Dussaud qui ont bien voulu se charger de les lire et de les commenter. D'après les renseignements qu'ils nous ont communiqués les formules sont toujours les mêmes « A la grande Tanit face de Baal et à Baal Hammon ce qu'a voué un tel... »

2. M. Merlin (Bull. Arch. du Comité, 1919, p. 181 no 6) propose de voir dans la statue de divinité assise entre deux sphinx découverte à Thuburbo Majus, une image de déesse plutôt que celle d'un dieu (Cf. du même, Le sanctuaire de Baal et de Tanit près de Siagu, p. 41, no 3; Bull. Arch. du Comité, 1915, p. CLIX). La même déesse paraît figurée sur des statuettes de terre cuite représentant une divinité assise entre deux sphinx, provenant de Thuburbo Majus (Merlin, Bull. Arch. du Comité, 1915, p. CLVIII-CLIX et C. R. de l'Acad. des Inscr., 1917, p. 68) et d'ElDjem (du même, Bull. Arch. du Comité, 1912, p. 513 et pl. LXXVII) ; à Solonte, colonie phénicienne, on a trouvé une statue de la déesse assise entre deux sphinx (Pace, Atti de la R. Acad. dei Lincei, 1917, 5, XV, p. 551 et pl. III). M. Gsell identifie cette divinité féminine avec une Astarté; mais Astarté lui paraît être la même déesse que Tanit Péné Baal (Gsell, op. cit., IV, p. 265).

3. Merlin, Le sanctuaire de Baal et de Tanit..., p. 35-38.

4. On sait, en effet, que les deux ou trois seules sculptures en rondebosse qu'on puisse considérer comme exécutées à Carthage sont des représentation d'orants. Cf. Boulanger, Cat. du Mus. Lavigerie, suppl., p. 4.

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