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des jésuites il y aurait encore plus à dire. Elle est entièrement représentée d'après l'hagiographie reçue et les légendes traditionnelles. Néanmoins le ton candide du récit désarme. Avec lui, on est loin des finasseries des Pères Burnichon et Brucker, les deux plus récents historiens de la Compagnie en France. Sous plusieurs rapports un livre vaut mieux que les leurs. Je suppose que l'auteur est un vétéran des missions qui n'est que là sur son vrai terrain. La principale utilité de son livre pourrait bien être de prouver qu'il n'y a pas d'« internationale jésuite ». S'il en existait une, les jésuites français auraient sans doute rendu au Père Campbell le service de réviser son récit et de corriger ses épreuves.

II.

Le livre de M. Charny se divise en 4 chapitres :

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Le 1er est consacré aux « Euvres jésuites en France », « œuvres de direction et de propagande générale; œuvres de recrutement; œuvres professionnelles et sociales ». L'auteur attribue aux jésuites à peu près toutes les œuvres actuelles d'organisation catholique ; toutes les entreprises d'apologétique. Il déclare, par exemple, « organe jésuite » la Revue des Jeunes, qui est un «< organe » dominicain. Il ne faudrait cependant pas confondre Rome et Carthage.

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Le 2o, intitulé «< la politique internationale de la Compagnie de Jésus », prétend examiner « l'attitude de la Compagnie avant et pendant la grande guerre », « la confédération internationale des syndicats chrétiens », « l'internationalisme des Jésuites ». « Par un retour imprévu des choses d'ici-bas, Ledochowski s'est découvert Polonais après l'armistice et Hervé jésuite après les élections. » M. Gustave Hervé a-t-il donc fait profession dans la Compagnie de Jésus? Quant au Père Wladimir Ledochowsky, supérieur général actuel de la Compagnie de Jésus, s'il s'est trouvé Polonais après la guerre, c'est tout simplement que son infortunée patrie a ressuscité, et que la province à laquelle appartenait sa famille a été libérée du joug autrichien. « Nous savons que le Père Ledochowski avait ses entrées à la Cour de Vienne. » - Pourquoi pas, puisqu'il était d'une illustre famille censée autrichienne ?

Quoi qu'en dise l'auteur, les jésuites de tous les pays, durant la grande guerre, ont accompli leurs devoirs de citoyens. Si 855 jésuites ont été mobilisés en France, il y en a eu 82 en Autriche, 376 en Alle

magne, 369 en Italie, 165 en Belgique, 83 en Angleterre, 30 en Irlande 4 au Canada, 50 aux Etats-Unis.

Chapitre III, «L'esprit et les méthodes de la Compagnie de Jésus ». --- << Savez-vous ce que l'Association d'Hulst, œuvre jésuite, dirigée par le R. P. Piolet, offre aux prêtres de campagne désireux de poursuivre leur instruction chrétienne? Des œuvres de MM. Marcel Prévost, Max et Alex Fischer, René Maizeroy, Henri Lavedan, Barbusse, Sacha Guitry, etc. etc. »«Ne nous laissons pas égarer par le double jeu de la Compagnie! Il y a, c'est entendu, des Jésuites de droite et des Jésuites de gauche. Il y a, par exemple, le R. P. Pesch, jésuite allemand, qui se proclame anticapitaliste, et il y a M. René Bazin, qui écrit dans l'Echo de Paris. » Est-ce que M. Bazin, comme M. Hervé, est un profès de la Compagnie ? — Dernière phrase du chapitre : « Qu'est-ce en effet que la Compagnie de Jésus, sinon la réunion des politiciens, c'est-à-dire des profiteurs du catholicisme? » L'auteur n'a-t-il donc jamais rencontré de sa vie un seul jésuite ?

Chapitre IV, «le but des Jésuites ». - Début : « Ainsi la Compagnie de Jésus demeure aujourd'hui ce qu'elle était hier : une association internationale dont les méthodes, dictées par une sorte d'égoïsme sacré, bravent audacieusement les lois, universellement acceptées, de la recherche scientifique... » Et les rédacteurs des Analecta Bollandiana, des Monumenta, les Kircher, les Secchi, les Sommervogel !.... Le livre fourmille de phrases qui, autant que celles-ci mériteraient d'être citées, mais celles-ci ne renseignent-elles pas suffisamment sur le genre?

III. La nouvelle brochure de M. de Récalde se divise en 4 chapitres.

1. « Les Jésuites, par un des leurs », c'est-à-dire le P. Cros (18311913). D'après la correspondance de Cros, la Compagnie s'efforcerait de détruire l'Eglise hiérarchique présente, en France et ailleurs, pour lui substituer les Jésuites et leurs créatures.

2. Le bref de Clément VIII, du 8 août 1596, relatif au livre des Ordonnances publié par Aquaviva.

3. Notes sur la béatification de S. Ignace.

4. Notes sur la controverse de Auxiliis, sur les origines du laxisme et les papiers de Clément XIV.

Comme les précédentes publications de M. de Récalde, celle-ci n'est pas très flatteuse pour la Compagnie. Nous avons dit (n° d'avril 1923, p. 161) que nous nous ferions un devoir de signaler les réfutations qui lui seraient opposées. Jusqu'à présent il ne s'en est produit qu'une seule, et nous nous empressons de la noter, bien qu'elle soit d'une nature aussi traditionnelle que peu scientifique : le tome 1er de son adaptation de l'importante Histoire intérieure de la Compagnie de Jésus par Mir, dont il avait commencé la publication, a été condamné par le Saint-Office, le 2 mai 1923. M. de Récalde annonce qu'il n'imprimera pas la suite, « jusqu'à ce que l'autorité compétente >> l'y autorise. En attendant, il a voulu publier un bref inédit de Clément VIII, qu'il sera, croit-il, « difficile de déférer au Saint-Office », et il exprime cette opinion: « Une histoire générale de la Compagnie de Jésus, d'un point de vue impartial, est aujourd'hui encore impossible, faute d'une documentation complète sur trop de points obscurs ou même inexplorés ; et une chronique de l'état actuel de la Compagnie semble moins abordable encore. Où puiser des renseignements sûrs ? Quelle enquête éclaicira les situations délicates ?».

Albert HoUTIN.

NOTICES BIBLIOGRAPHIQUES

Alexander A. GOLDENWEIser, Lecturer on Anthropology and Sociology at the New School for Social Research, New-York; sometimes Lecturer on Anthropology in Columbia University. Early Civilisation. An Introduction to Anthropology (Alfred A. Knopf, New-York, · 1922, in-8o, XIV-428 pages; prix : 5 dollars). << Tandis que l'origine psychologique des religions peut être éclaircie au moins théoriquement, nous ne connaissons au point de vue historique presque rien de leur origine. » Telle est la conclusion de M. Goldenweiser sur les points qui intéressent particulièrement les historiens des religions. Si négative qu'elle soit, son livre n'en mérite pas moins qu'ils l'étudient. Il con tient de curieuses observations sur la religion et la magie, ainsi que sur les commencements de certaines religions au XIXe siècle et la lumière dont ils éclairent le problème des origines. L'auteur critique aussi d'une manière remarquable les théories de la mentalité primitive exposées par Spencer, Frazer, Wundt, Durkheim, Lévy-Bruhl et Freud.

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A. HOUTIN.

W. MÜLLER. Das Problem der Seelenschoenheit im Mittelalter. Ein Begriffs geschichtliche Untersuchung. Berne, P. Haupt, 1923, un vol. in-8° de 80 p. Nous tenons à signaler sans retard cet ouvrage sous un mince volume, il renferme les éléments essentiels d'une étude qui est d'une rare ampleur, puisqu'en fait il s'agit ici des rapports entre l'éthique · ou la sainteté — et l'esthétique, en un temps où les domaines n'en avaient pas encore été délimités par l'usage scolaire ni même par la hiérarchie dogmatique. C'est l'histoire de cette discretio spirituum que trace M. Walter Müller, non seulement, comme le dit trop modestement son titre, à travers le MoyenAge, celui de Boëce, d'Alcuin, de Raban Maur, de la mystique bernardienne, de la scolastique thomiste, mais aussi dans la Renaissance et dans les temps modernes, la puissante information de M. W. M. lui permettant de rechercher l'histoire et la définition de la « belle âme » jusque dans les écrits de très actuels penseurs, poètes, romanciers ou hommes de théâtre. Certaines de ces analyses sont seulement indiquées, ébauchées ; il n'en pouvait être autrement, étant donné ce sujet presque sans limites mais tous ces courts chapitres exposent

les lignes indispensables de la doctrine, les problèmes primordiaux, et fournit en même temps que les textes les plus utiles, la bibliographie la plus généreuse.

P. A.

ADAM LE Bossu. Le Jeu de la Feuillée et le Jeu de Robin et Marion traduits par Ernest Langlois. Paris, De Boccard, 1923, pet. in-12 de XXXI-159 pages. Rarement collection de vulgarisation s'est présentée sous des garanties aussi éminentes de rigueur scientifique : c'est M. Jeanroy qui dirige ce recueil de Poèmes et récits de la vieille France mis en nouveau langage, et le premier de ces petits volumes, présentés avec un art typographique très séduisant, contient la traduction du Jeu de la Feuillée et du Jeu de Robin et Marion, d'Adam le Bossu, par M. Ernest Langlois. On connaît le haut mérite de cet historien de la littérature médiévale; on sait aussi qu'il nous a donné, il y a quelques années, dans la Collection des Classiques français du Moyen-Age une impeccable édition du Jeu de la Feuillée et nous en promet une du Jeu de Robin et Marion pour la même collection. C'est, des deux pièces du trouvère artésien, le Jeu de la Feuillée qui intéresse le plus l'histoire des religions et le folklore, puisque Robin et Marion n'est guère que la fort agréable mise à la scène d'un thème de pastourelle: la Feuillée, qui n'a encore été que trop sommairement envisagée sous cet angle, contient des éléments religieux très importants: le personnage du moine montreur de reliques, le dénoûment (si cette << revue locale » comporte un dénoûment) amené par l'arrivée, d'ailleurs attendue, des Fées, et en particulier de Dame Morgue, enfin le vieux motif goliardique de la Roue de fortune prenant une importance qui, pour un peu, ferait conclure à un certain fatalisme dans ce milieu au demeurant peu soucieux des choses éternelles.

P. A.

G. LIZERAND. Le dossier de l'Affaire des Templiers (édité et traduit par G. Lizerand). Paris, E. Champion, 1923, un vol. (de la Collection des Classiques de l'Histoire de France au Moyen-Age). XXI V229 pages in-12. L'excellente collection organisée par M. L. Halphen et qui nous a donné comme volume inaugural une édition de la Vie de Charlemagne d'Eginhard, récemment louée ici, se continue par un volume sur le Dossier de l'Affaire des Templiers dont M. G. Lizerand, auteur d'un très sûr ouvrage sur Clément Vet Philippe le Bel, a choisi et traduit les pièces les plus significatives. C'est une impression de clarté qui se dégage de ce choix judicieux: il ne garde de l'amas des textes (réunis ils forment un recueil de plus de 3.000 pages) que cette trentaine de pièces qui suffisent à montrer les phases du procès, la physionomie de l'Ordre du Temple au moment où l'affaire s'en

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