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1878

Protocole No. 10.

Roumanie. - Entrée de ses représentants.

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Séance du 1 juin 1878. Mémoire de Monsieur Cogalnicéano. Considérations de Monsieur Bratiano. Indépendance. Monsieur Waddington propose comme condition de la reconnaissance la liberté des cultes et l'égalité des droits. Accueillie à l'unanimité. Réserve du Comte Schouvalow au sujet de la rétrocession de la Bessarabie. Monsieur Waddington propose compensation territoriale, comprenant Silistrie et Mangalia. - Discussion. - Proposition russe d'un nouveau tracé de frontière. — Proposition anglaise sur l'île des Serpents.- Tribut et dette. Proposition ottomane. Indemnité, droits des Roumains en Turquie. Proposition ottomane, suppression des alinéas relatifs. Monténégro. Frontières. Motion austro-hongroise. Annexe contenant le tracé des frontières. Réserves austro-hongroises sur Antivari. Motion ottomane contre la cession d'Antivari. Indépendance. Discussion. Liberté des cultes. Proposition austro-hongroise. Dette ottomane. Proposition ottomane. habitants et Vakoufs. Proposition anglaise. Evacuation du territoire ottoman. Discussion.

Droits des

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Les Protocoles 8 et 9 sont adoptés.

Le Président fait mention des pétitions résumées dans la liste No. 8.

Le Comte Schouvaloff rappelle que, dans une séance précédente, il a pris ad referendum la question du passage et du droit de garnison de l'Autriche-Hongrie dans l'enclave: à la suite d'une entente avec le Comte Andrássy, M. le Plénipotentiaire de Russie retire ses objections et adhère à la proposition de M. le Plénipotentiaire d'Autriche-Hongrie.

L'ordre du jour appelle en premier lieu l'audition des Représentants de Roumanie. Le Président, en se conformant à la décision prise par le Congrès dans la dernière séance, a invité MM. Bratiano et Cogalniceano, ministres du Prince Charles de Roumanie, à faire, dans la séance de ce jour, les communications dont ils seraient chargés.

Les délégués roumains, MM. Bratiano et Cogalniceano, sont introduits, et le Président les prie de prendre la parole pour expliquer les opinions et appréciations de leur gouvernement sur les points du traité de San Stefano qui les concernent.

M. Cogalniceano remercie le Congrès d'avoir bien voulu admettre les Représentants roumains et donne lecture du mémorandum suivant:

>>>Messieurs les Plénipotentiaires,

»Nous avons, tout d'abord, à coeur de remercier le Congrès de vouloir bien entendre les délégués roumains au moment de délibérer sur la roumanie. C'est un nouveau titre ajouté par l'Europe à ceux qui lui ont valu dès longtemps la reconnaissance de la nation Roumaine, et ce gage d'unanime bienveillance nous paraît être d'un heureux augure pour le succès de la cause que nous sommes appelés à défendre devant vous.

»Nous n'insisterons pas sur les événements dans lesquels nous avons été entraînés par des nécessités de force majeure. Nous passerons également sous silence soit l'action militaire à laquelle nous avons participé, soit l'action diplomatique à laquelle il ne nous a pas été donné de prendre part. Nous avons eu occasion de constater déjà que la période des négociations nous a été moins propice que la fortune des armes.

>>Nous nous bornerons à exposer les droits et les voeux de notre pays, sur la base du résumé présenté dans le mémoire que nous avons eu l'honneur de soumettre récemment au Congrès.

>>1. Nous croyons qu'en bonne justice aucune partie du territoire actuel ne doit être détachée de la Roumanie.

La restitution par le traité de 1856 d'une partie de la Bessarabie à la principauté de Moldavie a été un acte d'équité de

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1878 l'Europe. Le morcellement de 1812 ne pouvait pas se justifier par le fait ou le droit de la conquête.

>>En 1812, la Bessarabie relevait d'une principauté dont l'autonomie avait été attestée solennellement par tous les traités antérieurement conclus entre les empires russe et ottoman. Le traité de Kutchuk-Kainardji, particulièrement, reconnaissait aux princes de Moldavie et de Valachie la qualité de souverains, et établissait que la Bessarabie faisait partie de la Moldavie.

» C'était donc là un pays roumain, avec des institutions et des lois roumaines, explicitement maintenues par Sa Majesté l'Empereur Alexandre I. Ce respect de l'ancienne nationalité était formulé dans le rescrit impérial promulguant l'organisation administrative et judiciaire de cette province après son incorporation à la Russie, sans qu'il fût posé la moindre distinction entre la basse et la haute Bessarabie.

>> On a semblé vouloir conclure que la Bessarabie était une région turque ou tatare du simple fait que les ottomans y occupaient trois forteresses.

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Mais l'histoire de la Valachie présente une anomalie analogue; des forteresses turques y ont longtemps subsisté; il n'en résulte pas pourtant que la Valachie ait jamais été un pays turc.

>>En 1878, pas plus qu'en 1812, la Bessarabie ne peut être revendiquée de la Roumanie en vertu du droit de conquête. Elle appartient à une Principauté que la Russie elle-même, pendant tout le cours de sa récente guerre avec l'empire ottoman, a considérée et traitée comme un état indépendant et allié.

>> D'ailleurs, dès son entrée en campagne, la Russie a signé avec la Roumanie une convention par laquelle elle a expressément garanti l'intégrité actuelle du territoire roumain.

>>Cette garantie avait été demandée et accordée quand il ne s'agissait encore que du passage des armées impériales par la Roumanie. Il semblait qu'elle dût redoubler d'énergie du jour où, sur l'appel de la Russie même, le concours de la nation roumaine devenait plus positif et se transformait en coopération militaire effective, en complète alliance. Nos troupes ont, en effet, combattu côte à côte avec les armées russes. Si ce n'est pas là un titre pour nous agrandir, ce n'en est certes pas un pour nous diminuer. A défaut d'autres droits, la convention du 1 avril 1877, qui porte les signatures et les ratifications du cabinet impérial, suffirait seule pour nous conserver une région importante du Danube, à laquelle se rattache si étroitement la prospérité commerciale de la Roumanie.

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»On a invoqué, à l'appui de la rétrocession de la Bessarabie, des considérations de reconnaissance et des souvenirs de

gloire et de valeur militaires. Mais, durant une longue série de 1878 guerres, les armes russes se sont illustrées sur bien des champs de bataille, et ont promené leur gloire jusque sous les murs d'Andrinople. Ce n'est pas là pourtant un titre à la propriété de la région des Balkans.

»>On a invoqué encore des considérations de reconnaissance. La Roumanie sait pratiquer les devoirs de la gratitude, et l'a maintes fois prouvé. Elle n'oublie pas son histoire ni le nom de bienfaiteurs; elle vénère en Catherine la Grande et en Nicolas I les généreux auteurs des traités de Kaïnardji et d'Andrinople.

>>Mais elle garde aussi la mémoire des sacrifices qu'elle s'est imposés pour l'agrandissement, la fortune et la gloire de la Russie. Elle se rappelle que, depuis Pierre le Grand jusqu'à nos jours, elle a été tour-à-tour ou simultanément la base des opérations militaires de la Russie, le grenier où s'alimentaient ses armées, alors même qu'elles agissaient audelà du Danube, et le théâtre trop souvent préféré des plus terribles collisions.

»Elle se souvient aussi qu'en 1812 elle a perdu, au profit de la Russie, la moitié de la Moldavie, c'est-à-dire la Bessarabie du Pruth au Dniester.

>>2. Nous demandons que le sol roumain ne soit pas assujetti à un droit de passage pendant l'occupation de la Bulgarie par les armées russes. Le Danube et la mer leur offrent les voies de transport et de communications les plus faciles et les moins coûteuses. La Roumanie après toutes ses épreuves, aspire à un repos absolu, nécessaire à la réparation des dommages causés par la guerre ce serait une mauvaise condition, pour l'accomplissement de l'oeuvre réparatrice et pour la tranquillité de notre pays, que la circulation de troupes étrangères.

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3. Il nous paraît juste que la Roumanie, en vertu de ses titres séculaires, rentre en possession des îles et des bouches du Danube, y compris l'île des Serpents. Il y aurait dans cette restitution un retour équitable aux dispositions originaires par lesquelles les grandes puissances avaient confié en 1856 aux principautés danubiennes la garde de la liberté du Danube à son embouchure.

>>4. Nous avons le ferme espoir que la Roumanie recevra du gouvernement impérial de Russie une indemnité de guerre en proportion des forces militaires qu'elle a mises en ligne. Nous croyons légitime, à tous égards, que les dédommagements stipulés et obtenus par la Russie au nom des divers

1878 états alliés soient répartis en raison de l'appoint militaire de chacun des belligérants. Le gouvernement impérial a reconnu le principe de cette répartition en faveur de la Serbie et du Monténégro, et insiste sur son application.

>>La Roumanie est fondée à en demander à son tour le bénéfice. En effet, obligée de tenir longtemps son armée mobilisée pour parer à des éventualités imminentes, elle a eu sous les drapeaux, tant comme armée active que comme armée de réserve, plus de 70.000 hommes. De plus, elle a subi des pertes considérables: ses villes et toute sa rive du Danube ont été saccagées par le bombardement, ses voies de communication détériorées, son matériel de guerre endommagé.

»Les compensations dues de ces différents chefs seraient prélevées sur l'indemnité totale allouée au Gouvernement impérial de Russie, et fournies en telle forme que le Congrès jugerait plus expédient.

>>5. La Roumanie a confiance que son indépendance sera définitivement et pleinement reconnu par l'Europe.

» A son droit primordial, dont le principe avait été faussé par des équivoques historiques, s'ajoutent aujourd'hui les titres dont elle a régénéré, a régénéré, ou plutôt rajeuni la conquête sur les champs de bataille. Dix mille roumains sont tombés autour de Plévna pour mériter à leur patrie la liberté et l'indépendance.

>>>Mais tous ces sacrifices ne suffiraient pas à assurer à la Roumanie la pacifique disposition de ses destinées. Elle serait heureuse et reconnaissante de voir couronner ses efforts qui ont manifesté son individualité, par un bienfait européen. Ce bienfait serait la garanti réelle de sa neutralité, qui la mettrait en mesure de montrer à l'Europe qu'elle n'a d'autre ambition que d'être la fidèle gardienne de la liberté du Danube à son embouchure, et de se consacrer à l'amélioration de ses institutions et au développement de ses ressources.

>> Tels sont, MM. les Plénipotentiaires, succinctement exposés, les voeux d'un petit état qui ne croit pas avoir démérité de l'Europe, et qui fait, par notre organe, appel à la justice et à la bienveillance des grandes puissances, dont Vous êtes les éminents représentants,«<

M. Bratiano lit ensuite les considerations ci-après:

L'exposé que mon collègue, en son nom et au mien. vient de tracer des droits et des intérêts de la Roumanie n'a pas besoin de plus longs développements.

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