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des textes qu'il étudie en s'efforçant dans ses traductions de rendre toute la couleur et le mouvement de l'original (1).

Il accompagne chacune de ces citations d'une brève caractéristique où abondent les remarques d'une grande finesse. Il est attentif à montrer la relation des productions littéraires avec l'état social et la mentalité générale de l'époque. J'ai été particulièrement heureux de constater qu'il fait une large place aux idées magiques pour expliquer les morceaux anciens.

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Je n'aurais à formuler, à propos de ce remarquable ouvrage, que quelques réserves d'une portée un peu générale. La répartition des pièces entre les quatre sections, que distingue M. Causse n'est exacte que grosso modo. Il était à prévoir, du reste, qu'une division par matière ne pouvait guère être en même temps rigoureusement chronologique. La poésie populaire primitive» a continué à être productive longtemps après l'installation en Palestine. Le mot d'ordre de Gédéon est naturellement postérieur à cet événement. La bénédiction de Melkisédeq doit être beaucoup plus récente encore. A vrai dire, parmi les pièces rangées par M. Causse dans cette section il n'y a guère que le chant de Lèmek (Gen. 4, 24), le chant de triomphe attribué à Miryam (Ex. 15, 21) et peut-être le chant du puits (Nomb. 21, 17) qui puissent, avec quelque assurance, être rapportés à la période nomade; encore ce dernier petit distique était-il peut-être, non pas un « chant de travail accompagnant le forage des puits, mais une sorte de prière-incantation rituelle qu'on adressait à une certaine source sainte, une source intermittente apparemment, peut-être celle de Beér, quand on venait lui demander une guérison ou un oracle. Encore aujourd'hui, les femmes désireuses de devenir mères prononcent une prière analogue à l'adresse de la fontaine miraculeuse d'Abou Sélim: « O source chaude d'Abou Sélim, si j'étais un enfant, je sacrifierai » (2). On pourrait supposer aussi que la formule devait amener le puits à se remplir en temps de sécheresse: Chez les Arabes, quand l'eau manquait, on organisait

(1) Certaines de ces interprétations prêteraient à discussion. On ne voit pas comment, à moins de corriger le texte, on peut rendre Michée 6, 8: « Homme, on t'a dit de faire ce qui est bien > au lieu de : < Homme, on t'a fait connaître ce qui est bien; ou : marcher humblement devant ton Dieu », au lieu de : < avec ton Dieu » (p. 168).

(2) Curtiss, Ursemitische Religion im Volksleben des heutigen Orients, p. 115.

auprès de la source d'Ilabistan une fête avec musique et danses pour la déterminer à couler de nouveau (1).

En ce qui concerne la poésie cultuelle, M. Causse a, j'en suis convaincu, pleinement raison de considérer, avec M. Mowinckel, comme très anciens les différents genres qu'elle comporte: chants de louange, supplications publiques ou individuelles (je préférerais le terme de supplication » » à celui de « lamentation» qui ne désigne pas la partie essentielle de ces pièces et risque d'amener des confusions avec la qînâ funéraire), actions de grâce, oracles liturgiques. Mais l'essai de M. Causse me parait montrer une fois de plus combien il est difficile de dire quels sont, parmi les psaumes qui nous ont été conservés, les pièces ou les fragments de pièces qu'on peut regarder comme anciens, à plus forte raison d'affirmer que parmi eux il y a des éléments << prévadidiques ». Les critères allégués sont bien subjectifs. Je persiste à douter fortement, par exemple, de l'antiquité d'Ex. 15, 1-18, des psaumes 44, 79 ou 100. Encore M. Causse n'a-t-il cité que quelques morceaux qu'il tient pour particulièrement typiques. Le départ entre parties anciennes et parties récentes apparaîtrait encore plus aléatoire si on voulait l'étendre à l'ensemble des textes qui nous ont été conservés. Je ferais exception pour les psaumes < royaux » : il me paraît établi maintenant qu'ils ont pour cadre naturel la « civilisation royale » telle qu'elle s'est développée en Israël entre David et l'exil babylonien, plutôt que l'époque postexilique, où les Juifs étaient soumis à des souverains païens, ou l'ère maccabéenne des rois-prètres hasmonéens. Ces psaumes relèvent de ce que M. Causse appelle fort justement la « religion de la royauté le souverain israélite, à l'imitation des princes cananéens, égyptiens, babyloniens, était revêtu d'un caractère si sacré qu'il était presque divinisé.

Un ouvrage aussi riche que celui que nous analysons appellerait naturellement plus d'une observation de détail. On ne voit pas de preuve documentaire bien solide qu'il ait existé dès l'époque de David des chantres professionnels dans les sanctuaires israélites (p. 84), ou que le cantique dit de Débora, les pièces du sépher hay-yachår et du sépher milḥamot Yahvé aient été accompagnés d'un commentaire en prose (p. 58 et 142). Les textes des Chroniques ne peuvent guère

(1) Auton Jirku, Die Dämonen und ihre Abwehr im A. T., 1912, p. 68.

a

être allégués pour prouver la pompe des cérémonies du Temple aux temps préexiliques M. Causse ajoute lui-même << l'auteur que transposé dans le passé lointain ce qu'il voyait du rituel du second temple (p. 133, note 2).

On connaît la formule employée Juges 17, 6; 18, I pour désigner l'époque antérieure à Saül: « En ce temps-là il n'y avait pas de roi en Israël et chacun faisait ce qui lui semblait bon. » M. Gausse y trouve l'indice que dans les nouvelles conditions politiques et économiques au temps de Salomon et des Omrides », l'âme d'Israël gardait la nostalgie des temps anciens, du lointain autrefois (p. 142143). Cette nostalgie a effectivement été répandue dans certains milieux, mais non pas dans celui auquel appartenait le rédacteur de cette formule: il allègue l'absence de rois pour expliquer et excuser la barbarie des scènes et l'illégalité des actes qu'il rapporte; c'était donc un royaliste authentique, convaincu que, avant l'institution de la monarchie, ne pouvait régner que l'anarchie, la licence et le droit du plus fort (1).

En terminant, exprimons un souhait. C'est que ce volume soit le premier d'une série où l'auteur étudierait dans le même esprit les différents genres cultivés par les Israélites et qui constituerait ainsi une histoire complète de la littérature hébraïque ancienne.

Adolphe LoDs.

(1) P. 93, à propos des sanctuaires israélites possédant une < cella › pour le dieu, il faut sans doute lire, non pas Gilgal, mais Nob, comme, p. 81, note 7; dans ce dernier passage lire I Samuel (et non II Samuel) XXI, 10. P. 60, ligne 14 « roi Sikhon et non < roi de Sikhon ». P. 100, ligne 6, lire préprophétique », je suppose.

Notices Bibliographiques

BULLETIN DE L'ECOLE FRANÇAISE D'EXTRÊME-ORIENT. T. XXV, 1925, nos 3-4 (juil.-déc. 1925). Hanoï 1926. Gd. in-8 de 653 p. Le travail toujours si consciencieux, si solide aussi, de M. L. FINOT constitue la majeure partie de ce numéro. En quelques pages, qu'étayent la publication et la traduction de plusieurs inscriptions, c'est toute une interprétation historique d'Ankor qui nous est présentée. Selon la stèle de Sdok Kak Thom, le roi Yaçodharman (889-910) fonda Yaçodharapura (Ankor Thom) et bâtit en son centre le Bayon, temple destiné au culte du linga Devarâja. Or un examen attentif montre que ce monument était primitivement un temple bouddhique, et que la capitale avait pour patron le bodhisattva Lokeçvara. M. Finot a donc établi que le Bayon ne pouvait point avoir été bâti par Yaçovarman le Çivaïte. Reste à savoir qui l'a érigé. Le présent travail conclut en faveur d'un prince antérieur, Jayavarman II (802-869), qui, venu de Javà (vraisemblablement la péninsule malaise), se saisit du trône cambodgien et s'y rendit indépendant. Dans une autre étude, le même auteur examine quelques monuments khmers qui ne sont pas des temples. Présentant une salle longue percée d'ouvertures sur une seule face, ils ne peuvent être classés dans cette catégorie. On suppose que c'étaient des ârogyaçâlás, hôpitaux ou infirmeries, tout au moins des dharmaçâlâs, maisons de charité » pour pélerins.

M. V. GOLOUBEW relève d'énigmatiques graffiti sur des roches de la région de Chapa (Tonkin). Parmi de primitives représentations de la forme humaine, on croit apercevoir des ébauches de caractères chinois. En ce pays de rizières, l'auteur se demande s'il ne s'agirait pas, comme ailleurs, de contrats passés entre tribus pour l'exploitation de ces cultures.

Signalons dans le même numéro, des notes de H. MARCHAL sur le monument 486 d'Ankor Thom; l'étude par MM. FINOT et GoLOUBEW d'un monument bouddhique, avec inscription indienne, à Yunnanfou; des notes d'archéologie chinoise par P. DEMIÉVILLE. Enfin une notice de L. AUROUSSEAU sur feu Cl.-E. Maître, si déplorablement perdu pour les études japonaises.

P. MASSON-OURSEL.

TRANSACTIONS OF THE ASIATIC SOCIETY OF JAPAN. 2d series, III, déc. 1926.

Au cours d'une conférence prononcée au Japon (1926), M. A. FouCHER montre que l'aire de développement de l'art gréco-bouddhique s'étendit entre Taxila vers l'E. et la vallée de Bâmiyân vers l'O. La région de Bactres est extérieure à cette aire; aussi n'enrichitelle pas, malgré les fouilles tenaces de la mission archéologique française, notre connaissance de l'art gandhârien. Ici comme d'habitude, le maître procède à une si lucide, si exhaustive analyse, que sa thèse est l'objet d'une véritable « démonstration ». (Titre: The cradle of graeco-buddhist Art.)

A. NEVILLE J. WHYMANT plaide, après examen des vocabulaires, en faveur de l'origine océanienne (malayo-polynésienne) de la langue et de la race japonaises.

E. W. CLEMENT fournit les éléments d'un dictionnaire numérique japonais (Numerical categories in Japanese).

MEMOIRS OF THE RESEARCH DEPARTMENT OF
Oriental Library). No I. Tokyo, 1926.

P. M.-O.

THE TOYO BUNKO (The

Etude très poussée, de KURAKICHI SHIRATORI Sur les titres de khan et de kagan. Ce dernier mot, d'origine mongole, a remplacé le terme de shan-yü. K. HAMADA, 'd'un examen des fouilles effectuées à la capitale du Yin, An-yang (Ho-nan), conclut que les plus anciens ivoires chinois impliquent l'existence d'éléphants indigènes, ayant vécu au Kouang-tong et au Kouang-si, apparentés sans doute aux stegodons de Java et de Bornéo. Il établit la connexion qui relie le travail sur ivoire à la gravure sur bronze et aux décorations de céramique. S. KATO: le Suan-Fou, la capitation sous les Han. M. HASHIMOTO: origine de la boussole. Il se fabriquait de ces instruments dès le Ie siècle. Mais « le véhicule pointant au Sud (chih-nan-ch'ê) n'a aucun rapport avec la polarité d'une pierre aimantée ou avec l'aiguille magnétique. Alors même que la pierre aimantée aurait été découverte séparément dans l'Ouest et en ExtrêmeOrient, l'aiguille magnétique, sa déviation et peut-être leur application à la navigation sont des inventions chinoises. Toutefois, nous -ne saurions décider si cette invention a eu quelque rapport avec les inventions des Arabes et des Européens (92). » R. TORII: Les dolmens de Corée. Ils ressemblent étrangement à ceux de Bretagne. Mais peu ou point de ces édifices au Japon; ils ont dû être érigés antérieurement à l'émigration des Yamato dans l'archipel nippon. P. M.-O.

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