Slike strani
PDF
ePub

((

Bouddha, prestigieux ascète et dieu solaire. Pour chacun des souverains mythiques dont l'existence est rejetée dans un lointain passé, la mémoire indienne conserve le nom du «< chapelain » qui était son maître religieux ces couples indissolubles de noms prouvent que le trône reposait sur les mêmes bases que l'autel. L'Inde fut possédée, à vrai dire, d'un rêve perpétuel d'impérialisme, mais cet impérialisme est irréductible à tout autre. Bien que la Bhagavad Gita paraisse quelquefois identifier le déchaînement de la force brutale à la réalisation du devoir, l'ambition indienne vise à conquérir non des provinces volées aux peuples voisins, mais des terres mystiques (bhumis) qu'il faut maîtriser pour parvenir au salut. Les unificateurs du pays furent donc moins ses rois que ses héros religieux, historiques ou légendaires. Sa victoire universelle (digvijaya) assure à Camkara un empire sur les esprits plus sûr que la consécration des souverains par le sacrifice du cheval (açvamedha). Dirons nous que la « catholicité » hindoue n'est point de ce monde? Elle en fait partie, certes, par son apostolat de la compassion et, M. Radhakumud Mookerji le proclame en toute justice, par sa vocation pour la spiritualité.

P. MASSON-OURSEL.

L'ANIMAL SACRÉ DE SET-TYPHON

ET SES DIVERS MODES D'INTERPRÉTATION (

Il y a un problème d'archéologie égyptienne qui, en dépit de laborieuses recherches, aussi bien en France qu'à l'étranger n'a pu jusqu'à ce jour être résolu. C'est l'identification de l'animal sacré de Set-Typhon.

Les Égyptiens l'ont représenté sous l'aspect d'un élégant quadrupède de couleur fauve, aux jambes hautes et nerveuses, avec un museau pointu, de longues oreilles coupées carrément, une queue raide, fourchue ou terminée en boule, des pieds. comprenant plusieurs doigts, à la manière des chiens et des félidés.

Comme emblème de l'esprit du mal, on serait porté à lui attribuer un naturel féroce, sanguinaire, indomptable, et cependant nous le voyons toujours le cou entouré d'un large collier signe évident qu'on était parvenu à le domestiquer.

Tel est l'animal typhonien, nous le possédons sur tous ses aspects, de face, de profil, debout, assis et accroupi. Sur l'une de ses images peinte à Beni-Hassan (fig. 1), il porte le nom de L scha, c'est ainsi que nous aurons quelquefois l'occasion de le désigner.

2

Objet de nombreux essais d'identification, on l'a successivement assimilé à l'âne, à l'oryx', à la gerboise. Lefébure a vu un chien et plus spécialement un lévrier. Thilénius a établi

1) Communication faite à l'Académie des Inscriptions et Belles-lettres, le vendredi 20 août 1920.

2) H. Brugsch., Religion und Mythologie der alten Egypter, p. 703-716. 2) L'animal typhonien par Lefebure, dans le Sphinx, t. II, p. 63 et suiv.

1

un rapprochement entre le museau de l'animal sétien et celui du Macrocelines (la souris au museau pointu). D'après Loret ce serait un lévrier d'un genre spécial'. Lortet a suggéré le Tapir; suivant Erman, il est probable que derrière cette figure se cache quelque animal qui n'était déjà plus familier aux Égyptiens de l'époque historique1; « à l'époque archaïque, dit von Bissing l'animal de Set est une girafe stylisée », mais aucune de ces opinions n'a été concluante.

[blocks in formation]

Lorsque dans les marais du Bar-el Gazal, on découvrit l'Okapi, un professeur de l'Université de Bonn, le docteur Wiedemann déclara qu'il fallait voir dans ce quadrupède l'animal symbolique du dieu Set .

1) Recueil de travaux relatifs à la philologie et à l'archéologie égyptiennes et assyriennes, XXII année, p. 214.

2) Proceedings of the society of biblical archeologie, vol. XXVIII, p. 131. 3) La Religion égyptienne, trad. française, p. 31.

4) Recueil de travaux, t. XXXIII, p. 18-19.

5) Die Umchau, 13 décembre 1902 (n° 51), p. 1002. Das Okapi il alter Agypten, von prof. Dr A. Wiedemann, H. Breasted a suivi la même opinion dans A History of the Egypt from the Earliest Times to the persian conquest, p. 30.

Si avant de formuler une semblable opinion, son auteur avait soigneusement analysé chacun des éléments dont se compose l'individu, il aurait certainement reconnu qu'en dehors de ses grandes oreilles, l'Okapi n'avait rien qui rappelât l'emblème typhonien. Un cou élancé, une croupe très légèrement inclinée de l'avant à l'arrière, des pieds de ruminant, un pelage rayé, rappelant celui du zèbre, tels sont les caractères extérieurs de l'Okapi, lesquels, si ce n'est les oreilles, n'ont rien de commun avec le L scha1.

Depuis, il est vrai, Wiedemann a renoncé à son idée pour se rabattre sur le chameau. On comprendra que nous n'insistions point sur une semblable assimilation.

Après l'Okapi, c'est l'Oryctérope, vulgairement connu sous le nom de cochon de terre, qui, en raison de ses oreilles de grandeur démesurée, a été sollicité pour jouer, à son tour, le rôle de monstre typhonien. L'idée avait déjà été émise une première fois, en 1878, par Isembert et Chauvet, dans leur Itinéraire de l'Egypte. Cette thèse, appuyée de nouveaux arguments, fut dernièrement reprise par Swenfürth dans le Berliner Tageblat d'abord', dans l'Umchau ensuite'. Voir dans l'Orycterope le quadrupède sétien, c'est vraiment prodigieux. Alerte, vif, élancé, fier d'allure, mais il est très beau le symbole de l'esprit du mal, tandis que l'Oryctérope, au contraire, bas sur ses pattes, trapu, dépourvu d'élégance, une queue courte, toujours somnolent, peut, bien moins encore que l'Okapi, en dépit de ses oreilles formidables, être assimilé à l'emblème typhonien.

Une simple comparaison eût cependant suffi à montrer l'invraisemblance d'une pareille identification. Aujourd'hui le rap- ́ prochement sera d'autant plus facile que nous possédons une interprétation égyptienne de ce quadrupède.

1) P. Hippolyte Boussac, Set-Typhon, génie des ténèbres, Paris, 1907, in-8. 2) Revue archéologique, t. XXII, novembre-décembre 1913, p. 402. L'animal sacré du dieu Set, par S. Reinach. Berliner Tageblat, 17 août 1913. 3) Die Umchau, septembre 1913, p. 783-784.

Cette image, inconnue jusqu'ici des égyptologues', m'a été fournie par une peinture que j'ai découverte et relevée moimême à l'Assassif, dans une tombe thébaine de la XIX dynastie. Elle nous montre qu'au même titre que le singe, le chat, le chien, la gazelle. etc., l'Oryctérope faisait partie des animaux d'agrément des dames égyptiennes. Le cou entouré d'un riche collier orné de perles en lapis lazuli, il sommeille à côté du siège de sa maîtresse, la dame Mout-em-oua, pallacide d'Ammon, assise sous un kiosque et jouant aux échecs avec Kenouro, son époux.

Si l'oryctérope est l'animal typhonien, celui-ci doit être l'oryctérope, et l'image de l'un doit nécessairement être l'image de l'autre. Or les interprétations de ces deux animaux étant absolument dissemblables, l'assimilation est impossible. Il faut donc renoncer également à voir l'oryctérope dans l'emblème. du dieu Set.

Les auteurs des identifications que nous venons d'examiner n'ayant, pour la plupart, pris en considération que la tête de leurs sujets, la grandeur des oreilles, sans tenir compte de l'en semble et surtout des pieds, qui leur auraient fourni une précieuse indication, ne pouvaient naturellement arriver qu'à un résultat négatif.

Au contraire des précédents, M. Newberry, négligeant les oreilles, ne prend en considération que la queue, laquelle d'ailleurs, on le verra plus loin, n'est pas une queue, et propose comme type de l'animal typhonien le Phacochareus africanus3. Lourd et sans élégance, ce quadrupède a une tête énorme, des pieds munis de sabots au lieu de doigts; seule sa queue, ornée à son extrémité d'un flocon de poils, se dressant rigide à l'arrière de l'animal, rappelle un peu. en effet, celle du monstre typhonien, mais là se borne la ressemblance.

1) Je l'ai toutefois publié dans La Nature, no du 12 juillet 1913. L'Oryctérope, par P. Hippolyte Boussac.

2) Clio, année 1912, p. 397-104. The cult animal of Set, by P. E. Newberry.

« PrejšnjaNaprej »